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LES AVENTURES DE JACK BURTON DANS LES GRIFFES DU MANDARIN (1986)

 

Titre français : Les Aventures de Jack Burton dans les Griffes du Mandarin 
Titre original : Big Trouble in Little China
Réalisateur : John Carpenter
Scénariste : Gary Goldman, David Z. Weinstein, W.D. Richter
Musique : Alan Howarth, John Carpenter
Année : 1986
Pays : Usa
Genre : Aventure fantastique
Interdiction : /
Avec : Kurt Russell, Kim Cattrall, Dennis Dun, James Hong, Victor Wong, Kate Burton...


L'HISTOIRE : Jack Burton, camionneur ordinaire, accompagne son ami Wang Chi à l'aéroport de San Francisco afin d'accueillir Miao Yin, la fiancée de ce dernier. Mais lorsque Lo Pan, un puissant sorcier désincarné, se met en tête d'épouser Miao Yin pour récupérer son enveloppe charnelle, Jack se voit transporté au cœur des luttes mystiques de Chinatown, où le Bien et le Mal s'affrontent déjà depuis des siècles...


MON AVIS Suivant les traces de 1941 et des Aventures de Buckaroo Banzaï, Les aventures de Jack Burton dans les Griffes du Mandarin fait partie de ces rares films d'aventures qui, avec un plaisir très communicatif, partent joyeusement dans tous les sens, et donnent largement à manger et à boire pour tout le monde. Ni familial, ni trop adulte, le film de John Carpenter trouve un équilibre parfait, et prend rapidement les allures d'un cocktail aussi coloré qu'exquis. Étrangement, le public rejette souvent au premier abord ce coté ravageur, comme l'attestera l'échec cinglant et injustifié du film.

Traumatisé par Zu les Guerriers de la Montagne Magique, John Carpenter décide d'offrir à son public ce qu'il a réellement ressenti en découvrant le film de Tsui Hark, avec un zeste de sauce américaine : des effets spéciaux, des combats, des idées, des trouvailles, du fun. Et il le réussit absolument avec ce petit chef-d'œuvre, qui se viandera malheureusement auprès du public, tout comme The Thing, Christine ou encore Starman. Bien compliqué le public !

Entre les envolées spectaculaires du cinéma hongkongais et les exubérances souvent superbes du cinéma japonais, Carpenter compte bel et bien rendre hommage aux grands films du genre asiatique. Il dresse fièrement son héros, Jack Burton, incarné par son acteur quasi-fétiche : Kurt RussellCharismatique et direct dans New York 1997, sobre dans The Thing, Kurt Russell devient ici un héros caricatural à souhait, tordant certes, mais qu'on pourrait qualifier tout simplement de anti-Indiana Jones. Il ne comprend rien, se débrouille rarement bien dans les combats, traite les femmes aussi bien que certains héros à la John Wayne, conduit un bon gros camion, et se laisse aller souvent à une certaine maladresse, voire le morceau de mur qui lui tombe sur la tête lorsqu'il tire en l'air ! Carpenter se refuse au cliché du bouffon de service, car c'est au contraire le bras droit du héros qui connaît tout et accessoirement mène presque tous les combats ! Preuve que Jack est un personnage totalement décalé par rapport à l'univers qui l'entoure, on remarquera un tee-shirt à l'allure assez japonaise, affichant pourtant un personnage très proche physiquement du bad guy !

Ce bon vieux Jack est un routier passant souvent à San Francisco pour faire un petit tour au Chinatown du coin, histoire de revoir son ami Wang. Celui-ci attend impatiemment sa fiancée, qu'il va récupérer à l'aéroport avec la complicité de Jack. Pas de bol, un groupe de punks nommé les seigneurs de la mort capture la jeune fille pour l'emmener dans une maison close. Bloqués dans une ruelle, Wang et Jack assistent à un combat de gang rapidement incontrôlable et à l'apparition surprise d'un spectre, dénommé Lo Pan. Pour délivrer Miao yin, la bien-aimée de Wang, les deux amis devront s'allier avec Gracie et Margo, deux petites fouineuses de première, le sage Egg Shen ainsi qu'avec le sympathique beau parleur Eddy Lee. La poisse semble toujours de mise puisque Miao Yin est à nouveau capturée, cette fois par un guerrier aux pouvoirs… électrisants ! Ce serait le mystérieux Lo Pan qui détiendrait la jeune fille, un fantôme âgé de 2000 ans cherchant à retrouver une véritable forme humaine (il ne reste qu'une enveloppe surnaturelle). Par ce bad guy fantomatique et inhabituel, Carpenter glisse un beau clin d'œil au fameux Fu-Manchu, qui fut incarné auparavant par Boris Karloff et Christopher Lee.

L'antre de Lo Pan fourmille de surprises et de pièges inattendus, allant des simples combattants, à des guerriers maléfiques voire des créatures surnaturelles. Big John brosse un tableau fascinant de Chinatown, avec ses ruelles sombres et pluvieuses, ses massacres entre gangs (on retrouve la guerre des couleurs déjà présente dans "Zu les Guerriers de la Montagne Magique), ses traditions et ses légendes qu'on continue d'entendre discrètement où pouvoirs, fantômes et religions s'entremêlent.

Parmi le bestiaire magique du film, Carpenter prend son inspiration dans Baby Cart 2 - l'enfant massacre pour l'élaboration des fameux guerriers de la morts, un trio de magiciens sanguinaires qui ne rigole décidément pas lorsqu'ils sont en face d'une potentielle victime. Non seulement Carpenter trouve parfaitement les tronches pour incarner les trois vilains, mais il les affuble de pouvoirs sensationnels comme le contrôle de l'électricité pour l'un, une force surhumaine pour l'autre, et un contrôle parfait des armes pour le dernier. Un monstre poilu assez collant (hommage au démon de Rendez-vous avec la peur ?), une caméra humaine (oui et il faut le voir pour le croire) et un insecte géant complètent le tableau de manière admirable, histoire de montrer qu'il n'y a pas que les humains qui s'imposent.

Carpenter soigne ses décors, et témoigne d'un soin plastique kitch parfois irrésistible comme la salle du sacrifice, gavée de couleurs fluos et de statues gigantesques. Les années ont beau passer, les FX n'ont pris aucune ride (les très beaux éclairs factices sont un délice pour les yeux), faisant la nique sans réserve aux images de synthèses actuelles. Carpenter louche vers la poésie au détour de certains dialogues, vers le mystère ou le fantastique pur et dur, une sorte d'aura mystique et fantasmagorique que caractérisent plutôt bien certains passages (sublimes) de la bande sonore.

Aventures oblige, Big John enchaîne sans problème les péripéties (la plongée accidentelle dans le bassin à macchabées en fera frissonner plus d'un et prouve que Carpenter sait si bien maîtriser l'horreur), les combats (monstrueux et drôlement bien réglés) et les gags (difficile de ne pas sourire face à la crétinerie de ce pauvre Jack), pour aboutir à une certaine idée du bonheur. Qu'est-ce qu'on pourrait reprocher au film ? Personnellement, rien, sauf de nous faire jubiler du début jusqu'à la fin, et ça heureusement c'est loin d'être une tare.




Jérémie MARCHETTI

ASSAUT (1976)

 

Titre français : Assaut
Titre original : Assaut on Precinct 13
Réalisateur : John Carpenter
Scénariste : John Carpenter
Musique : John Carpenter
Année : 1976
Pays : Usa
Genre : Thriller
Interdiction : -12 ans
Avec : Austin Stoker, Darwin Joston, Laurie Zimmer, Charles Cyphers...


L'HISTOIRE : Après s'être vengé du meurtre de sa petite fille en tuant un des membres du gang de Los Angeles, un homme se réfugie dans un commissariat en cours de fermeture. Le gang y monte le siège afin de le capturer. Une poignée de personne va tenter d'y survivre...


MON AVISWestern urbain, hommage au cinéma d'Howard Hawks (Rio Bravo bien sûr), John Carpenter démontre déjà une maîtrise parfaite de l'espace, des personnages et de la tension psychologique avec Assaut, réalisé en 1976.

Premier film professionnel du réalisateur après avoir bricolé Dark Star durant son cursus universitaire, Assaut est une oeuvre personnelle et un objet difficilement cernable même aujourd'hui. Oui, difficilement cernable car il est bien compliqué de savoir ce qu'est ce film. Un western transposé en plein Los Angeles ? Évident. Un film d'action exploitation comme il en fleurissait beaucoup à cette époque ? Aussi. Un drame, un thriller, un film de gangs ? Oui aussi et beaucoup d'autres choses encore.

Lent certes - difficile de faire moins rapide pour un film qui se prétend d'action - mais d'une lenteur toute calculée. Silencieux (même les coups de feu du gang se font avec des pistolets munis de silencieux justement) mais rythmé par une bande-son qui distille par petites touches de synthé une atmosphère oppressante dans le vide des décors de ce commissariat qui n'en est presque plus un.

Épuré dans le style de mise en scène, dans les plans, dans les dialogues, dans le jeu des personnages, tellement épuré d'ailleurs que l'on pourrait presque passer à côté de la subtile efficacité avec laquelle Carpenter donne corps et âmes à ses personnages.

La réalisation est un modèle d'efficacité et de classe, avec très peu de mouvements de caméra, le réalisateur faisant le pari de la sobriété. Le montage, en particulier celui des fusillades, est une merveille du genre, avec, pour point d'orgue la première scène où l'on voit les murs du commissariat voler en éclat sans un seul bruit de détonation, séquence qui est d'une grande précision et reste imprimée sur la rétine pour longtemps.

Si l'histoire est basique, l'attaque d'un commissariat par un gang afin de se venger d'un homme venu y trouver refuge, c'est dans sa connaissance et son amour de tout un pan du cinéma qu'il y puise son inspiration et sa technique.

Tout ici fait irrésistiblement penser au western d'Howard Hawks et donc en particulier à Rio Bravo, non seulement pour l'histoire en elle-même, mais également dans le traitement de l'action et des personnages, un remake inavoué en somme. On peut également citer comme source d'inspiration La Rivière Rouge ou Rio Lobo. Le gang est silencieux comme peuvent l'être les indiens, les chefs mélangent leurs sangs pour sceller une alliance, les armes sont silencieuses comme celles des flèches Peaux-Rouges, ils se livrent à des rituels codés : le drapeau annonçant le siège déposé devant le commissariat...

La manière brutale de filmer les scènes d'action et l'outrance d'au moins l'une d'elles (le meurtre rapide et gratuit de la petite fille au travers d'un cornet de glace est d'une violence sans nom même encore de nos jours) inscrivent le cinéaste dans la lignée d'un Sam Peckinpah.

Enfin, la manière de filmer les attaques du gang ainsi que l'utilisation d'un héros noir renvoie directement à La Nuit des Morts Vivants de George A. Romero.

Et puis Carpenter n'oublie jamais l'aspect humain de sa poignée de personnages en réussissant sur un canevas de figure type et aux limites du clichés à leur donner profondeur, héroïsme, à en faire des humains minés par leurs contradictions tout simplement et ceci avec une économie de dialogues déroutante.

La recette idéale pour faire un grand film avec un petit budget et une période de tournage ultracourte est ici : un film fait par un cinéphile, pour les cinéphiles et qui, par conséquent, ne plaira pas à tout le monde. Une oeuvre simple, très simple, tellement simple qu'elle en devient culte et dont s'inspireront un nombre incalculable de cinéastes.




Lionel JACQUET

L'ANTRE DE LA FOLIE (1994)

 

Titre français : L'Antre de la Folie
Titre original : In the Mouth of Madness
Réalisateur : John Carpenter
Scénariste : Michel De Luca
Musique : John Carpenter
Année : 1994
Pays : Usa
Genre : Diable et démons
Interdiction : -12 ans
Avec : Sam Neill, Julie Carmen, David Warner, John Glover, Charlton Heston...


L'HISTOIRE : Venant d'être interné dans un asile psychiatrique, le détective John Trent raconte sa terrifiante histoire au Dr Wrenn : ayant pour mission de retrouver l'écrivain Sutter Cane, spécialisé dans l'horreur, Trent se rend dans une ville ne figurant sur aucune carte, et qui n'a pas lieu d'exister excepté dans les livres de Cane, Hobb's End. Une ville malfaisante et maléfique, qui cache bien des secrets…


MON AVISDésireux de réveiller le cinéma fantastique, qui devenait un genre moribond dans les années 90, John Carpenter signe avec L'antre de la Folie un film qui a justement pour but de secouer le genre. Une tâche qui n'est pas facile, et que beaucoup finirent par ignorer, préférant se jeter sur Scream, qui sera finalement le nouveau et décevant réveil du fantastique. Carpenter met le paquet avec L'antre de la Folie, autant au niveau de l'écriture (pourtant signé Michel De Luca, qui avait commis le scénario de l'infâme La fin de Freddy : L'ultime cauchemar) que de la forme visuelle (KNB peaufine les très nombreuses créatures du film, et avec bonheur).

Sam Neill, qui avait déjà endossé le costume de Damien dans La Malédiction Finale, d'un mari trompé dans Possession et d'un sympathique anthropologue dans Jurassic Park, revient donc au genre fantastique, et trouve encore une fois un rôle à la hauteur de son talent. Ce n'est, par contre, pas sa première collaboration avec Carpenter, puisqu'il incarnait le bad guy du film Les Aventures d'un Homme Invisible, une autre pause du Big John dans sa carrière de spécialiste du fantastique et de l'horreur. 

Dès la première partie du film, on peut voir défiler sous nos yeux d'autres acteurs réputés dans le genre, comme David Warner, John Glover, Julie Carmen (la séduisante vampire de Vampire vous avez dit vampire 2) ou Charlton Heston. Bien plus tard, on pourra apercevoir longuement Jürgen Prochnow ou le très inquiétant Wilhelm Von Homburg, qui fut en 1989, le sorcier dégénéré de Sos fantômes 2 mais qui vient malheureusement de nous quitter en 2004 d'un cancer, malgré une carrière peu remplie. Un acteur qui, pourtant, avait tous les atouts pour devenir une icône du genre. Carpenter n'y va surtout pas de main morte avec son film, clouant le spectateur sur son siège rien que dans la spectaculaire bande-annonce, et affirmant clore avec ce film, sa trilogie de l'apocalypse, débutée par The thing et Prince des Ténèbres". Des films forts, qui jouent à fond la carte des débordements visuels, et qui font peur, très peur même, et qui restent sans aucun doute, les meilleurs films du maître à ce jour.

D'une structure narrative au départ classique, L'antre de la Folie nous plonge petit à petit dans un univers de plus en plus effrayant, cauchemardesque, grouillant de monstres et zombies en tout genre. Un univers où le spectateur devient aussi fou que le héros, jusqu'à l'inattendu et surprenant coup de théâtre final. Nom emprunté à la station de métro où échoue un extraterrestre dans Les monstres de l'espace, Hobb's End est ainsi une ville imaginaire, créée de toutes pièces par Sutter Cane, un écrivain très en vogue dont le succès phénoménal rappelle beaucoup Stephen King (celui-ci serait d'ailleurs surclassé par Sutter Cane, comme l'explique Linda dans le film !) mais dont les effets sont plutôt catastrophiques. Détective travaillant pour une compagnie d'assurances, John Trent va être saisi de cauchemars et visions, le jour où il commence à lire quelques livres du maître en question. En construisant une carte à partir des couvertures (superbes d'ailleurs, guettez-les bien) des fameux livres, Trent découvre l'emplacement de la ville quasi imaginaire de Hobb's End. Accompagné par une lectrice fervente de Cane, Linda Styles, Trent s'embarque dans une aventure qui va le mener jusqu'au bout de la folie.

Outre les flashs horrifiques, pour la plupart subliminaux, c'est l'arrivée à Hobb's End qui permet à Carpenter de lâcher sur ses spectateurs une flopée de monstres impressionnants, un bestiaire lovecraftien comme on n'en a jamais vu auparavant, passant des gamins morts-vivants aux habitants zombifiés (rappelant beaucoup les clochards de Prince des Ténèbres), jusqu'à des dobermans enragés ou une mémé tentaculaire. Mais les apparitions ou manifestations surnaturelles sont tellement nombreuses et surprenantes, qu'on ne peut toutes les divulguer ici. 

Carpenter ose filmer avec un talent considérable, et surtout enfin convenablement, l'indicible cher à Lovecraft, lié constamment à une atmosphère oppressante et soignée, et des créatures monstrueuses qu'on ne saurait pas réellement décrire. Les clins d'œil se multiplient jusque dans le titre original, In the Mouth of Madness très lovecraftien dans l'esprit. Horrifique jusqu'au bout des ongles, ironique parfois, flippant et vertigineux, voilà une mise en abyme stupéfiante, un régal pour les fans d'horreur et un autre chef-d'œuvre pour Big John.




Jérémie MARCHETTI