Titre français : Anthropophagous
Titre original : Anthropophagous
Réalisateur : Joe d'Amato
Scénariste : Joe d'Amato, George Eastman
Musique : Marcello Giombini
Année : 1980
Pays : Italie
Genre : Cannibale
Interdiction : -16 ans
Avec : Tisa Farrow, Saverio Vallone, George Eastman, Serena Grandi...
L'HISTOIRE : De jeunes amis se rendent sur une île grecque pour se divertir. Ils découvrent un village vide de tout occupant. Une de leurs amies disparaît. Après l'avoir recherchée, ils décident de passer la nuit dans une maison apparemment abandonnée. Dans la cave de la maison, ils découvrent une jeune fille complètement terrifiée cachée dans un tonneau. La jeune fille leur raconte qu'elle tente d'échapper à un homme qui aurait mangé tous les habitants de l'île. La peur commence à gagner le groupe...
MON AVIS : L’homme qui se mange lui-même. Si ça ce n’est pas de l’accroche publicitaire choc ! J’ai longtemps fantasmé sur la jaquette de la VHS quand j’étais adolescent, me demandant quelles sortes d’horreurs pouvait proposer ce film. Un film qui a subi le syndrome Massacre à la Tronçonneuse, à savoir se coltiner une réputation d’œuvre hyper gore et scandaleuse par des personnes qui soit ne l’ont pas vu, soit sont vraiment hyper émotives et se mettent à tomber dans les pommes devant une légère entaille au couteau qui laisserait surgir une petite goutte de sang. Classé parmi les Vidéos Nasties en Angleterre, interdit dans de nombreux pays, Anthropophagous laissait planer une odeur de souffre sur sa pellicule de la même manière que le film de Tobe Hooper ou le Cannibal Holocaust de Ruggero Deodato. Qu’en est-il au final ?
Aristide Massaccesi, plus connu sous le pseudo de Joe d’Amato, était plutôt spécialisé dans les films érotiques, notamment ceux mettant en scène son égérie Laura Gemser dans la série des Black Emanuelle avant de se lancer dans le film d’horreur pur et dur. Il avait déjà inclus des éléments horrifiques dans ses films, comme dans Emanuelle et les derniers Cannibales en 1977 par exemple, mais c’est réellement en 1979 qu’il va s’affirmer dans le genre horrifique avec son chef d’œuvre Blue Holocaust. Fort de ce succès, il récidive l’année suivante avec Anthropophagous, puis avec Horrible en 1981 avant d’ajouter d’autres cordes à son arc avec des films post-nuke ou d’héroïc-fantasy (2020 Texas Gladiator, Ator l’invincible, Le Gladiateur du Futur) pour finir par replonger dans les délices du cinéma érotique et pornographique, lui permettant d’avoir une imposante filmographie d’environ 200 films, faisant de lui une référence du cinéma Bis italien.
Vers la fin des années 70, les films de cannibales ont le vent en poupe en Italie, avec les succès de Le Dernier Monde Cannibale ou de La Montagne du Dieu Cannibale par exemple. Ruggero Deodato réalise Cannibal Holocaust en 1980 qui sera suivi l’année suivante par Cannibal Ferox de son confrère Umberto Lenzi. Joe d’Amato, après avoir confronté Emanuelle aux cannibales en 1977 décide de revenir au genre lui aussi en 1980 mais de manière originale et différente. En effet, point de forêt vierge ou d’enfer vert dans son célèbre Anthropophagous, ni de peuplade cannibale d’ailleurs. Non, juste un anthropophage dans une petite île de Grèce. Pas évident dès lors de rivaliser en horreur avec les autres films du genre quand on n’a qu’un seul cannibale à filmer me direz-vous. Détrompez-vous, en habile artisan, Joe d’Amato a réussi son coup et nous livre un film d’horreur très réussi, mais qu’il faut remettre dans son contexte d’époque car il faut quand même avouer que celui-ci a bien vieilli, même s’il reste assez efficace.
S’il est bien un élément qui fait que le film semble très daté, c’est indiscutablement la musique qui accompagne les images. On peut même se demander si elle n’était déjà pas en retard à la sortie du film en salle. Mais pour être plus précis, ce n’est pas toute la partition sonore qui est datée mais seulement certaines parties car lors des quelques séquences de terreur, elle joue parfaitement son rôle.
Du côté des acteurs, on retrouve Tisa Farrow, sœur de Mia, qui n’a pas trop de chance avec les mangeurs de chairs humaines puisqu’elle était déjà confrontée à des morts vivants l’année précédente dans L’Enfer des Zombies de Lucio Fulci. Egalement au casting, la blonde Rubina Rey, qu’on retrouvera pendue par les seins dans Cannibal Ferox en 1981. Chez les garçons, mis à part George Eastman, point de visage connu si ce n’est Mark Bodin que les fans de cinéma italien ont pu voir dans Le Monstre Attaque la même année. Dans l’ensemble, les prestations ne resteront pas dans les annales et s’avèrent d’un niveau moyen.
Par contre, celui qui tire son épingle du jeu, c’est incontestablement George Eastman, qui incarne l’anthropophage. Sa silhouette de géant et son look dans ce film (crâne dégarni avec de longues mèches de cheveux sur les côtés, marche lente, dentition pourrie, visage abîmé par le soleil et regard halluciné) en font une figure emblématique du cinéma fantastique, un monstre au vrai sens du terme. Sa première apparition, après plus de 40 minutes de film environ, restera à jamais gravée dans les mémoires. Un peu comme la première apparition de Leatherface dans Massacre à la Tronçonneuse. D’ailleurs, la structure narrative d’Anthropophagous n’est pas sans rappeler celle du film d’Hooper, avec un long préambule permettant de découvrir les personnages, mise en place d’une ambiance malsaine et horrifiante par petites touches successives avant le déferlement d’horreur, sans toutefois concéder au gore, si ce n’est par deux scènes chocs pour le film de d’Amato, scènes qui lui valurent cette réputation de monument du gore. Mais soyons réalistes, Anthropophagous joue dans la même cour que le film de Tobe Hooper, à savoir le film d’ambiance et de terreur.
En effet, après une introduction choc sur une plage qui nous met bien dans l’ambiance et qui n’est pas sans rappeler celle du Maniac de William Lustig (pourtant réalisé la même année, c’est marrant ça…), on assiste donc à une longue présentation des personnages et à des situations somme toute banales mais qui procèdent à amener progressivement un sentiment oppressant chez le spectateur et à faire monter la tension de ce dernier. Déambulation des protagonistes dans le petit village qui semble désespérément abandonné. Meurtre du capitaine du bateau et enlèvement d’une femme enceinte restée à bord pour cause de foulure de cheville. Découverte d’une vaste demeure dans laquelle une femme se pend sous les yeux de notre petit groupe. Découverte également dans une cave d’une jeune fille aveugle complètement terrorisée (scène excellente dans sa réalisation et dans l’effet choc qu’elle procure !). Petit à petit, et malgré des invraisemblances typiques à ce genre de films (pourquoi les protagonistes ne s’inquiètent pas davantage quand ils voient leur bateau au large au lieu d’être amarré ? Pourquoi ne dorment-ils pas tous ensembles dans la maison au lieu de se séparer dans des pièces voisines ?), Joe d’Amato instaure un vrai climat angoissant, renforcé par un violent orage et par l’absence d’éclairage dans la maison, ce qui nous vaut des déplacements uniquement éclairés par des bougies qui installent le suspense et la peur.
L’ambiance morbide qui s’installe et se dégage du film est également amplifiée par les scènes où l’on visite le repaire du cannibale, où sont entreposés de nombreux corps en état de décomposition ou sous la forme de squelettes, ou lorsqu’une des héroïnes découvre une pièce cachée dans la maison où des corps sans vie sont recouverts d’un drap.
Bien malin également le fait que Joe d’Amato nous explique le pourquoi du comportement de l’anthropophage, sous la forme d’un flashback qui nous ferait presque prendre en pitié cette créature dévoreuse de chair. Qui sait si nous n’aurions pas agi de la même façon dans pareille situation ?
Terminons cette critique en parlant des deux scènes chocs qui ont valu au film sa réputation toujours bien installée dans les mémoires, même aujourd’hui, et surtout pour ceux qui n’ont jamais vu le film. La première, celle de tous les excès, nous montre le cannibale extirper le fœtus de la femme enceinte pour le dévorer. Même si une telle scène, sûrement irréalisable de nos jours, a tout de la scène choc gratuite et faite pour écœurer le public, il n’en reste qu’elle apparaît comme bien sobre, du fait qu’elle se déroule dans une crypte pas très éclairée et qu’elle ne dure pas très longtemps non plus. Mais pour les estomacs fragiles, elle peut faire son petit effet.
La seconde scène choc et culte, c’est bien sûr celle où notre pauvre anthropophage se prend un coup de pioche dans le ventre et ne peut se refréner à porter à sa bouche ses viscères encore toutes chaudes qui sortent de son ventre et qui justifie donc ce slogan de L’homme qui se mange lui-même !
Au final, Anthropophagous de par son rythme plutôt lent et son peu de scènes gores, pourra décevoir le public contemporain, qui lui préférera peut-être le remake Anthropophagous 2000 réalisé par Andreas Schnaas. Pour ma part, je trouve que le film de Joe d’Amato a beaucoup de charme et que, malgré un petit côté vieillot, il fonctionne encore assez bien, notamment grâce au jeu de George Eastman, particulièrement terrifiant (la scène où il sort lentement du puits, brrrr, à frémir d’effroi !). Bref, si vous êtes amateurs de film d’ambiance, où la terreur pointe petit à petit le bout de son nez, vous aimerez sûrement cet Anthropophagous !
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