Titre français : Banishing - La Demeure du Mal
Titre original : The Banishing
Réalisateur : Christopher Smith
Scénariste : David Beton, Ray Bogdanovich, Dean Lines
Musique : Toydrum
Année : 2020
Pays : Angleterre
Genre : Maison hantée
Interdiction : -12 ans
Pays : Angleterre
Genre : Maison hantée
Interdiction : -12 ans
Avec : Jessica Brown Findlay, John Heffernan, Sean Harris, Anya McKenna-Bruce...
L'HISTOIRE : Angleterre, dans les années 1930. Le révérend Linus, accompagné de sa femme Marianne Forster et de la jeune fille de cette dernière, Adélaïde, prend possession de sa nouvelle résidence, un imposant manoir bâti sur les ruines d'une ancienne chapelle de moines Menassiens qui se servaient de la torture pour rendre gloire à Dieu. Il a pour mission de redonner la foi aux fidèles, de moins en moins nombreux à fréquenter l'Eglise. Ce que le couple ignore, c'est que le précédent révérend ainsi que son épouse ont été retrouvé morts dans la demeure qui est réputée hantée. Peu de temps après leur installation, Marianne entend des bruits étranges dans la maison, ainsi que des voix. Elle est bientôt victime de visions, tout comme sa fille d'ailleurs. Ne recevant aucun soutien de la part de son mari, Marianne s'enfonce de plus en plus dans un monde de ténèbres. Seul un para-psychologue semble prendre la situation au sérieux. Quel secret cache réellement la demeure ?
MON AVIS : Le réalisateur anglais Christopher Smith a connu un début de carrière assez retentissant, enchaînant quatre films des plus intéressants et aux qualités certaines, à savoir le stressant Creep (2004), la comédie horrifique Severance (2006), le labyrinthique Triangle (2009) et le moyenâgeux Black Death (2010). Ses deux films suivants, Get Santa et Detour, n'ont pas eu une grande renommée et il s'est alors tourné vers l'univers de la série-télévisée, avant de faire son retour en 2020 avec ce Banishing - La Demeure du Mal. Un réalisateur très prometteur qui s'est vu freiné dans sa montée en puissance pour quasiment être oublié des fans en fin de compte, ce qui est fort dommage. Est-ce que ce Banishing va lui faire retrouver de sa superbe ?
Avec ce film de maison hantée, il tente de renouer avec la grande tradition de l'épouvante gothique d'antan, façon Les Innocents, et dont les plus récentes réussites dans le genre se nomment Les Autres ou L'Orphelinat. Une sacrée concurrence, que Christopher Smith ne réussit malheureusement pas à surpasser, ni à égaler, malgré le fait que son film possède de réelles qualités sans toutefois parvenir à procurer le moindre frisson.
Banishing - La Demeure du Mal est pourtant bel et bien un film qui mise tout sur son ambiance, qui se veut angoissante, déprimante, et qui n'a recours qu'à très peu de jumpscares, là où les films récents en abusent. Le souci provient du scénario du film lui-même, qui part un peu trop dans diverses directions, et finit par nous perdre dans ses méandres. Dommage car Christopher Smith a choisi comme lieu de l'action de son film le célèbre presbytère de Borley, considéré par le chasseur de fantômes Harry Price comme étant la demeure la plus hantée d'Angleterre, rien que ça ! La série française des années 60, Le Tribunal de l'Impossible y a même consacré un épisode, intitulé Qui hantait le presbytère de Borley ? Bref, on avait une bonne base de départ.
Niveau casting, rien à dire non plus et on n'hésitera pas à vanter la prestation de l'actrice Jessica Brown Findlay, absolument parfaite dans le rôle de Marianne Forster, et que j'avais découverte dans le Victor Frankenstein de 2015 avec Daniel Radcliffe. Jessica donne corps et âme à un beau personnage de femme qui n'a pas eu une vie facile et que sa situation actuelle ne va pas réussir à combler non plus, l'entraînant dans une sorte de dépression mentale qui sert au réalisateur pour créer le mystère et nous faire nous questionner sur ce qu'on voit. Marié à un prêtre qui fait passer sa foi en Dieu avant sa femme, Marianne Forster est frustrée sexuellement et le manque d'amour charnelle la fait basculer dans un univers peuplé de visions étranges. Ce n'est évidemment pas le premier film à nous faire douter de la réalité des visions ou hallucinations dont est témoin le personnage principal.
Les bruits étranges, les voix chuchotantes, les visions angoissantes dont est victime Marianne sont-elles réelles ou résultent-elles de son imagination, de ses angoisses, de sa frustration, de sa dépression, de sa honte même en ce qui concerne sa fille Adélaïde ? La maison possède-t-elle réellement un pouvoir occulte, comme semble le suggérer un para-psychologue joué par un exubérant Sean Harris ? Ou tout ne se produit-il que dans la tête de Marianne, qui s'enfonce dans une folie relative à son passé et à sa solitude ? Le mystère est assez bien entretenu par Christopher Smith, qui utilise à bon escient son imposant décor, et place au sein de l'histoire des personnages ambigus, à l'image du supérieur ecclésiastique du mari de Marianne (l'inquiétant John Lynch), qui tient absolument à ce que la petite famille reste dans la maison, alors qu'il a connaissance du drame qui a endeuillé la demeure avant leur arrivée.
La découverte d'un sous-sol labyrinthique, vestige d'un ancien presbytère ayant accueilli des moins pas très religieux, la présence de poupées inquiétantes dans la chambre d'Adelaïde, le comportement de cette dernière, qui s'éloigne de plus en plus de sa mère, tout concoure à instaurer une atmosphère lugubre, à laquelle s'ajoute quelques bonnes idées, comme ce jeu des doubles et la présence d'un miroir qui semble être un portail menant vers un lieu obscur et dangereux. Certaines apparitions et effets visuels sont efficaces (les trois moines qui apparaissent dans la chambre d'Adelaïde, la traversée du miroir...) et jouent habilement avec les codes des films de maisons hantées.
En filigrane, l'histoire prend aussi une direction inattendue, avec cette critique de l'inaction de l'Eglise face à la montée du nazisme, voire même à l'interaction volontaire entre ces deux entités, critique qui trouvera tout son sens lors d'un final glaçant. Fantôme revanchard, passé sordide qui réapparaît, caméra qui longe des couloirs inquiétants, bruits divers, sous-sol mystérieux, tous les éléments répondent à l'appel du cahier des charges de Christopher Smith et pourtant, le résultat final n'est pas aussi bon qu'attendu. La trop grande dispersion du scénario, le manque d'événements et de réels surprises en son sein, font que la mayonnaise prend mollement et qu'on s'attendait à plus de rythme, plus d'énergie, et surtout plus de frissons de la part du réalisateur. Si la mise en scène, classique, fait le job, si le casting répond présent à l'appel, si Jessica Brown Findlay est épatante, il manque néanmoins un petit quelque chose pour que Banishing - La Demeure du Mal emporte totalement l'adhésion et nous fasse vivre de grandes émotions. Le retour de Christopher Smith au genre fantastique n'a donc pas l'éclat espéré, ne tient pas toutes ses promesses mais fait tout de même plaisir à voir. En attendant le prochain...
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