LA BÊTE (1975)

 

Titre français : La Bête
Titre original : La Bête
Réalisateur : Walerian Borowczyk
Scénariste : Walerian Borowczyk
Musique : Domenico Scarlatti
Année : 1975
Pays : France
Genre : Insolite
Interdiction : -16 ans
Avec Sirpa Lane, Lisbeth Hummel, Elizabeth Kaza, Pierre Benedetti, Guy Trejan...


L'HISTOIRE : Le marquis de l'Espérance décide de marier son fils Maturin avec la belle Lucy, riche héritière américaine. Peu après son arrivée au château, elle voit en rêve la rencontre entre une aïeule de Maturin et une créature avide de sang… et de sexe...


MON AVISSe lançant dans le cinéma en 1969, Walerian Borowczyk va très vite intégrer le rang des réalisateurs provocateurs comme Pasolini, Buñuel ou Ken Russell. Après quelques courts métrages dont certains d'animation, il signe une série de films érotiques très différents de ce qu'on pouvait découvrir à l'époque : un véritable scénario, des références artistiques et un style personnel qui va marquer bon nombre de critiques et spectateurs. Avec Contes immoraux, il abordait déjà l'histoire sanglante de Elizabeth Bathory, avec La Bête il revisite La Belle et la Bête à sa manière.

La jeune et riche Lucy doit être mariée de force avec le crétin Maturin, faisant partie d'une grande famille bourgeoise française. Lucy, en parcourant le château, découvre le portrait de la belle Romilda de l'Espérance qui la fascine. Elle entend également parler d'une légende autour d'une étrange créature qui aurait vécu dans la forêt environnant le domaine. Dès le début, Borowczyk cherche à choquer d'emblée en montrant l'accouplement sauvage et très explicite de deux chevaux. On peut être repoussé par cette scène symbolisant le mariage forcé de Maturin et de Lucy. Par la suite, La Bête prend l'aspect d'une comédie satirique et surréaliste, quelque peu ennuyeuse et rappelant beaucoup le style cher à Buñuel, en moins efficace. On apprend ainsi que Maturin est un véritable débile, que le prête invité est un pédophile et que le serviteur noir a une liaison avec l'une des jeunes femmes de la famille, ne pouvant jamais arriver à l'extase à cause du dérangement perpétuel.

La jeune Lucy va pourtant se mettre à fantasmer et à rêver sur le passé de la fameuse Romilda de l'Espérance, qui aurait rencontré un monstre libidineux. Surveillant un petit agneau, elle le perd dans les bois et se retrouve poursuivie par une horrible bête, qui n'a décidément pas envie de dévorer la jolie donzelle mais plutôt d'en abuser. Va s'ensuivre une poursuite où la jeune femme perd ses vêtements un à un avant de se retrouver piégée par le monstre. Autant vous dire qu'on est loin de l'érotisme raffiné de Contes Immoraux dans les scènes avec la bête : Borowczyk verse sans se gêner dans le hardcore, en montrant des ébats très poussés. La jeune femme réticente va finir par céder aux pulsions du monstre et à accepter ce viol. Une idée pareille aurait pu accoucher d'un stupide film porno ou un film érotique simplet, mais avec Borowczyk aux commandes, on se retrouve en face d'une œuvre quasiment artistique, très soignée. Le réalisateur s'attarde sur chaque geste, chaque détail, dégageant à l'occasion un symbolisme intéressant.

Les clins d'œil à Cocteau et aux romans libertins (citation de Voltaire au début du film) sont nombreux, et on peut penser aux BD érotiques pour adultes (Manara et cie). Le monstre est tout simplement hilarant, avec sa tête de loup, son engin gigantesque et son hurlement foireux. Un monstre qu'on n'est pas près d'oublier, c'est sûr ! 

Outre les scènes avec le monstre, Borowczyk nous gratifie d'une très belle scène de masturbation féminine avec des roses, sans tomber dans la vulgarité à laquelle on peut être habitué dans la plupart des films érotiques. Il faut d'ailleurs savoir que le film était prévu comme étant le cinquième conte immoral du film Contes Immoraux mais rejeté à cause de la censure. Provoquant, ironique et surréaliste, La Bête est un hymne à l'amour physique délirant et à ne pas mettre devant tous les yeux.




Jérémie MARCHETTI

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