Titre français : 2001 l'Odyssée de l'Espace
Titre original : 2001: A Space Odyssey
Réalisateur : Stanley Kubrick
Scénariste : Stanley Kubrick, Arthur C. Clarke
Musique : Richard Strauss, Johann Strauss fils, György Ligeti
Année : 1968
Pays : Angleterre, Usa
Genre : Science-fiction
Interdiction : /
Avec : Keir Dullea, Gary Lockwood, William Sylvester, Daniel Richter, Leonard Rossiter…
L'HISTOIRE : A l'aube de l'Humanité, dans le désert africain, une tribu de primates subit les assauts répétés d'une bande rivale, qui lui dispute un point d'eau. La découverte d'un monolithe noir inspire au chef des singes assiégés un geste inédit et décisif. Brandissant un os, il passe à l'attaque et massacre ses adversaires. Le premier instrument est né.
En 2001, quatre millions d'années plus tard, un vaisseau spatial évolue en orbite lunaire. A son bord, le Dr. Heywood Floyd enquête secrètement sur la découverte d'un monolithe noir qui émet d'étranges signaux vers Jupiter. Dix-huit mois plus tard, les astronautes David Bowman et Frank Poole font route vers Jupiter à bord du Discovery. Les deux hommes vaquent sereinement à leurs tâches quotidiennes sous le contrôle de HAL 9000, un ordinateur exceptionnel doué d'intelligence et de parole. Cependant, HAL, sans doute plus humain que ses maîtres, commence à donner des signes d'inquiétude : à quoi rime cette mission et que risque-t-on de découvrir sur Jupiter ?
MON AVIS : Des dizaines d'années après sa sortie, 2001 : l'Odyssée de l'Espace, reste une expérience sensitive hors du commun. D'un force, d'un beauté et d'une audace que le recul du temps rend encore plus prégnant. Éloge de la lenteur pour une symbiose parfaite entre l'image et la musique. Car peu de film ont eu autant d'échos et suscité autant de divergences d'approches. Livres, critiques, sites, avis, opinions, tout un flot de mots et de paroles s'entrechoquent pour décrire LA CHOSE. Pourtant, à y regarder de plus près, la structure narrative et le "message" que présente 2001 est globalement accessible sans avoir à se triturer le cerveau outre mesure. C'est plutôt dans la multiplication ébouriffante des détails et de l'interprétation personnelle que l'on peut en faire, que ce long métrage apparaît comme abstrait.
Structure en quatre parties (le début de l'humanité, mission Lune, mission Jupiter, Au-delà et l'infini), quatre apparitions du monolithe dans chacune des parties, quatre héros (singe, savant, ordinateur, foetus). Le tout étant toujours et constamment relié par les mêmes leitmotivs assurant la continuité et la permanence de l'être humain dans son désir d'évolution sous l’œil attentif de quelque chose, quelqu'un d'autre et de puissamment supérieur.
Une civilisation extraterrestre (proche de l'idée que l'on pourrait se faire de Dieu, omnipotent et omniscient, inaccessible aux capacités cognitives des pauvres terriens), représentée par le monolithe, permet à l'homme de démarrer véritablement son évolution en lui donnant la maîtrise de l'objet. Cependant pointent, déjà, deux légers problèmes qui vont être une constante chez l'homme : sa dépendance vis-à-vis des objets et sa capacité à la violence et aux meurtres (le primate utilisant rapidement sa nouvelle connaissance pour tuer ses congénères). Le monolithe par simple imposition des mains rend le singe-homme plus intelligent. On peut supposer (d'après les dialogues même du film) qu'à la même époque les E.T. enterrent un autre monolithe sur la lune. Une vigie, un guetteur, une sentinelle destinée à les prévenir dès lors que l'Homme aura atteint l'âge de l'ère spatial.
Après une expédition terrienne sur la Lune, le monolithe est découvert et jouant son rôle de gardien émet un puissant signal en direction des ET. (encore une fois cela est parfaitement clair dans le film, lorsque Bowman découvre, après avoir débrancher HAL l'ordinateur, un enregistrement dans lequel lui est révélé que le son émis par le monolithe lunaire était un message radio puissant en direction de Jupiter). On peut dès lors raisonnablement penser que la civilisation extraterrestres est donc là-bas.
Durant le voyage vers la cinquième planète en partant du soleil ( Jupiter pour ceux qui se serait déjà endormis.), le puissant ordinateur HAL semble développer des sentiments, une conscience de lui-même en tant qu'entité supérieur à l'Homme et de la même manière que ce dernier terrasse les espèces inférieurs depuis la nuit des temps dans un but de survie, HAL va vouloir en faire de même avec ces hommes bien trop faibles et futiles par rapport à lui.
L'Homme est dès lors dépassé par ses propres outils, symboles du fourvoiement et de l'impasse dans son évolution. Néanmoins il s'en sort par sa ruse et sa malice ancestrale.
Bowman en tant que représentant de l'humanité est alors accueilli par ces êtres dans une sorte de zoo humain, représenté par la chambre blanche ( endroit confortable et sécurisant par excellence) où après avoir contemplé les différents stades de sa vie future, on lui permet d'accéder à un nouveau stade de l'évolution. Fœtus astral destiné probablement à revenir sur sa planète d'origine porteur d'un nouvel espoir et d'un nouveau départ débarrassé de son addiction envers les outils et les machines.
Ainsi parlait Zarathoustra résonnant alors, renvoyant au mythe du surhomme Nietzschéen : Tu es le Premier et le Dernier, O Mazda, Toi, Père de la pensée bonne, Toi, le véritable instructeur de l'Ordre et de la Droiture, le Maître des manifestations de la Vie...
Voici, je vous enseigne le Surhomme. Le Surhomme est le sens de la terre. Que votre volonté dise : Que le Surhomme soit le sens de la terre.
D'ailleurs, dans une des rares sorties de Kubrick explicitant son film , il déclare : Un voyage intérieur et interstellaire... Plongé dans l'éternité, il passe de l'âge mur à la sénescence puis à la mort. Il renaît, sous la forme d'un être supérieur, un enfant étoile, un ange, un surhomme, si vous préférez, et revient sur terre, prêt pour le prochain bond en avant de la destiné évolutive de l'homme.
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Avant d'aller plus loin, il est étonnant de constater que même si l'anticipation effectuée à l'époque marque parfois de fondamentales erreurs, elle reste crédible à l'écran et ne retire en rien le plaisir que l'on peut éprouver à sa vision.
Kubrick voulait réellement faire le film le plus proche possible de ce que serait le futur dans l'espace. S'étant attaché les services de plus grands connaisseurs et spécialistes de son époque sur le plan de la connaissance scientifique, effectuant des recherches directement à la NASA. Il livre donc au travers des connaissances les plus pointues de son temps, les attentes et croyances de ce qui aurait pu être et marqué par l'optimisme de la communauté scientifique d'alors.
On peut s'amuser à noter que l'on est aujourd'hui très loin de la maîtrise de l'espace décrite dans 2001. Pas de voyages interplanétaires, pas de vaisseau spatiaux à anti-gravitation, pas de base sur le Lune, envoyer des astro/spatio/cosmo/sinonautes sur une autre planète relève toujours du rêve et de la science-fiction. Étonnant aussi de constater combien il était apparemment impossible d'envisager l'incroyable miniaturisation de la taille des ordinateurs, lors de la fameuse scène ou Bowman efface la mémoire de HAL, celle-ci se trouve dans une immense salle alors qu'aujourd'hui elle tiendrait probablement sur une pièce de 1 Euro.
Néanmoins, le film tape juste (en plein dans le mille en fait) dans sa vision de l'addiction incroyable avec laquelle l'être humain peut se laisser aller à vivre par procuration au travers de ses multiples écrans. Ne sommes nous pas devenus en quelques décennies( du moins sur la partie de la planète dite développée) les esclaves de nos machines virtuelles et communicatrices ? Ne passons nous pas plus de temps à contempler le monde au travers de miroirs aux alouettes que sont la télévision, l'ordinateur, les écrans de téléphone portables, qu'à contempler directement les membres de notre propre espèce ? Une certaine déliquescence des rapports sociaux semblait déjà être une vision prophétique dans 2001, elle ne fait semble-t-il que s'accroître.
C'est aussi le film qui fit entrer la science-fiction à l'écran dans le domaine de l'âge adulte. Dorénavant un film de ce genre ne sera donc plus uniquement destiné aux enfants, adolescents et aux adultes présupposés en régression. Une autres SF est donc possible.
Mais tout cela serait vain sans l'émotion et le vertige intellectuel que dégage cette oeuvre à nulle autre pareille. Kubrick film chaque scène, chaque plan, comme si sa vie (et sa réputation) en dépendait. On sent dans ce film encore plus que dans ses précédents (et ce sera la marque du cinéaste par la suite) combien chaque détails comptent et sont intrinsèquement liés à l'histoire qu'il raconte. Impossible (et inutile d'ailleurs) de vouloir en faire liste, d'autres l'ont fait et le feront beaucoup mieux que je ne saurais jamais le faire.
Tentons plutôt d'en dégager modestement (très modestement) les grandes lignes qui en font un chef d'oeuvre cinématographique.
Construite comme une oeuvre lyrique mise en images, découpé comme telle (une introduction, un épilogue ouvert, un entracte même), 2001 : l'Odyssée de l'Espace est avant tout un long-métrage se déclinant sur le mode de l'adéquation totale entre la musique, les sons et ce que l'on voit à l'écran.
Les rares dialogues semblant n'être là que pour ne pas trop perdre le spectateur lambda., d'ailleurs ceux-ci sont fades, sans aspérités, à l'image du phrasé plat de l'ordinateur HAL. Le jeu des acteurs est ,de manière volontaire, banal et impersonnel, tout cela pour ne pas prendre le pas sur l'esthétique fondamentale voulue par Kubrick afin de transmettre les émotions voulues au travers d'un cinéma viscéralement elliptique symbolique, graphique et sonore.
Un pari risqué donc, que le réalisateur assume dès l'ouverture avec ses trois bonnes minutes d'écran noir surmonté par la musique macabre et intense de Gyorgy Ligeti, symbolisant l'aube de l'humanité entre peur et effroi, avant que ne résonne celle pleine d'espérance de Richard Strauss avec l'ouverture de Ainsi parlait Zarathoustra et qu'il achève après la dernière ligne du générique de fin par le même écran noir et la totalité du Beau Danube bleu de Johann Strauss fils et son espoir fou d'une humanité meilleure. Le reste du métrage étant traversé de fulgurance où l'histoire de l'Homme est symphonisé par le talent d'un réalisateur hors du commun.
Profondément humain, tout en étant ironique, à mi-chemin entre le documentaire anticipateur et l'opéra filmique. Symbolique et grandiose, créant l'un des personnages les plus emblématiques d'une science fiction adulte au travers de HAL. Relevant encore plus de sa substance à chaque vision, 2001 : l'Odyssée de l'Espace ne peut décemment pas être considéré comme une oeuvre autre que celle à laquelle on peut accoler le titre de chef-d'oeuvre.
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