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L'AVENTURE DE MME MUIR (1947)


Titre français : L'Aventure de Mme Muir 
Titre original : The Ghost and Mrs. Muir
Réalisateur : Joseph L. Mankiewicz
Scénariste : Philip Dunne
Musique : Bernard Herrmann
Année : 1947
Pays : Usa
Genre : Fantômes et spectres
Interdiction : /
Avec : Gene Tierney, Rex Harrison, George Sanders, Edna Best, Natalie Wood...


L'HISTOIRE : Après la mort de son mari, Lucy Muir désire s'émanciper de sa belle famille et part avec sa fille et sa gouvernante s'installer au bord de mer. Elle veut louer un ravissant cottage inhabité depuis quatre ans mais le loueur lui déconseille, la rumeur voulant que la demeure soit hantée par son ancien propriétaire, le capitaine Gregg. Ne croyant pas à ces superstitions, Lucy Muir emménage dans le cottage. Peu de temps après, il lui faut se rendre à l'évidence : le fantôme du capitaine Gregg existe bel et bien. D'abord houleuse, la relation entre Lucy Muir et son drôle de fantôme va prendre une tournure inattendue...


MON AVISDieu que ce film est magnifique. Un pur bijou, de ceux qui font aimer le cinéma. Réalisateur du somptueux Le Château du Dragon en 1946, dans lequel il faisait déjà jouer Gene Tierney, le talentueux Joseph L. Mankiewicz livre avec L'Aventure de Mme Muir la plus parfaite des romances fantastiques. Avec un sujet somme toute assez banal (une veuve tombe amoureuse, et réciproquement, du fantôme qui hante sa maison), Mankiewicz transcende le scénario de Philip Dunne (adaptation du roman de Josephine Leslie) et offre au spectateur une oeuvre touchante et émouvante.

Il faut dire qu'il a bénéficié du talent et du charisme de ses deux acteurs principaux, à savoir la sublime Gene Tierney (que votre hôte n'hésite pas à mettre dans son Top 5 des plus belles actrices du cinéma) et le classieux Rex Harrison. La performance des deux comédiens et l'alchimie quasi divine qu'ils développent entre eux sont assurément la pièce maîtresse de L'Aventure de Mme Muir. Il est tout simplement impossible d'imaginer deux autres acteurs une fois la vision du film terminée.

Gene Tierney interprète donc Lucy Muir, une veuve qui n'a jamais vraiment été touché par la flèche de Cupidon et qui avouera que son mariage ne lui a pas donné satisfaction, la réalité ayant pris le pas sur les romans d'amour qu'elle lisait. Sa rencontre avec un fantôme bougon, à l'ego surdimensionné mais au cœur tendre, va venir chambouler sa vie et refaire naître la flamme dans tout son être. Une romance vouée à l'échec bien sûr puisqu'on ne peut pas avoir une relation avec un fantôme. Une situation compliquée pour Lucy Muir, qui finira par succomber au charme d'un écrivain pour enfant, interprété par un George Sanders un peu fade il faut bien le reconnaître. Une nouvelle liaison qui mettra fin à l'existence du capitaine Gregg lors d'une scène absolument magnifique dans laquelle Rex Harrison, contemplant Gene Tierney endormie, s'avoue vaincu face à ce nouveau prétendant fait de chair et de sang et offre à sa dulcinée la possibilité de vivre pleinement sa nouvelle vie en lui faisant croire que tout ce qui s'est passé entre eux n'était qu'un rêve.

Une séquence (parmi tant d'autre) qui confine au sublime, élevant le romantisme dans une dimension de pureté insoupçonnée. Si L'Aventure de Mme Muir est transfigurée par ses deux interprètes, elle l'est aussi par la photographie éblouissante et par la mise en scène de Mankiewicz qui fait des merveilles. La première journée dans la maison du capitaine Gregg permet au réalisateur de s'amuser avec les codes du cinéma d'épouvante et de créer une ambiance gothique que n'aurait pas renié les futurs classiques du genre. Eclairage à la bougie, orage violant, éclair faisant apparaître des ombres et présence invisible vont venir effrayer la pauvre Gene Tierney, qui, bien qu'apeurée, se montrera forte et ne se laissera pas intimider par le capitaine Gregg. Les premiers dialogues entre les deux personnages sont savoureux et laissent présager quelques confrontations épiques, chacun ayant un caractère bien trempé.

Le film devient donc ensuite une comédie romantique au charme certain, n'ennuyant jamais, et surtout, ne sombrant jamais la mièvrerie qui aurait pu rendre ridicule cette love-story irréelle. L'aspect dramatique interviendra vers la fin du métrage et on se prend d'une réelle empathie pour Mme Muir, être solitaire qui vieillie sans avoir trouvé l'amour. L'ultime séquence viendra alors nous rendre le sourire et c'est bien la seule fin envisageable qu'on puisse accepter, concluant de manière parfaite ce poème romantique qui nous a bercé durant 104 minutes, accompagné par une partition musicale due à Bernard Hermann en parfaite adéquation avec les images qu'elle illustre. Lyrique, mélancolique, inspiré, passionné, L'Aventure de Mme Muir est assurément l'un des plus beaux films que le cinéma nous a offert. Une série télévisée a vu le jour en 1968, avec Hope Lange et Edward Mulhare dans les rôles principaux. 



Stéphane ERBISTI

AU-DELÀ DE DEMAIN (1940)

 

Titre français : Au-Delà de Demain
Titre original : Beyond Tomorrow
Réalisateur : A. Edward Sutherland
Scénariste : Adele Comandini
Musique : Frank Tours
Année : 1940
Pays : Usa
Genre : fantômes et spectres, conte fantastique
Interdiction : /
Avec : Harry Carey, C. Aubrey Smith, Charles Winninger, Jean Parker, Richard Carlson...


L'HISTOIRE : Un soir de réveillon, trois hommes d’affaires fortunés mais sans famille décident d’inviter trois étrangers à leur table. Seuls James et Jean, jeunes gens dans la précarité, acceptent. Cette soirée va changer le cours de leur vie. Ils tombent amoureux l’un de l’autre et James devient crooner à succès. Les trois protecteurs disparaissent dans un accident d’avion et leurs fantômes vont bientôt mettre tout en œuvre pour reformer le couple qui s’est séparé...


MON AVISLe film de Noël est un genre très prisé aux Etats-Unis. On se souvient de Scrooge (1935), A Christmas Carol (1938), Miracle sur la 34ème Rue (1947), A Christmas Carol (1951), Noël Blanc (1954) ou bien encore La Vie est Belle (1946) de Frank Capra, l'exemple le plus célèbre. Des films se déroulant peu de temps avant la venue du Père-Noël et qui sont pétris de bons sentiments afin de redonner goût à la vie et au bonheur aux spectateurs déprimés. D'autres films ont suivis cette tradition par la suite mais certain ont pris le pied inverse en faisant de Noël une période cauchemardesque, n'hésitant pas à transformer le gros monsieur aux habits rouges et à la barbe blanche en un tueur psychotique, ce qui a fait hurler de rage les ligues de vertus ! En 1940, le réalisateur A. Edward Sutherland apporte sa pierre à l'édifice avec un pur film de Noël, tombé dans l'oubli : Au-delà de Demain.

On connait un peu ce réalisateur grâce à des films tels Murders in the Zoo (1933), Laurel et Hardy conscrits (1939) ou La Femme Invisible (1940). Film de Noël oblige, Au-delà de Demain est lui aussi pétri de bons sentiments. Trop irais-je même à dire car dans le cas présent ici, on frôle (on plonge dans ?) l'indigestion. Je sais bien, c'est avant tout un conte féerique, une belle histoire qui n'a que faire des aléas de la réalité. On a tout de même un peu de mal à s'y laisser prendre en 2017. Comment trouver crédible que trois hommes d'affaires plus que fortunés proposent hospitalité à des étrangers démunis afin de passer Noël en bonne compagnie ? Après tout, pourquoi pas, il existe peut-être encore des philanthropes dans notre monde actuel, qui sait ? Admettons que le postulat de départ est tout de même assez extravagant mais nous sommes en 1940, rappelons-le. La suite sera du même acabit et l'ambiance fleur bleue attendra son paroxysme quand les deux invités, James Houston (Richard Carlson) un Texan rêvant d'un carrière de chanteur et Jean Lawrence (Jean Parker) une infirmière dévouée, tombent comme par miracle amoureux l'un de l'autre. Bienvenu au pays des Bisounours.

On nage vraiment en pleine guimauve et même si j'aime bien les jolies histoires, j'ai eu du mal à accrocher parce qu'en plus, il ne se passe pas grand chose à l'écran et que l'ennui a vite pris le dessus. Dans son milieu, le film bifurque vers le fantastique puisque nos trois hommes riches périssent dans un accident d'avion mais leurs âmes restent pour un temps sur Terre afin, tel Michael Landon dans Les Routes du Paradis, de venir en aide aux personnes dans le besoin. La tâche principale de l'un des fantôme sera de faire se rabibocher James et Jean, séparés depuis que James est devenu un crooner réputé et qu'une chanteuse avide et manipulatrice a jeté son dévolu sur lui. Les scènes avec les fantômes sont plutôt bien réalisées, l'aspect translucide fonctionne correctement. Mais la guimauve reprend malheureusement ses droits avec une approche biblique qui nous achève.

Car Dieu, représenté par des éclats de lumière divine, rappelle à lui les âmes des fantômes errants. Leur mission n'étant pas terminé, ils demandent un peu de temps pour la parachever. Ce que Dieu autorise, on est la veille de Noël tout de même ! Il faut être dans de bonnes dispositions pour apprécier pleinement Au-delà de Demain. Le Bien, la gentillesse, la bonté sont les maîtres-mots du film qui assume à 100% son aspect conte de Noël. Pour ma part, j'ai trouvé ça trop mou, pas assez dynamique, trop mièvre et cette belle histoire n'a pas réussi à m'emballer plus que ça, malgré un casting bien en place. A découvrir tout de même car c'est un film assez rare.




Stéphane ERBISTI

AU CŒUR DE LA NUIT (1945)

 

Titre français : Au cœur de la Nuit
Titre original : Dead of Night
Réalisateur : Alberto Cavalcanti, Charles Crichton, Basil Dearden, Robert Hamer
Scénariste : John Baines, Angus MacPhail
Musique : Georges Auric
Année : 1945
Pays : Angleterre
Genre : Film à sktches
Interdiction : /
Avec : Mervyn Johns, Michael Redgrave, Roland Culver, Mary Merall, Frederick Valk...


L'HISTOIRE : Walter Craig, un architecte, se rend chez Eliot Foley pour discuter des nouveaux aménagements du cottage de ce dernier. Arrivé sur place, il découvre avec stupeur et une sensation de déjà-vu que le cottage comme ses occupants du week-end sont ceux-là même qui hantent ses nuits de façon récurrente. Parmi les invités se trouve un psychanalyste, le docteur Van Straaten, qui va tenter de prouver à Walter Craig, ainsi qu'aux autres personnes présentes, que ce type de ressenti peut s'expliquer scientifiquement. Tout à tour, les invités se mettent à raconter au psychanalyste les curieuses expériences qu'ils ont vécu...

MON AVISSi le cinéma fantastique a connu une de ses heures de gloire en Angleterre entre 1955 et 1976, grâce aux productions de la Hammer Films bien sûr, il serait fort dommageable pour l'amateur d'omettre un petit classique anglo-saxon qui, lui, date de 1945 ! Le fantastique dans les années 40 est plutôt l'apanage des Etats-Unis, voire même de la France, avec des œuvres plus poétiques et envoûtantes pour notre beau pays. Pourtant, en 1945 nous vient d'Angleterre Au Cœur de la Nuit, ou Dead of Night pour son titre original. Un film réalisé à quatre mains, par Alberto Cavalcanti, Charles Crichton, Basil Dearden et Robert Hamer. Les amateurs de fantastique feutré et raffiné seront largement comblés par le rendu et l'atmosphère présents dans Au Cœur de la Nuit.

La visite d'un architecte à l'intérieur d'un cottage comprenant cinq personnes va permettre d'insérer dans l'histoire des éléments fantastique au réel. Quand Walter Craig (Mervyn Johns) se met à révéler aux habitants du cottage qu'il les voit chaque nuit en rêve, l'ambiance commence à bifurquer vers le fantastique et le spectateur de se questionner : les habitants sont-ils vivants ? Sont-ils des fantômes ? La présence d'un psychanalyste dans l'assemblée nous ramène un peu dans la réalité puisque ce dernier va donner des explications plausibles et scientifiques au ressenti et au sentiment de déjà-vu de Walter Craig. Commence alors ce qui peut-être perçu comme étant le fil conducteur d'un film à sketches, puisque, tout à tour, les personnes présentes dans le salon vont raconter une expérience qu'ils ont vécu et que le psychanalyste va devoir écouter et placer sous le signe de la rationalité.

Nous allons donc avoir droit à cinq récits, de durée différente, qui vont donner tout son intérêt à l'histoire et au film. Le premier récit s'intitule Le chauffeur de corbillard et préfigure, avec 55 ans d'avance, l'intrigue de Destination Finale ! Fou ! Un récit assez court mais efficace. Plus intéressant sera le second récit, baptisé Un conte de Noël et dans lequel une jeune fille contemporaine va croiser le fantôme d'un petit garçon assassiné par sa sœur il y a un siècle. Une histoire de fantôme astucieusement mise en scène et joliment filmé. Troisième histoire et l'une des meilleures : Le miroir hanté. Un récit qui joue dans le registre de l'épouvante et qui ne manque pas de mystère, jouant habilement avec l'angoisse, et ce, avec un simple miroir donc, qui ne renvoie pas exactement le reflet qu'il est censé renvoyer justement ! A moins que les différences avec la réalité ne soient dues au cerveau dérangé de celui qui contemple son reflet ? Mystère, mystère ! L'histoire du golf, quatrième récit, se montre nettement plus humoristique et n'aurait pas dépareillé dans les pages des bandes-dessinées EC Comic qui seront publiées dans les années 50. L'idée de cette histoire provient de H.G. Wells, le papa de La Guerre des Mondes !

Quant au cinquième et dernier récit, c'est très certainement le plus connu quand on parle d'Au Coeur de la Nuit avec les amateurs du genre. Il faut dire que Le Ventriloque (ou La Poupée du Ventriloque) est une pure réussite et que la vision de cette poupée qui semble dotée de la vie ne manquera pas d'incruster ses images dans votre esprit. Son aura est telle que l'histoire sera reprise par l'écrivain William Goldman, dont le livre Magic sera adapté au cinéma sous le titre éponyme par Richard Attenborough en 1977, avec un Anthony Hopkins magistral et une poupée toute aussi inquiétante et charismatique que celle présentée dans Au Cœur de la Nuit. Le film se clôturera avec un final du fil conducteur très original, qui nous laisse avec un beau sourire sur le visage. A la manière de La Quatrième Dimension, série culte de la fin des années 50, Au Cœur de la Nuit réserve bien des surprises au public, avec ses twists bien pensés et qui fonctionne admirablement bien. La photographie et le noir et blanc du film dont superbes, le casting parfaitement en place et on se laisse facilement envoûter par le(s) récit(s). C'est assurément un très beau film fantastique qui nous est offert ici, intelligent, épuré, subtil, très soigné dans son traitement. A redécouvrir sans hésitation.




Stéphane ERBISTI