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BIG FISH (2003)

 

Titre français : Big Fish
Titre original : Big Fish
Réalisateur : Tim Burton
Scénariste : John August
Musique Danny Elfman
Année : 2003
Pays : Usa
Genre : Conte fantastique
Interdiction : /
Avec Ewan Mc Gregor, Albert Finney, Billy Crudup, Jessica Lange, Alison Lohman, 
Helena Bonham Carter, Danny DeVito, Steve Buscemi, Mario Cotillard...


L'HISTOIRE : Alors que son père est sur le point de mourir, William Bloom décide de se rapprocher de lui afin de connaitre cet homme qui lui a raconté tant de contes plus ou moins fantastiques durant son enfance. Débordant d’imagination, Edward Bloom va revenir sur l’histoire de sa vie, un véritable voyage dans des lieux atypiques où personnages extravagants et magie se côtoient en permanence...


MON AVISQuelqu’un ne connait-il pas encore le talentueux cinéaste américain Tim Burton ? Visionnaire de génie, ce dernier possède une filmographie des plus intéressantes à ce jour : d’univers macabres et noirs (Batman, Sleepy Hollow, Les Noces Funèbres, Sweeney Todd, Dark Shadows) aux mondes merveilleux et enchanteurs (Charlie et la Chocolaterie, Alice au Pays des Merveilles), ponctués tantôt de loufoqueries et bizarreries en tous genres (Beetlejuice, Mars Attacks !, La Planète des Singes) tantôt de poésie (Edward aux Mains d’argent, Ed Wood) il semble impossible de ne pas trouver dans la carrière de ce prodige un film qui vous ait marqué. En 2003, le réalisateur américain décide de se replonger dans une histoire mêlant fantastique, merveilleux et poésie avec Big Fish, à la manière d’un Edward aux Mains d’argent sorti 13 ans plus tôt.

Projet de Steven Spielberg que ce dernier abandonnera au profit du film Arrête-moi si tu peux, Big Fish tombera finalement dans les mains de Tim Burton. Un film complexe, tant sur le point de vue émotionnel (un lien père-fils des plus émouvants, l’accompagnement d’un homme plein de vivacité, de bonté et d’humour dans un ultime voyage) que sur l’aspect fantastique de l’histoire (faire la distinction entre rêve et réalité, fiction et vérité, dans les histoires ô combien extravagantes d’Edward Bloom), dont notre réalisateur de génie réussit à s’accaparer les ficelles pour nous livrer ce qui est aujourd’hui l’un de ses long-métrages les plus réussis.

L’histoire de la vie d’un homme ordinaire comme s’il s’agissait d’un mythe : voilà une phrase prononcée par le romancier Daniel Wallace, auteur du livre dont s’inspire le film (Big Fish, a story of mythic proportions), qui décrit parfaitement le long-métrage de Tim Burton.

Réussissant à créer un équilibre entre le merveilleux, l’humour et le magique d’un côté et la poésie et l’émotion de l’autre avec comme seuls véritables liens entre ces deux entités opposées les valeurs de la famille et l’amour, Big Fish nous plonge dans une aventure humaine et fantastique à la fois dans laquelle le spectateur passera par tous les sentiments. Tantôt amusé (des discussions d’enfants sur des sujets irrationnels aux histoires décalées d’un père débordant d’imagination, tant de choses prêtent à sourire), tantôt contemplatif (les jeux du cirque et ses personnages extravagants), tantôt surpris (les passages soudains d’un univers à un autre totalement opposé : d’une forêt lugubre, froide et menaçante à l’accueillante, festive et colorée ville de Spectre, il n’y a pourtant que quelques pas à faire…), tantôt attristé et ému (difficile de rester de marbre devant ce final larmoyant et ces relations père-fils), Big Fish réussit à nous transporter dans ce voyage fantastique aux multiples péripéties avec ce qui pourrait être comme devise vis ta vie sans aucune limite.

Des monstres en tous genres (loup-garou, géants, siamoises, sorcière…), des décors enchanteurs (la ville de Spectre, le vaste champ de jonquilles, le cirque…) et des personnages attachants (qu’ils soient réels ou fictifs) : un ensemble d’éléments qui finalement s’assemblent au fur et à mesure que nous avançons dans cette histoire, telles les pièces d’un puzzle, pour nous donner un final somptueux et ô combien émouvant !

Alors que certains regretteront sa quasi absence aux Oscars 2004, Big Fish n’en demeure pourtant pas moins l’un des films les plus réussis de son géniteur. Drôle, émouvant, inventif et surprenant, ce voyage fantastique dans l’univers d’un père de famille débordant d’imagination vous enchantera, petits comme grands.




David MAURICE

BEETLEJUICE (1988)

 

Titre français : Beetlejuice
Titre original : Beetlejuice
Réalisateur : Tim Burton
Scénariste : Michael McDowell, Warren Skaaren, Larry Wilson
Musique Danny Elfman
Année : 1988
Pays : Usa
Genre : Anticipation, comédie
Interdiction : /
Avec Michael Keaton, Alec Baldwin, Geena Davis, Jeffrey Jones, Winona Ryder...


L'HISTOIRE : Adam et Barbara forment un couple aussi charmant que gnan-gnan et mènent une vie d'un calme et d'une platitude rares. Lors d'une petite escapade en voiture, Adam manque d'écraser un chien et fait tomber la voiture dans une rivière, causant ainsi sa noyade mais aussi celle de son épouse. Le couple revient pourtant comme si de rien n'était dans sa demeure, prenant vite des allures de manoir hanté. Ils découvriront par la suite qu'ils sont devenus instantanément des fantômes, et sont à présent condamnés à hanter leur demeure! Pire encore, de nouveaux occupants débarquent avec un objectif bien précis : refaire la maison de fond en comble. C'en est trop pour les deux tourtereaux qui tentent de faire fuir cette drôle de famille, et par tous les moyens possibles, quitte à faire appelle à Beetlejuice...


MON AVISGros succès aux Etats-Unis mais énorme bide en Europe (et pour cause le personnage n'était connu que chez les ricains), Pee Wee Big Adventure aura du mal à faire connaître le talent du grand Tim Burton au public européen, et il faudra attendre son film suivant pour que son univers se fasse remarquer de manière nettement plus importante aux yeux du public : Beetlejuice, qui possédera d'ailleurs un budget bien plus conséquent que celui de Pee Wee Big AdventureLe succès du film fut tel qu'une série animée du même titre débarquera sur les écrans en 1989. Légèrement édulcorée (le comportement obsédé et grossier de Beetlejuice a été adouci), elle reste toutefois intéressante visuellement parlant puisqu'elle puise son inspiration dans l'univers biscornu et macabre de Burton.

Véritable best of de son univers, Beetlejuice est sans doute la pièce maîtresse de la filmographie de Burton, qui infuse toute la folie, l'inventivité, et les habitudes qui lui sont dues en un seul long-métrage. On retrouve l'humour cartoonesque frôlant à plusieurs reprises le non-sensique hésitant entre comic-book survolté et Looney Tunes sous acide, les délires baroques, gothiques et macabres touchant autant les scènes fantastiques que les décors tortueux, des scènes d'émotions incroyablement touchantes, la musique de Danny Elfman, l'utilisation de la stop motion… Difficile d'échapper au film si on est fan de Tim.

En quelques secondes de générique, Burton frappe (déjà!) son film d'un éclair de génie : la caméra survole un village américain, et s'arrête au final sur une grande maison dominant les environs ; très vite l'aspect général des maisons et l'intrusion d'une araignée nous montre clairement que ce sont ni plus ni moins des maquettes! Pourtant cette maquette existe bien, et elle appartient aux Maitland, un couple à la perfection quasi-utopique, vivant dans ladite maison surplombant la petite ville. Tout y est lumineux, harmonieux, tout le monde y est heureux, et seul cette voisine rapidement collante vient mettre une ombre au tableau. Pour les besoins de leur maquette, le gentil couple devra faire un tour en ville, avant d'être bêtement victime d'un accident de voiture… mortel. Condamnés à hanter leur propre foyer, Adam et Barbara ne peuvent plus retrouver leur monde: une simple échappée de la maison se termine par une virée sur Saturne, planète de sable habitée par des vers géants très voraces !

Vendue par une amie trop fouineuse, la maison est rapidement achetée par une famille de New-Yorkais aussi envahissants que excentriques: la belle-mère est une sculptrice démente suivant les conseils d'un soi-disant spécialiste du paranormal, le père n'a rien à faire (!!) et la gamine est une petite gothique aussi morbide que silencieuse déboulant dans la maison en cercueil noir et tenue d'enterrement !

Rien de rose pour les Maitland, qui réalisent que les vivants ne peuvent les voir malgré leurs apparitions fort grotesques: visage arraché, décapitation, pendaison, déguisement classique de fantômes. L'occasion d'offrir la scène mémorable du placard (voire celle où Adam et Barbara ont bien du mal à faire sursauter la vilaine famille avec des vieux draps) où les nouveaux occupants ne semblent pas se soucier du spectacle affreux qui s'offre sous leur nez. C'est en découvrant un livre réservé uniquement aux morts, que les amoureux découvrent l'autre monde ainsi que l'existence d'un certain Beetlejuice, un mort vivant obscène et hystérique qui se considère comme un bio exorciste : il fait fuir les vivants. Faisant appel à ses services, Adam et Barbara s'en débarrassent aussitôt, sans savoir qu'il va longuement leur coller aux basques et pourquoi pas mettre un boxon monstre dans la maison.

Futur Batman chez le même Burton, Michael Keaton endosse un rôle à contre-emploi stupéfiant, jouant à la fois avec son maquillage lugubre et de multiples effets spéciaux le rendant méconnaissable, mais aussi avec un soupçon d'improvisation dans le comportement et les dialogues. L'occasion pour l'acteur trop cantonné dans les rôles de gentils de se défouler un maximum.

Même chose pour Winona Ryder, ici dans la peau de Lydia, adolescente révélant une nature parfois tourmentée (la tentative de suicide) mais se montrant nettement plus heureuse au contact du couple de fantômes, le couple rêvé qui lui fait oublier des parents snobs et ringards. La petite a beaucoup de répartie et son stock de dialogues atteint une certaine saveur (Je vis dans une grande, longue, grande et profonde chambre noire ou Vous êtes pleins de pus et pleins de veines, comme dans La nuit des morts vivants) jusqu'à cette libération finale, et en musique en plus !

Que ce soit le score de Danny Elfman ou les mélodies de Harry Belafonte, la musique joue un rôle primordial dans le film : Elfman nous sert sa bande sonore la plus tonitruante, la plus enjouée et la plus belle de toute sa carrière (avec celle de Edward aux Mains d'argent bien entendu) et dont le thème musical sera réutilisé à tort et à travers. Là où on s'y attend le moins, Beetlejuice prend des allures de comédie musicale lors d'une scène d'anthologie, pour ne pas dire culte : invitant de nombreux bourgeois et personnalités de la haute société, la belle mère de Lydia va voir son repas se transformer en piste de danse avec une possession générale des convives, les forçant à chanter et danser sur le fameux Day-O. On peut en mourir de rire ou juste esquisser un sourire au choix, mais la scène reste définitivement imparable. Rien que pour elle, on revoit Beetlejuice avec une grande délectation.

Véritable remède contre le blues ou la grise mine, Beetlejuice donne l'occasion à Burton d'étaler son univers dans quelques séquences se déroulant dans le monde des morts, créatures décharnées et burlesques qui possèdent encore les marques de leur décès : requin accroché à une jambe, squelette cramé, os de poulet traversant une gorge, employé de bureau raplapla comme une feuille de papier, pendu distribuant des photocopies, joueurs de rugby n'ayant toujours pas réalisé leur propre mort, et même un chasseur dont le crâne a été rétréci et la bouche cousue !

Très grand amateur d'animation image par image, Burton l'utilise habilement et fréquemment dans son film avec les vers géants, la transformation surréaliste de Adam et Barbara, et certaines animations d'objets comme cette porte béante ou ces sculptures douées de vie. Tim Burton bouillonne d'idées à chaque instant et nous en fait profiter pleinement jusqu'à ce dénouement bordélique et jouissif où l'infâme Beetlejuice laisse libre cours à son cabotinage et à ses mauvais tours. Si on est loin d'Argento, Burton fait néanmoins exploser les couleurs dans certaines parties du décor, en particulier lors de la scène finale ou celle se situant dans l'autre monde. Difficile de ne pas écarquiller les yeux face à ce BeetleSnake, à ce rébus animé, à la vision de la planète Saturne, à ces subites plongées dans les maquettes des Maitland, à la transformation de Beetlejuice en manège… 

L'univers de Burton est là et incontestablement là, il imprègne le film de toute part, reprend des éléments chers à Lewis Carroll, à la Hammer Films, aux bandes dessinées les plus folles, à Chuck Jones, à la peinture surréaliste… 

Un pur bonheur que ce jus de cafard.


Jérémie MARCHETTI

BATMAN LE DÉFI (1992)

 

Titre français : Batman le Défi
Titre original : Batman Returns
Réalisateur : Tim Burton
Scénariste : Sam Hamm, Daniel Waters
Musique : Danny Elfman
Année : 1992
Pays : Usa, Angleterre
Genre : Super-héros
Interdiction : /
Avec Michael Keaton, Danny DeVito, Michelle Pfeiffer, Christopher Walken...


L'HISTOIRE : C'est Noël à Gotham City, et une organisation secrète sème la terreur et la discorde dans la ville. Celle-ci est dirigée par le Pingouin, être monstrueux vivant reclus dans les égouts, s'alliant avec l'ambitieux et dangereux Max Shreck pour conquérir la cité et se débarrasser de Batman. Batman, qui se retrouve d'ailleurs bien ennuyé face à une imprévisible ennemie : Catwoman, curieuse créature de la nuit comptant bien faire payer ce que lui a fait subir Max Shreck. Il va avoir du pain sur la planche…


MON AVIS Avec Batman premier du nom, Tim Burton préfère délaisser le matériau d'origine et d'avantage imposer SA vision, son style, ses personnages et son univers. Simple et tourmenté, son Batman se faisait rapidement dévorer par un Joker coloré et déchaîné, assassin et grimaçant. Le scénario se montre classique, de même que les scènes d'actions : tout est dans les décors, les idées, la musique, les plans souvent superbes (la Batwing s'imprimant sur la Lune), Burton offre un spectacle honnête, que certains fans de l'homme chauve-souris trouvèrent bien décevant. Le grand Tim remet le couvert trois ans plus tard, peu après ce qui restera son plus grand film : Edward aux Mains d'argent. Mais ce qui surprend encore plus, c'est que Batman le Défi fera lui aussi parti des plus grands films de son auteur. Une expérience qui renvoie pour beaucoup le premier film aux oubliettes.

Entre le New York des années 30 et l'expressionnisme allemand, Gotham City avait déjà été planté dans le premier film, grâce au talent de Anton Furst. Burton relooke à nouveau la ville, donne un cachet nettement plus gothique (anges de pierre, cimetière, toits biscornus…), la rend plus étouffante, la parsème de neige et amplifie par la même occasion sa beauté morbide, parfois même ses couleurs, Noël étant, on aura droit à un gigantesque arbre de Noël et quelques boutiques bien garnies de jouets ne tardant pas à brûler.

Après le pimpant et burlesque Joker, ce sont Catwoman et le Pingouin qui rejoignent instantanément la clique de méchants batmanienne. Mais pas seulement, puisqu'ils rejoignent aussi la troupe des personnages burtonniens, et plus particulièrement le Pingouin. Freak de son état, il est rejeté par des parents de la haute société (reconnaîtrez-vous Paul Pee Wee Reubens dans le rôle du pater ?) qui tel Moïse, l'envoient sur les flots, non pas purs d'une rivière, mais ceux, verdâtres des égouts. Se constituant une famille de saltimbanques inquiétants, à base de clowns sinistres et de pantins décharnés, il se réfugie avec une poignée de pingouins dans un antre dissimilé sous un zoo abandonné.

Ce zoo au look particulièrement burtonnien (statues grisâtres, neige, grillages tordus, ombres mystérieuses, arbres morts…), renvoi à une version dark du jardin gourmand du récent Charlie et la chocolaterie et surtout à une habitude toute burtonnienne d'attacher LE personnage burtonnien à un lieu reflétant parfaitement son univers mental : les recoins les plus sombres de l'imagination dans Vincent, le château dans Edward aux Mains d'argent, la maison farfelue dans Pee Wee Big Adventure, le cimetière dans L'étrange Noël de Monsieur Jack

Alors que Batman devient un personnage quasi-transparent (il fallait oser, Burton l'a fait !), le réalisateur se concentre sur ses deux bad guy, avant tout monstrueux, mais aussi humains. Si le Pingouin se révèle être tout le long du film un être repoussant, sadique, sale et difforme, il se montre également comme un Freak tout simplement rejeté de la société, cherchant une certaine reconnaissance, et pourquoi pas une véritable identité.

Quand à Selina Kyle / Catwoman, elle se montre comme une version féminine de Batman et bien plus bad. Semant l'ambiguïté, Catwoman est le résultat de la fulgurante transformation d'un esprit inexistant et frustré, celui de la pauvre Selina Kyle: secrétaire timide malmenée par une vie glauque et sans joie, Selina se fera malheureusement défenestrer par son patron Max Shreck (costume qu'endosse Christopher Walken, très à l'aise en véritable magouilleur / manipulateur, empruntant pour son personnage le nom de l'acteur ayant incarné Nosferatu) après avoir malencontreusement fouiné dans les affaires de celui-ci.

En quelques instants de folie furieuse, Burton ressuscite la fragile Selina pour aboutir à une douloureuse naissance. Un esprit tortueux et dérangé naît en quelques instants sous nos yeux, grâce au jeu tétanisant de Michelle Pfeiffer, qui ne retrouvera jamais un rôle aussi puissant. Séduite dans sa vie de nouvelle femme par Bruce Wayne, elle se jette dans une liaison dangereuse avec Batman, aux accents SM, lorsqu'elle redevient une implacable féline (hallucinante scène du saccage et de l'explosion du supermarché). Griffes, fouets, cuir : entre fantasme et folie, Burton croque sur pellicule une femme chat sensuelle et inoubliable, maniant un érotisme magnétique et inattendu, et n'oubliant pas au passage quelques sous-entendus bienvenus. Mais au final, les méchants et les gentils vus par Burton dans cette suite, sont tout aussi faibles et délabrés (voire "usés") les uns que les autres.

Tim Burton esquisse la personnalité de ces trois animaux, qui ne peuvent s'entendre car radicalement et définitivement différents (voire incompatibles) dans leur nature (vous verrez vous, un pingouin, un chat et une chauve-souris traîner ensemble ?) Batman le Défi refuse sèchement sa transformation en pur produit pop-corn: à la manière de Edward aux Mains d'argent, il fait surgir une cruauté et une violence inattendues (l'explosion d'émotion finale est à couper le souffle) et cultive une ambiguïté extrême.

Et même au-delà des trois personnages cités, Burton soigne son esthétisme jusque dans des plans affolants de beauté, fait preuve évidemment d'une inventivité visuelle sans précédent (la présentation des parapluies gadgets, le canard géant surgissant dans la salle de bal, Catwoman surgissant devant le néon Hell here…) et fait preuve d'une très grande habilité à manier la caméra.

Nettement plus sombre que le premier volet, que ce soit d'ordre esthétique ou scénaristique, Batman le Défi ne s'autorise que rarement à l'utilisation de la lumière du jour (voir lumière tout court), et préfère s'afficher comme une œuvre blafarde et pessimiste. Un Batman dépassé, un Pingouin qui ne trouvera jamais sa place parmi les hommes (tout comme Edward, Pee Wee, Beetlejuice, Ed Wood…) car trop différent et une Catwoman rongée par le bien et le mal. Dans un monde éclairé entre la noirceur de l'encre et la pâleur d'un fantôme, Burton se montre plus anticonformiste que jamais avec ce chef-d'œuvre certes bien loin du Batman originel, mais bel et bien au cœur de l'univers Burtonnien.




Jérémie MARCHETTI

BATMAN (1989)

 

Titre français : Batman
Titre original : Batman
Réalisateur : Tim Burton
Scénariste :  Sam Hamm, Warren Skaaren
Musique : Danny Elfman
Année : 1989
Pays : Usa, Angleterre
Genre : Super-héros
Interdiction : /
Avec : Michael Keaton, Jack Nicholson, Kim Basinger, Pat Hingle, Robert Whul...


L'HISTOIRE : Le jeune Bruce Wayne a vu ses parents abattus par des malfrats. Devenu l'un des homme les plus riches de Gotham City, il a décidé de livrer combat contre le crime en revêtant un costume de chauve-souris et en se faisant appeler Batman. Pendant un affrontement dans une usine, Batman, par accident, fait tomber dans un cuve d'acide Jack Napier, un dangereux gangster. Malheureusement pour lui, Napier n'a pas trouvé la mort. Son visage est devenu totalement blanc, ses cheveux sont verts et sa bouche garde la forme d'un grand sourire. Napier décide de jouer de son apparence et se fait alors baptiser Le Joker. Gotham City va alors subir la vengeance du Joker, bien décidé à avoir la peau de Batman...


MON AVISBatman ! Un nom connu de tous ! Apparu en 1939 sous forme de comics, dû au talentueux Bob Kane, son créateur, mais également à Bill Finger, qui eut l'idée du costume gris en forme de chauve-souris après avoir regardé le film The Bat Whispers. Au départ, Batman agissait pour lui-même puis, la censure regardant de plus près ce comics, Bob Kane le fit agir pour la police. Batman est un milliardaire nommé Bruce Wayne, qui a vu ses parents se faire tuer quand il était petit. Un soir, une horde de chauve-souris pénètre dans son manoir et il germa dans son esprit cette idée de s'habiller en chauve-souris et de combattre le crime pour honorer la mémoire de ses parents. Avec l'aide de sa fortune et de son majordome Alfred, il transforme la cave du manoir en quartier général, se construit de multiples véhicules et gadgets pour l'aider à lutter contre le crime qui règne à Gotham City...

Les adaptations cinématographiques du comics, au succès monstrueux, virent bientôt le jour. En 1943, Lambert Hyllier réalise le sérial en 15 chapitres The Batman puis le justicier ailé devient la star du petit écran en 1966 avec une série télé haute en couleurs et en onomatopées où il partageait la vedette avec Robin. Succès oblige, cette série devient un film, toujours réalisé en 66, sommet du kitsch à l'écran. En 1989, Tim Burton décida de livrer sa version de Batman. Il engage Michael Keaton pour jouer le double rôle du milliardaire justicier, et surtout, Jack Nicholson dans le rôle culte du Joker !

Tim Burton a un univers qui lui est propre. Son Batman n'est pas encore un reflet de cet univers. Il faudra attendre sa seconde adaptation, Batman le défi pour en avoir un réel aperçu. Mais ce premier Batman n'en est pas moins jubilatoire et propose quelques scènes grandioses et images sublimes. 

Burton a avant tout choisi de faire un film familial et grand spectacle. Exit donc la face sombre de Batman, et son comportement limite schizophrène (bien que très légèrement exprimé). Ici, c'est à un super-héros qu'on a droit, défenseur de la veuve et de l'orphelin. Michael Keaton s'en sort plutôt bien dans le rôle de Bruce Wayne / Batman. Il lui manque peut-être un petit peu de classe mais rien de bien grave. Il est excellent par contre sous son costume de justicier. Kim Basinger fait figure de potiche et n'apporte pas grand chose au film, si ce n'est de se faire enlever par le Joker et de devoir être secourue par Batman. Jack Nicholson est par contre irrésistible en Joker. Il cabotine, en fait des tonnes, et provoque la jubilation du spectateur ! Plus que Batman, c'est bien lui la star du film, même s'il n'atteint pas la noirceur et la folie du Joker de la bande-dessinée d'Alan Moore Souriez. La dualité entre les deux personnages est néanmoins respectée, chacun représentant le bien et le mal de l'autre. Autant Batman est sérieux, autant le Joker est exubérant. Autant Batman est sombre, autant le Joker est coloré. Quand le Joker dit c'est toi qui m'a fait, Batman, celui-ci lui répond non, c'est toi qui m'a fait.

Grand spectacle oblige, Burton nous concocte des enchaînements de séquences éclatants. Le costume du héros est parfait et très crédible. Comme James Bond, Batman dispose de nombreux gadgets bien utiles et de divers véhicules, que tous les fans attendent au tournant. La vision de la Batmobile fait mouche, superbe voiture en forme de chauve-souris, d'un noir étincelant. Ma séquence préférée est sans conteste celle où Batman utilise son avion en forme de chauve-souris également, et où celui-ci vient se positionner devant la lune pour former le logo de Batman. C'est carrément superbe et on applaudit bien fort monsieur Burton pour ses superbes images. Le film est donc bien rythmé et l'action est au rendez-vous. La séquence finale sur la cathédrale est également fort bien réalisée, et nous rappelle le final de Sueurs froides d'Hitchcock. L'humour est très présent, grâce au Joker évidemment, et à ses répliques qui tuent. Sacré Nicholson ! C'était vraiment un rôle parfait pour lui !

Énorme succès aux Etats-Unis, mitigé en France (comme d'habitude), ce Batman est donc un divertissement de haute qualité, qui réjouira petits et grands. Mais le vrai fan de Batman ne se contentera pas de ce film et préférera revoir de Tim Burton son Batman le défi, oeuvre quasi parfaite, sombre, empreinte de folie, gothique, et qui fait vraiment honneur à l'homme chauve-souris. Les deux suites de Joel Schumacher seront un retour au grand spectacle, fort décrié par les fans. Mais le Batman Begins qui va prochainement débarquer risque fort de remettre les pendules à l'heure et de nous présenter un Batman des plus sombres ! Patience donc...




Stéphane ERBISTI

ALICE AU PAYS DES MERVEILLES (2010)


Titre français : Alice au Pays des Merveilles
Titre original : Alice in Wonderland
Réalisateur : Tim Burton
Scénariste Linda Woolverton
Musique : Danny Elfman
Année : 2010
Pays : Usa
Genre : Conte fantastique
Interdiction : /
Avec Mia Wasikowska, Johnny Depp, Anne Hathaway, Helena Bonham Carter...


L'HISTOIRE Depuis sa tendre enfance, Alice voit son sommeil agité par le pays des merveilles. Chimère ou réalité, voilà son fardeau. Maintenant âgée d'une vingtaine de printemps, la jeune fille est forcée par sa famille à accepter une demande en mariage. Confuse, la blondinette s'enfuit et tombe à nouveau dans le légendaire terrier...


MON AVISIl n'a jamais été aisé de retranscrire toute la démesure de l'oeuvre de Lewis Carroll et pourtant cette chère Alice s'est vue parachutée sur le grand tout comme le petit écran durant des années, alimentant plus d'un esprit surréaliste. De l'adaptation littérale à la transposition métamorphosée, voire pervertie, il n'y a eu qu'un pas, avec des titres comme Valerie au Pays des Merveilles, Morgane et ses Nymphes, Alice ou Dreamchild. Le pays des merveilles n'a pas encore livré tous ses secrets semble t-il...

Plus self-conscious que jamais (et le voir annoncer une adaptation de La Famille Addams ne fait que confirmer cet état de fait), Tim Burton s'en va jeter son dévolu sur l'héroïne de Lewis Caroll, accueilli alors à bras ouvert par les studios Disney, ceux là même qui l'avaient jeté quelques décennies auparavant pour ses débordements de sale gosse dépressif. Quelle ironie. C'est donc un Burton apaisé, conscient et accepté qui prend les rennes du projet : son Sweeney Todd avait pourtant confirmé qu'une petite flamme brûlait toujours, malgré des scories évidents : son audace brusque et sanguinolente l'avait miraculeusement élevé.

Malin malgré tout, le petit génie de Burbank n'adapte ni Alice au pays des merveilles ni sa suite A travers le miroir mais offre une nouvelle aventure à Alice, dont l'esprit perturbé a pourtant annihilé tout voyage onirique (ou pas). Une méthode qui avait fait ses preuves auparavant avec Hook , où Peter Pan, devenu adulte, foulait à nouveau les terres du pays imaginaire, ou Retour à Oz, qui emmenait la petite Dorothy sur un chemin de briques jaunes en ruine.

Incomprise, solitaire, en bonne héroïne burtonniene, Alice s'évade de la société victorienne débordante d'hypocrisie et retrouve malgré elle le chemin des flacons magiques et de l'heure du thé. Au milieu de ce capharnaüm animal, elle est chargée de mettre à fin à la bataille opposant la Reine Blanche à la Reine de Cœur en tuant le Jabberwock, dragon hybride et accessoirement chouchou de la méchante reine.

Tout ce beau monde prend joliment vie en live avouons-le, plutôt aidée par une 3D très en forme (lances crevant l'écran, vol de tasse, chute vertigineuse, profondeur de champ incroyable et palais gigantesques) et animé par un casting énergique mais formellement pas toujours convaincant : on plussoie donc un Chat de Cheshire onctueux, un lièvre de Mars hilarant ou une Helena Bonham Carter fracassante, et moins une Alice un peu indolore (c'est sans doute le but avoué me soufflera t-on, puisqu'elle n'est que candeur et innocence), un Crispin Glover un poil décevant, une chenille irrésistible (Alan Rickman !) mais globalement inutile et un Johnny Depp peu à peu usé par son image de bouffon de pellicule. Toute l'angoisse absurde et l'ambiguïté de la première monture de Disney s'efface - sauf peut-être le temps d'une idée, celle, hallucinante, de la rivière de têtes tranchées - au profit d'un manichéisme prudent, qui oublie par là même l'aspect insaisissable de Wonderland et des diverses représentations visuelles qu'on a pu lui donner. L'ampleur du score d'Elfman est cependant, plus qu'appréciable.

Spectacle grand public ou pas, les tenants et aboutissants du récit s'essoufflent rapidement (combattre ce satané dragon - doublé par Sir Christopher Lee - et discerner la réalité du rêve) face à un déroulement agréable mais convenu. La ballade onirique laisse place d'ailleurs à l'Héroic Fantasy, donnant au film des airs de Monde de Narnia bis plutôt inattendu, en bien comme en mal. Mais en ces temps de revival fantasy où l'on croise des œuvres aussi surprenantes que Le secret de Terabitia, Harry Potter et le prisonnier d'Azkaban, The Fall ou Les Désastreuses Aventures des Orphelins Baudelaire, ce Burton là semble arriver curieusement trop tard...




Jérémie MARCHETTI