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BLACK SWAN (2010)



L'HISTOIRE :Danseuse au New York Ballet, Nina Meyers tient la chance de sa vie lorsque le casting pour une représentation du Lac des Cygnes ouvre ses portes. Pourtant, ses essais ne renversent pas Thomas Leroy, le metteur en scène du ballet : celui-ci choisit de faire incarner le cygne blanc et le cygne noir de l'histoire par la même personne, obligeant la danseuse visée à livrer une performance bien plus complexe. Nina obtient pourtant le rôle le jour où Thomas perçoit une rage insoupçonnée chez elle ; mais la jeune fille voit très vite sa vie se métamorphoser dès les premières répétitions...


MON AVIS : Pas de doute, Aronofsky est devenu définitivement un auteur hype, ses objets filmiques entraînant à la fois flops et engouements sur leurs passages : du paradoxe, et du bruit, beaucoup de bruit, comme on peut le constater à la suite de la sortie de Black Swan dont le passage sur grand écran laisse une traînée de plumes noires étincelantes. Vu l'antécédent surestimé et pompeux qui le précède, l'effet Aronofsky titille malgré tout la curiosité.

Ce dont l'on parle le plus, outre la performance de Natalie Portman, c'est la cascade de références qui nourrissent, irriguent (voire desservent légèrement) le film : du cadre évoquant tour à tour Argento et Michael Powell, en passant par des allusions concrètes à De Palma (Phantom of the Paradise et Carrie au Bal du Diable, entre autres), du trouble schizophrène hérité de Perfect Blue et de Polanski à la danse d'introduction renvoyant à celle de Legend, jusqu'au souffre de Verhoeven et l'approche organique à la Cronenberg, on frôle parfois le quizz cinéphile. Plus rassurant : tous ses clins d'œil et ses références n'empêchent jamais au film d'avoir une âme propre, que certains rapporteront (décidément !) comme la rencontre entre le tourbillon Requiem for a Dream et le parcours déchu de The Wrestler.

Ce qui est le plus visible n'est pourtant pas le plus troublant : Jennifer Connely (curieux hasard) était frappée elle aussi d'une malédiction en jouant dans le ballet du Lac des Cygnes dans le méconnu (et très ennuyeux) Étoile de Peter Del Monte.

On imagine la danse comme glamour, Black Swan se l'approprie comme une torture gracieuse, une épopée extatique, et la décrit comme un milieu fermé et cruel (l'ex starlette incarnée – ironie ? - par Winona Ryder, s'enfonçant dans l'ombre). Le savoir-faire d'Aronofsky et son goût pour les mises en scènes viscérales (image proche du documentaire, caméra près des corps) sert à merveille ce parcours d'étoile martyr et de petite fille en décomposition ; de jouer avec la jeunesse quasi virginale de Natalie Portman était une idée à s'approprier, et une manière salvatrice de crever définitivement l'écran pour la jeune actrice.

Dans une toile cinématographique fan du twist à gogo, Black Swan suit sa voie et résume ses enjeux dans la légende même qui compose Le lac des cygnes : pour incarner le cygne noir et le cygne blanc, Nina devra aller loin, très loin, et même jusqu'à la mort pour épouser son personnage et voler de ses propres ailes (au sens figuré comme au propre, pour le coup...). La petite fille (chambre d'enfant, vie privée à néant, image de la mère omniprésente et envahissante) devra devenir femme, et bien plus encore. Il ne s'agit plus d'un simple rôle à accomplir ou de quelques entrechats, mais d'une quête absolue visant la perfection et la transcendance du corps et de l'âme.

Aronofsky joue sur les tableaux anxiogènes, de l'appartement hanté par le figure maternelle (une Barbara Hersey dont le lifting monstrueux la rend encore plus inquiétante) aux planches où l'on sue sang et eau, le tout supervisé par un Vincent Cassel un brin vicelard. Et il y a aussi Lily, la furieuse, la brûlante, la rivale... ou l'amie, que Nina perçoit aussi bien comme le danger que comme un fantasme. De cette fascination trouble pour la figure masculine (Thomas) et la figure féminine (Lily), Aronofsky gère habilement les rapprochements, les doutes et les tensions érotiques multiples.

On le savait capable de filmer la misère et la dégradation physique, il n'y a rien donc rien d'étonnant à ce que Black Swan fonctionne de ce côté là, filmant un chemin de croix avec tout ce qu'il faut de viscéral, de l'horreur au compte-goutte aux transformations physiques parfois digne de La Mouche. Le ballet final prend inévitablement à la gorge, de libération en apocalypse intérieur, jusqu'à un plan séquence qui commence déjà à hanter les esprits. Le tout très bien épaulé par un Clint Mansell au sommet, revitalisant une musique ultra rebattue. Une sacré symphonie pour une sacré expérience.


Titre français : Black Swan
Titre original : Black Swan
Réalisateur : Darren Aronofsky
Scénariste : Mark Heyman, Andres Heinz, John J. McLaughlin
Musique Clint Mansell
Année : 2010 / Pays : Usa
Genre : Drame horrifique / Interdiction : -12 ans
Avec : Natalie Portman, Mila Kunis, Vincent Cassel, Barbara Hershey, 
Winona Ryder, Benjamin Millepied...





Jérémie MARCHETTI

BEETLEJUICE (1988)

 

Titre français : Beetlejuice
Titre original : Beetlejuice
Réalisateur : Tim Burton
Scénariste : Michael McDowell, Warren Skaaren, Larry Wilson
Musique Danny Elfman
Année : 1988
Pays : Usa
Genre : Anticipation, comédie
Interdiction : /
Avec Michael Keaton, Alec Baldwin, Geena Davis, Jeffrey Jones, Winona Ryder...


L'HISTOIRE : Adam et Barbara forment un couple aussi charmant que gnan-gnan et mènent une vie d'un calme et d'une platitude rares. Lors d'une petite escapade en voiture, Adam manque d'écraser un chien et fait tomber la voiture dans une rivière, causant ainsi sa noyade mais aussi celle de son épouse. Le couple revient pourtant comme si de rien n'était dans sa demeure, prenant vite des allures de manoir hanté. Ils découvriront par la suite qu'ils sont devenus instantanément des fantômes, et sont à présent condamnés à hanter leur demeure! Pire encore, de nouveaux occupants débarquent avec un objectif bien précis : refaire la maison de fond en comble. C'en est trop pour les deux tourtereaux qui tentent de faire fuir cette drôle de famille, et par tous les moyens possibles, quitte à faire appelle à Beetlejuice...


MON AVISGros succès aux Etats-Unis mais énorme bide en Europe (et pour cause le personnage n'était connu que chez les ricains), Pee Wee Big Adventure aura du mal à faire connaître le talent du grand Tim Burton au public européen, et il faudra attendre son film suivant pour que son univers se fasse remarquer de manière nettement plus importante aux yeux du public : Beetlejuice, qui possédera d'ailleurs un budget bien plus conséquent que celui de Pee Wee Big AdventureLe succès du film fut tel qu'une série animée du même titre débarquera sur les écrans en 1989. Légèrement édulcorée (le comportement obsédé et grossier de Beetlejuice a été adouci), elle reste toutefois intéressante visuellement parlant puisqu'elle puise son inspiration dans l'univers biscornu et macabre de Burton.

Véritable best of de son univers, Beetlejuice est sans doute la pièce maîtresse de la filmographie de Burton, qui infuse toute la folie, l'inventivité, et les habitudes qui lui sont dues en un seul long-métrage. On retrouve l'humour cartoonesque frôlant à plusieurs reprises le non-sensique hésitant entre comic-book survolté et Looney Tunes sous acide, les délires baroques, gothiques et macabres touchant autant les scènes fantastiques que les décors tortueux, des scènes d'émotions incroyablement touchantes, la musique de Danny Elfman, l'utilisation de la stop motion… Difficile d'échapper au film si on est fan de Tim.

En quelques secondes de générique, Burton frappe (déjà!) son film d'un éclair de génie : la caméra survole un village américain, et s'arrête au final sur une grande maison dominant les environs ; très vite l'aspect général des maisons et l'intrusion d'une araignée nous montre clairement que ce sont ni plus ni moins des maquettes! Pourtant cette maquette existe bien, et elle appartient aux Maitland, un couple à la perfection quasi-utopique, vivant dans ladite maison surplombant la petite ville. Tout y est lumineux, harmonieux, tout le monde y est heureux, et seul cette voisine rapidement collante vient mettre une ombre au tableau. Pour les besoins de leur maquette, le gentil couple devra faire un tour en ville, avant d'être bêtement victime d'un accident de voiture… mortel. Condamnés à hanter leur propre foyer, Adam et Barbara ne peuvent plus retrouver leur monde: une simple échappée de la maison se termine par une virée sur Saturne, planète de sable habitée par des vers géants très voraces !

Vendue par une amie trop fouineuse, la maison est rapidement achetée par une famille de New-Yorkais aussi envahissants que excentriques: la belle-mère est une sculptrice démente suivant les conseils d'un soi-disant spécialiste du paranormal, le père n'a rien à faire (!!) et la gamine est une petite gothique aussi morbide que silencieuse déboulant dans la maison en cercueil noir et tenue d'enterrement !

Rien de rose pour les Maitland, qui réalisent que les vivants ne peuvent les voir malgré leurs apparitions fort grotesques: visage arraché, décapitation, pendaison, déguisement classique de fantômes. L'occasion d'offrir la scène mémorable du placard (voire celle où Adam et Barbara ont bien du mal à faire sursauter la vilaine famille avec des vieux draps) où les nouveaux occupants ne semblent pas se soucier du spectacle affreux qui s'offre sous leur nez. C'est en découvrant un livre réservé uniquement aux morts, que les amoureux découvrent l'autre monde ainsi que l'existence d'un certain Beetlejuice, un mort vivant obscène et hystérique qui se considère comme un bio exorciste : il fait fuir les vivants. Faisant appel à ses services, Adam et Barbara s'en débarrassent aussitôt, sans savoir qu'il va longuement leur coller aux basques et pourquoi pas mettre un boxon monstre dans la maison.

Futur Batman chez le même Burton, Michael Keaton endosse un rôle à contre-emploi stupéfiant, jouant à la fois avec son maquillage lugubre et de multiples effets spéciaux le rendant méconnaissable, mais aussi avec un soupçon d'improvisation dans le comportement et les dialogues. L'occasion pour l'acteur trop cantonné dans les rôles de gentils de se défouler un maximum.

Même chose pour Winona Ryder, ici dans la peau de Lydia, adolescente révélant une nature parfois tourmentée (la tentative de suicide) mais se montrant nettement plus heureuse au contact du couple de fantômes, le couple rêvé qui lui fait oublier des parents snobs et ringards. La petite a beaucoup de répartie et son stock de dialogues atteint une certaine saveur (Je vis dans une grande, longue, grande et profonde chambre noire ou Vous êtes pleins de pus et pleins de veines, comme dans La nuit des morts vivants) jusqu'à cette libération finale, et en musique en plus !

Que ce soit le score de Danny Elfman ou les mélodies de Harry Belafonte, la musique joue un rôle primordial dans le film : Elfman nous sert sa bande sonore la plus tonitruante, la plus enjouée et la plus belle de toute sa carrière (avec celle de Edward aux Mains d'argent bien entendu) et dont le thème musical sera réutilisé à tort et à travers. Là où on s'y attend le moins, Beetlejuice prend des allures de comédie musicale lors d'une scène d'anthologie, pour ne pas dire culte : invitant de nombreux bourgeois et personnalités de la haute société, la belle mère de Lydia va voir son repas se transformer en piste de danse avec une possession générale des convives, les forçant à chanter et danser sur le fameux Day-O. On peut en mourir de rire ou juste esquisser un sourire au choix, mais la scène reste définitivement imparable. Rien que pour elle, on revoit Beetlejuice avec une grande délectation.

Véritable remède contre le blues ou la grise mine, Beetlejuice donne l'occasion à Burton d'étaler son univers dans quelques séquences se déroulant dans le monde des morts, créatures décharnées et burlesques qui possèdent encore les marques de leur décès : requin accroché à une jambe, squelette cramé, os de poulet traversant une gorge, employé de bureau raplapla comme une feuille de papier, pendu distribuant des photocopies, joueurs de rugby n'ayant toujours pas réalisé leur propre mort, et même un chasseur dont le crâne a été rétréci et la bouche cousue !

Très grand amateur d'animation image par image, Burton l'utilise habilement et fréquemment dans son film avec les vers géants, la transformation surréaliste de Adam et Barbara, et certaines animations d'objets comme cette porte béante ou ces sculptures douées de vie. Tim Burton bouillonne d'idées à chaque instant et nous en fait profiter pleinement jusqu'à ce dénouement bordélique et jouissif où l'infâme Beetlejuice laisse libre cours à son cabotinage et à ses mauvais tours. Si on est loin d'Argento, Burton fait néanmoins exploser les couleurs dans certaines parties du décor, en particulier lors de la scène finale ou celle se situant dans l'autre monde. Difficile de ne pas écarquiller les yeux face à ce BeetleSnake, à ce rébus animé, à la vision de la planète Saturne, à ces subites plongées dans les maquettes des Maitland, à la transformation de Beetlejuice en manège… 

L'univers de Burton est là et incontestablement là, il imprègne le film de toute part, reprend des éléments chers à Lewis Carroll, à la Hammer Films, aux bandes dessinées les plus folles, à Chuck Jones, à la peinture surréaliste… 

Un pur bonheur que ce jus de cafard.


Jérémie MARCHETTI

ALIEN : LA RÉSURRECTION (1997)

 

Titre français : Alien : La Résurrection
Titre original : Alien : Resurrection
Réalisateur : Jean-Pierre Jeunet
Scénariste Josh Whedon
Musique : John Frizzell, Jerry Goldsmith
Année : 1997
Pays : Usa
Genre : Extraterrestre, science-fiction
Interdiction : -12 ans
Avec Sigourney Weaver, Winona Ryder, Dominique Pinon, Ron Perlman, 
Brad Dourif, Leland Orser, Michael Wincott...


L'HISTOIRE 200 ans après sa mort, à partir d'un échantillon de sang récupéré sur la planète Fiorina 16, l'équipe militaro-scientifique de l'USM Auriga, vaisseau de recherche médicale croisant dans l'Union des Systèmes Planétaires, met à terme un clone du lieutenant Ellen Ripley. Sous la direction du Dr Vren, le Dr Gediman extrait le fœtus alien de sa cage thoracique, et ils décident de garder la jeune femme en vie. Suite à la culture ADN dont elle a fait l'objet, Ripley se révèle douée d'une force peu commune, ainsi que d'une sorte de liaison télépathique avec l'espèce alien, qui lui fait rapidement prendre conscience qu'un spécimen de reine s'apprêtant à pondre est élevé à bord du vaisseau. C'est à ce moment-là que le Betty, navette de commerce de Elgyn et de sa bande d'olibrius, accoste sur l'USM afin d'y livrer des sujets cryogénisés, dont ils ignorent qu'ils sont destinés à incuber les monstres…


MON AVISAprès l'apothéose de Alien 3, la saga semblait définitivement close. Pourtant, tandis que le projet d'un Alien vs Predator bouillonnait dans les marmites hollywoodiennes, les spéculations sur une possible résurrection d'Ellen Ripley ne tardèrent pas à mener bon train. Il allait falloir davantage qu'un bain de flammes pour abandonner un personnage féminin de cette envergure. Le crossover céda donc la place à la séquelle écrite par Joss Whedon (l'un des principaux scénaristes de la série TV Buffy contre les Vampires), et la chaise du réalisateur, après avoir accueilli un Danny Boyle de passage, reçut un hôte bien imprévu : Jean-Pierre Jeunet, réalisateur français dont la réussite esthétique et poétique de La Cité des Enfants Perdus (1995) avait obtenu une reconnaissance internationale.

Parmi les bagages que Jean-Pierre Jeunet eut l'autorisation de faire passer aux douanes se trouvait Pitof, dont on retrouve ici toute la palette esthétique, à la fois sombre, verdâtre et glacée. La répartition des tons et des lumières est d'ailleurs significative du propos du film, dont l'une des caractéristiques est de ramasser et de mettre en relief les thèmes abordés depuis le début de la saga. Ainsi l'opposition hommes/femmes, symbolisée par le nom de l'ordinateur central (Je suis le Père) et Ellen Ripley elle-même (Je suis la mère du monstre) est marquée par des variations de couleurs et d'éléments tranchées : d'un côté un univers mâle aseptisé, brillant, métallique et surexposé où les grimaces viriles ressortent avec agressivité, de l'autre sa corruption maternelle, abordée avec des précautions qui s’avéreront bien vaines : acide, lumières orangées, rouille, ténèbres et viscosités organiques propres à créer une atmosphère étouffante, angoissante et empesée, où les corps s'embourbent comme dans un cauchemar. La transition - et le salut – sera assurée par l'équipage du Betty : gouailleurs, bordéliques et débrouillards, les tons sombres et sales qui entourent les membres de l'équipe signalent à la fois une contestation et une familiarité avec les deux mondes précédents, qui leur permettra d'y échapper.

On peut se demander pourquoi le scénario de Joss Whedon rebrasse tant d'éléments précédents : les œufs pondus dans le vaisseau et l'équipage militaire (Aliens le Retour), les marginaux (Alien 3), l'équipier se révélant être un robot (Alien le Huitième Passager)… Chacun d'entre eux subit bien entendu une modification significative, voire une inversion totale, mais reste clairement identifiable. Par exemple, le personnage incarné par Winona Ryder, Call, succède au Ash interprété par Ian Holm et au Bishop interprété par Lance Henriksen, mais est cette fois un robot lui-même crée par des robots, cherchant à détruire la race alien et manifestant une humanité excessive. S'agissait-il donc de multiplier les signes de fidélités envers un public de fans inquiets (mais dans ce cas l'esprit de conservatisme signe de toute façon l'arrêt de mort de la série), de borner étroitement la marge d'invention du réalisateur (on sait qu'elle était faible, ce qui décida Marc Caro à ne pas accompagner Jeunet dans son périple hollywoodien), ou de compenser par des références solides les inventions majeures de cette Résurrection ?

Débutant sur un rythme ample et fielleux magnifié par la musique de John Frizzel, où la renaissance de Ellen Ripley s'accompagne d'une mise en place qui fait la part belle au caractère pittoresque des autres personnages, le film s'accélère à partir de la libération des aliens, enchaînant les unes après les autres les séquences d'épouvante et d'action. La bataille du gymnase, l'évacuation des militaires, la découverte d'un survivant (Leland Orser) parmi les cobayes ou la scène sous-marine, autant de morceaux menés tambour battant et recelant quelques beaux effets gore (les meilleurs se situant au niveau des têtes !), où l'on regrettera seulement quelques traits d'humour au feutre et des dialogues typiquement frenchies, c'est-à-dire bien trop écrits et manquant de naturel dans leur côté rebelle, humain et marrant…

Mais c'est lors des quelques pauses rythmiques que nous accorde Jeunet qu'ont lieu les séquences les plus marquantes et les plus originales du film, placé sous le signe de la manipulation génétique. La découverte par Ripley du laboratoire où sont conservés ses précédents clones atteint des sommets de terreur, d’écœurement et d'émotion, les images dégageant un faste macabre et lyrique peu commun. Enfin, la séquence la plus belle et la plus impressionnante demeure sans doute l'accouchement de la Reine, Ripley communiant avec une noire sensualités aux douleurs de la mère immense… qui accouche alors d'un nouveau-né au mixage blanchâtre et gluant, auprès duquel les spécimens d'aliens classiques ont l'air d'enfants de chœur ! Son alliage de monstruosité et d'humanité, de détresse et de violence, tétanise littéralement, et la scène finale hautement sadique traduira à merveille l'ambiguïté des positions de Ripley à l'égard des créatures qu'elle n'avait de cesse autrefois de combattre.

En somme, Jean-Pierre Jeunet a réussi à mettre en boîte un fabuleux volet qui ne dépare pas les précédents (et qui surpasse même celui de James Cameron), assumant au contraire avec brio le tournant décisif donné au personnage de Ripley en nous livrant un film d'horreur et d'action noir, poétique et malsain, exactement ce que l'on pouvait espérer en le voyant engagé par les studios hollywoodiens. Y aura-t-il une suite, ou bien l'inspiration s'est-elle tarie, n'accouchant plus que de crossover malingre ? L'avenir le dira.




Stéphane JOLIVET