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ALITA BATTLE ANGEL (2019)

 

Titre français : Alita Battle Angel
Titre original : Alita Battle Angel
Réalisateur : Robert Rodriguez
Scénariste James Cameron, Laeta Kalogridis
Musique : Tom Holkenborg
Année : 2019
Pays : Usa
Genre : Robots et Cyborgs, Science-fiction
Interdiction : /
Avec Rosa Salazar, Christoph Waltz, Jennifer Connelly, Keean Johnson, Ed Skrein...


L'HISTOIRE : Au XXVIème siècle, le docteur Ido trouve, dans une décharge de la ville d’Iron City, une partie du corps d’une jeune cyborg. Après l’avoir réparée, le médecin va vite se rendre à l’évidence que celle qu’il a nommé Alita, a un background mystérieux. Amnésique mais doté d’une force dévastatrice, Alita va tenter de retrouver les pièces du puzzle qui constituent son passé. Mais, à Zalem, cité volante qui domine Iron City, les particularités d’Alita se font vite remarquer et attirent les convoitises...


MON AVISAdapté du manga Gunnm, Alita Battle Angel nous plonge au XXVIème siècle. Dès les premières minutes, le film captive. Par l’impressionnant design de la ville d’Iron City et de sa population mais aussi par l’intrigante cité volante de Zalem dont on nous empêche l’accès dès le début. Dans ce cadre cyberpunk arrive Alita, jeune cyborg reconstruite par le docteur Ido qui repère en elle des facultés de combat exceptionnelles. La jeune femme de métal, aventurière et curieuse de découvrir son passé, va alors tenter de démêler les mystères d’Iron City, ville corrompue, dominée depuis les hauteurs de Zalem par le mystérieux Nova.

Réalisé par le trublion Robert Rodriguez et chapeauté de prêt par James Cameron, le film part avec un pedigree quelque peu étrange. En effet, la réunion des deux hommes avait de quoi susciter la surprise. Comment imaginer que James Cameron allait offrir la réalisation d’un film comme Alita Battle Angel à Rodriguez ? Un film sur lequel il penchait depuis plus de vingt ans et dont il avait écrit des milliers de page de notes. Ou plutôt, comment imaginer qu’un réalisateur aussi exigeant, pointilleux et rigoureux que Cameron pouvait penser confier la réalisation d’un blockbuster de ce genre à un renégat autodidacte et glandeur comme Rodriguez ? Cette question, beaucoup d’entre vous se l’est posée. Surtout les détracteurs de ce bon vieux Robert. Mais pas moi. Tout simplement car je dois vous faire un aveu, je suis fan du cinéma de Rodriguez plus que de celui de Cameron.

Alors, oui, si on prend Terminator 2, forcément, là, on est au summum de l’art cinématographique donc on ne peut pas comparer. Ok, je vous l’accorde. Mis à part cela, Je suis plus Une nuit en Enfer, The Faculty ou Planète Terreur que Titanic, Avatar ou Abyss. A aucun moment, je ne conteste que les films réalisés par Cameron soient beaucoup plus travaillés, plus impressionnants de maîtrise et de talent. Juste, je dis que je suis plus sensible au côté fun, décomplexé et rentre dedans de Rodriguez. Maintenant que vous avez fini de me jeter des pierres, voyons le bon côté des choses : Alita Battle Angel est la fusion parfaite des talents des deux hommes. La précision et la perfection technique de Cameron couplé au pouvoir jubilatoire de Rodriguez. Sans tourner autour du pot, Alita est le meilleur blockbuster d’action vu depuis longtemps. Allez, disons-le, le meilleur depuis Terminator 2 !

Déjà Alita arrive à offrir, en à peine plus de deux heures, une intrigue à la fois captivante, impressionnante et pleine d’émotions à l’heure ou des Transformers et des Avengers vont avoir besoin de trois heures pour ne rien raconter. De plus, le film a même l’audace d’être encore plus réussi techniquement et bluffant que les sagas précitées. Certes, il n’y a pas de ville entière qui explose ou de destruction d’immeubles à grand échelle mais Alita va beaucoup plus loin que ça. Ne cherchant pas à jeter de la poudre aux yeux, le film impressionne par les designs de ses villes et de ses personnages. Les scènes de combat et les parties de motorball sont aussi techniquement remarquables que jouissives. Plus que ça, la prouesse technique en est même parfois invisible. Lorsqu’Alita prend le docteur qui l’a recueilli dans ses bras, c’est si simple et pourtant d’une telle complexité. Les meilleurs effets spéciaux sont souvent ceux qu’on ne remarque pas.

Les effets spéciaux sont, à l’instar d’Avatar, au cœur même de la conception des personnages. Ainsi Alita, cyborg aux yeux manga, est interprété par Rosa Salazar sous motion capture. Et encore une fois, le résultat est impressionnant. Ce personnage qu’on nous présente comme étant entièrement robotique et interprété par une actrice en partie numérique semble plus humaine et touchante que la plupart des actrices de chair et d’os. Ses relations avec le docteur Ido et avec Hugo, jeune voleur des bas-fonds vont jouer sur votre corde sensible sans pour autant tomber dans le pathos. C’est beau, tout simplement. On n’avait pas vu une telle relation humain/cyborg depuis celle de John Connor et du T-800. Une beauté ponctuée par des moments dramatiques et des scènes d’action pleine de tension. Même si elle émeut, Alita sait aussi nous divertir et nous amuser. Son espièglerie et sa confiance en elle face aux plus grandes brutes apportent leur lot de moments cocasses et jubilatoires. On y retrouve encore un point commun avec Terminator dans cette scène du bar ou Alita, comme le T-800 à son époque, affronte avec légèreté toute une bande de loubards.

Si la direction artistique, la technique et les personnages sont parfaits, il en va de même pour le scénario. Rythmé comme il se doit, plein de rebondissements et montant crescendo vers un (multiple) climax puissant au son d’une musique épique sans trop en faire, l’histoire est une merveille de précision scénaristique et de moments de grâces. Alors, bien sûr, la fin peut être frustrante. Mais c’est comme ça quand c’est bon, on en veut toujours plus.

Pour conclure sans en ajouter plus, il suffit de dire qu’Alita Battle Angel est le genre de film qu’on ne voit que trop rarement. Une fois tous les vingt ans, peut-être. Le genre de film qu’on a envie de revoir dès la sortie du cinéma, qui donne envie de lire ou relire les mangas de Yukito Kishiro, de lire le roman tiré du livre, de précommander le Bluray et surtout d’en parler à tout le monde autour de soi. Merci Robert ! Merci James ! C’est pour ça que le cinéma existe.




Sylvain GIB

ALIENS VS. PREDATOR : REQUIEM (2007)

 

Titre français : Aliens vs. Predator : Requiem
Titre original : Aliens vs. Predator : Requiem
Réalisateur : Colin Strause, Greg Strause
Scénariste Shane Salerno
Musique : Brian Tyler
Année : 2007
Pays : Usa
Genre : Extraterrestre, Science-fiction
Interdiction : /
Avec Steven Pasquale, Reiko Aylesworth, John Ortiz, Johnny Lewis, Ariel Gade...


L'HISTOIRE : Un vaisseau extraterrestre s’écrase sur Terre après un combat ayant opposé des Prédators à des Aliens, ces derniers ayant donné naissance à une nouvelle race : le Prédalien, qui a survécu au crash de l’appareil. La reproduction alien commence sur Terre et les victimes ne cessent d’augmenter, les belliqueux extraterrestres mettant à feu et à sang une petite ville sans histoire. Pour parer à cette invasion, un Prédator est envoyé sur Terre afin d’éliminer les Aliens et faire disparaître toute trace de leur existence…


MON AVISEn 2004, la sortie de Alien vs. Predator provoque un tollé quasi général de la part des fans, qui s’attendaient à un film sérieux, respectant les deux franchises, et non pas à une version bande-dessinée live mettant en scène les deux monstres extraterrestres les plus réussis du cinéma. Pour ma part, avec un titre pareil, je m’attendais justement à voir un film fun, décomplexé, s’affranchissant des codes des deux sagas pour nous balancer en pleine poire des combats titanesques entre Predators, Aliens et Marines, à l’image des bandes-dessinées sorties en 89 et des jeux vidéos, les deux sources principales d’où a été tirée l’idée du film. Je fais donc partie des (très) rares personnes ayant apprécié le film pour ce qu’il est, un cross-over qui ne se prend pas la tête, possédant de bonnes idées, et qui nous en donne pour notre argent. Un film à part, qu’il ne faut pas chercher à inclure dans les sagas respectives en fait, et qu’il faut prendre comme un pur divertissement, ce qu’il est avant tout.

L’annonce d’une suite n’avait pas provoqué un enthousiasme généralisé non plus. Les détracteurs du premier opus étaient néanmoins plus mitigés dans leurs propos puisqu’ils s’étaient mis en tête qu’on ne pouvait de toute façon pas faire pire que le film de Paul W.S. Anderson et qu’il fallait donc donner sa chance au film des frères Strause. Les premières images dévoilées, laissaient d’ailleurs entrevoir un film bien bourrin, avec son lot de séquences spectaculaires. A l’arrivée, la constatation qui s’imposa d’emblée fut : on va sûrement revoir à la hausse le film d’Anderson ! Comme quoi…

Les frères Strause, qui travaillent dans le domaine des effets spéciaux avant tout, décident donc trois ans après le film d’Anderson de livrer au monde leur vision de ce duel titanesque en passant derrière la caméra. Ils ont (apparemment) un atout de taille pour réussir cette mission, puisqu’ils sont fans des deux sagas qu’ils connaissent par cœur. Peut-être même un peu trop d’ailleurs parce qu’à la vision de leur film, on ne peut justement s’empêcher de penser à tous les films existants, tant les clins d’œil sont appuyés, reprenant même des séquences ou des idées à l’identique, et enlevant à cet Aliens versus Predator : Requiem toute âme ou originalité. On a donc pèle-mêle : un alien qui tombe dans une piscine et nage sous l’eau pour chopper une victime (Alien : La Résurrection), un alien qui s’approche du visage de sa victime et le renifle (Alien 3), un alien qui saisit un ouvrier pour faire exploser son crâne d’un bon coup de mâchoires (Alien le Huitième Passager), l’éjection d’une capsule d’un vaisseau qui va finir sa course sur Terre (Predator), un corps pendu par les pieds et totalement dépecé (Predator 2) et j’en passe… Bref, des tas de références, d’allusions ultra poussées à tous les films que le spectateur connaît aussi très bien et qui finissent par alourdir le propos pour au final ne pas jouer en faveur du film lui-même. Des petits clins d’œil, on peut trouver ça fun, mais là, c’est un peu trop poussé quand même…

Autre point négatif, la luminosité des séquences d’action et de combats. Déjà au cinéma, tout n’était pas super lisible, la plupart des scènes marquantes se déroulant dans la pénombre, rendant difficile la compréhension de ce qui se passe à l’écran. Dans certains combats, on ne pourrait se prononcer sur qui frappe qui, tant on ne discerne pas qui fait quoi justement. Je n’ose imaginer alors le rendu sur un écran de 55cm, voir même de 70cm. Autant aller acheter des lunettes à infrarouges avant d’enclencher le DVD dans son lecteur. Tout le film n’est pas comme ça, heureusement, mais la plupart du temps, ça se passe dans l’obscurité et on ne distingue pas toujours grand-chose.

Les personnages humains ne sont pas non plus à mettre dans les points positifs du film. En fait, ils sont tellement stéréotypés qu’on ne les trouve pas intéressant pour deux sous. On a le grand frère ex taulard qui revient dans sa ville natale, le petit frère amoureux d’une jolie blondinette qui est déjà en couple, cette dernière (plutôt jolie d’ailleurs !) se la jouant femme fatale, le flic de couleur qui a du mal à faire sa place parmi la population, l’ex copain de la blondinette qui a un Q.I. proche de celui d’une moule, et le pire de tout, la militaire revenant de mission et qui, comme par hasard, sait tout faire, sait piloter n’importe quel véhicule de l’armée. Bref, tout un joyeux tas de protagonistes bourrés de clichés maintes fois vus et qui n’apportent pas grand-chose à l’histoire.

Reste ceux pour qui on est venu, à savoir les Aliens et le Predator. Ben heureusement qu’ils sont présents ceux là ! Le Predator est toujours aussi beau, majestueux et combatif. Accordant toujours un statut a part au code d’honneur (la très belle scène où il pose délicatement sa main sur le corps d’un de ses compatriotes morts et incline sa tête en signe de respect), il a ici une nouvelle mission, celle d’effacer toute trace du passage des Aliens. Pour se faire, il dispose d’un curieux liquide bleuté qui désagrège n’importe quoi à une vitesse effarante. Petite faiblesse du scénario, le Predator agit au départ de manière discrète afin de ne pas faire naître des soupçons chez les humains mais finit par tout faire exploser avec bruits et fracas. On a déjà vu mieux comme tactique de discrétion…

Les Aliens ont à peu près le même look que d’habitude, sont toujours aussi belliqueux et sans émotions aucune quand il s’agit de tuer, ce qu’ils font très bien. La séquence où la garde nationale arrive en ville pour se faire dézinguer par les Aliens est assez sympathique, voir jubilatoire.

Évoquons également le fameux Predalien, qu’on aura aussi bien du mal à distinguer du fait de la luminosité faiblarde. Les réalisateurs auraient pu lui donner un rôle un peu plus consistant parce que là encore, il n’apparaît pas sous son meilleur jour et n’offre pas vraiment de séquences dignes d’intérêt, hormis celle de l’insémination d’une femme enceinte.

Comme vous l’aurez constaté, on a plus de points négatifs que de positifs à l’arrivée. Pourtant, tout n’est pas non plus à jeter. Certaines parties du film sont agréables à regarder, certaines séquences se montrent même assez cruelles (la contamination du père et de son fils au début), il y a pas mal d’action et nos deux peuplades extraterrestres ennemies sont souvent présentes à l’écran. Le film fera l’affaire s’il n’y a rien à la télé et s’avère même un peu mieux à visionner chez soi qu’au cinéma, hormis ce problème de luminosité qui tend trop vers le sombre. Bref, rien de sensationnel au final, juste une tentative pas toujours réussie d’en donner enfin pour son argent aux spectateurs. Aliens vs. Predator : Requiem n’est pas un nanar intergalactique non plus (qui a dit si ! ?), il reste divertissant dans son ensemble. Mais ça m’étonnerait aussi que vous le regardiez plusieurs fois d’affilé, comme vous avez pu le faire avec les autres films des deux sagas…




Stéphane ERBISTI

ALIENS LE RETOUR (1986)

 

Titre français : Aliens le Retour
Titre original : Aliens
Réalisateur : James Cameron
Scénariste James Cameron
Musique : James Horner
Année : 1986
Pays : Usa
Genre : Extraterrestre, Science-fiction
Interdiction : -12 ans
Avec Sigourney Weaver, Michael Biehn, Paul Reiser, Lance Henriksen, Bill Paxton...


L'HISTOIRE : Le Lt. Ripley est accueillie sur la station spatiale Gateway et apprend que son module de survie était à la dérive depuis 57 ans. Suite à une audience avec des huiles de la Compagnie, elle découvre que la planète LV-426, où son équipage avait jadis découvert le vaisseau échoué des aliens, est habitée par des colons depuis une vingtaine d'années. Elle accepte d'y retourner en compagnie d'un peloton de Marines, sous l'expresse condition que la mission concernera l'éradication totale des créatures. Mais peut-elle vraiment faire confiance à la Compagnie ?


MON AVISJames Cameron n'est pas un génie. James Cameron est un piètre observateur des êtres humains et ne sait donc pas composer de personnages crédibles. James Cameron n'écoute jamais parler les gens autour de lui et n'écrit alors que des dialogues tout à fait dispensables. Mais James Cameron sait faire toujours plus : plus grand, plus beau, plus bruyant, plus spectaculaire - et il n'y a qu'à revoir Terminator 2, Abyss ou Titanic pour se convaincre qu'il le fait surtout très bien. Aliens le Retour est un film vraiment impressionnant, à première vue. Qui n'est pas resté bouche-bée devant la sauvagerie des combats Marines-aliens ? Qui n'est pas resté scotché à son siège à l'apparition magistrale de la Reine dans son repaire glauque et poisseux ? Et qui n'a ressenti aucune montée d'adrénaline (et de testostérone...) durant le combat final entre les deux mères du film ?

Mais suite à de nombreux visionnages, le vernis commence à se fissurer. On aperçoit alors l'envers du décor, pas toujours bien crédible. La première chose que l'on remarque est le thème qui infuse également Stargate de Roland Emmerich : Ce qu'on ne connaît pas nous fait peur. Tentons alors de dominer l'inconnu/l'intrus par la force militaire. Etant donné que le monde entier craint la nôtre, alors par extension, les extraterrestres aussi. Y'a pas de raison. Effectivement, vu sous cet angle...

Ensuite, on remarque que chaque Marine incarne une émotion particulière : le courage, la trouille, la lâcheté, l'indifférence, le machisme et ainsi de suite. Aucun n'a de dialogue significatif et on peut soit rire soit rouler des yeux en entendant leurs one-liners d'un cliché exemplaire. Et pourtant, ça marche. Parce que chacun occupe une place bien définie au sein d'un groupe consolidé comme s'il était un être entier. Mais individuellement, aucun ne possède une humanité à plusieurs dimensions. Ceci freine notre solidarité à leur égard et on se prend presque à encourager les aliens et à regretter de les voir exploser sous les balles et les grenades! Et des aliens, en veux-tu, en voilà ! Ça grouille de partout ce qui en rajoute à notre claustrophobie, ils sont rapides et vicieux comme des requins affamés, et magnifiques de beauté luisante et gracieuse, avec une pensée toute particulière pour les crocs translucides (merci, Stan Winston !).

Le tour de force du film réside bien sûr en la découverte de la Reine dans son nid par Ripley. Et c'est là que le deuxième thème du film apparaît dans toute sa splendeur, là où avant, il n'était que suggéré : le rapport mère-enfant ou plus précisément, l'instinct maternel. Lorsque les Marines explorent les baraquements de LV-426, ils découvrent une petite fille, Newt, qui a perdu toute sa famille. Ripley l'adopte immédiatement, ce qui n'étonne personne puisqu'au début du film, on apprend que deux ans avant que ne soit découvert son module de survie, sa propre fille est morte à l'âge de 65 ans. Le réveil de son instinct maternel est donc tout à fait normal et compréhensible. Le parallèle (un peu gros...) est alors fait avec la Reine alien dont l'existence ne consiste qu'en la ponte d'œufs. Celle-ci est complètement vulnérable à cause de l'énorme sacs d'œufs attaché à son abdomen, et prête à tout afin de protéger sa progéniture. Tout comme Ripley avec sa fille adoptée.

Sigourney Weaver est d'ailleurs la seule actrice du film qui réussit à insuffler de l'humanité à son personnage. Même le Caporal Hicks, qui incarne l'aspect romantique du film, a du mal à nous convaincre de sa sincérité, surtout au vu d'un échange plutôt douteux car plein de sous-entendus à propos d'une mitraillette/lance-flammes et grenades (Prenez-le bien en main ; Montrez-moi tout, etc). Hicks possède d'ailleurs une faiblesse incroyable et doit rapidement s'en remettre à Ripley pour avoir une chance de s'en sortir (à ce propos, il est intéressant de noter que le Commandant en charge est le plus inexpérimenté et lâche de tous. Il ne démontrera du courage que lors de son auto-sacrifice en compagnie d'un de ses soldats afin de ne pas le laisser seul face à l'ennemi...).

Avant même que l'idylle entre Hicks et Ripley ait une chance de se développer, elle est abandonnée... Hmmm... Cameron n'aimerait-il pas les femmes ? Lui feraient-elles peur ? On peut se permettre de le penser, en particulier au moment où les Marines découvrent des facehuggers mis en bocal par les colons. Leur côté ventral ressemble à s'y méprendre aux organes génitaux féminins, avec en plus une sorte de trompe qui en sort pour violer la victime par la bouche (...) et pondre un embryon d'alien dans l'estomac (Giger, le créateur des aliens, ne s'est d'ailleurs jamais caché de cet aspect ouvertement sexuel, qu'il aurait même voulu amplifier davantage). Et comment réagissent-ils face à ces créatures terrifiantes ? Par la violence. Le discours est certes un peu léger (ou lourd, dépendant d'où l'on se place...), caché sous la xénophobie galopante de l'armée américaine, mais visible si on y fait attention. Ce n'est pas de la psychologie de bas-étage de dire que ce sont les femmes qui dominent le film, et par extension, les hommes présents.

Ce qui ne m'empêche pas d'apprécier, voire même adorer, ce film qui, pour moi, est un divertissement époustouflant et beau à crever. Et lorsqu'à la fin du film on repense à la brève intro de Cameron nous présentant cette édition spéciale de 2h40 comme étant la version qu'il avait toujours voulu nous montrer, on se dit que c'est aussi la seule qu'on avait envie de voir.




Marija NIELSEN

ALIEN COVENANT (2017)

 

Titre français : Alien Covenant
Titre original : Alien Covenant
Réalisateur : Ridley Scott
Scénariste Dante Harper, John Logan
Musique : Jed Kurzel
Année : 2017
Pays : Usa, Angleterre, Australie, Nouvelle-Zélande
Genre : Extraterrestre, science-fiction
Interdiction : -12 ans
Avec Michael Fassbender, Katherine Waterston, Billy Crudup, Danny McBride...


L'HISTOIRE : Les membres d’équipage du vaisseau Covenant, à destination d’une planète située au fin fond de notre galaxie, découvrent ce qu’ils pensent être un paradis encore vierge. Il s’agit en fait d’un monde sombre et dangereux, cachant une menace terrible. Ils vont tout tenter pour s’échapper...


MON AVISSûrement beaucoup plus vendeur au niveau de son titre, Prometheus 2 devient donc Alien Covenant, du nom du vaisseau spatial présenté ici et qui parcours l'univers avec à son bord un équipage et 2000 colons. Un voyage spatial qui fait suite à une introduction assez déconcertante mais qui a pour mérite de présenter le véritable enjeu du film, sa véritable thématique : l'origine de la vie, sa création. Le dialogue entre un humain et sa création, David, toujours interprété par Michael Fassbender (qui aura un double-rôle), dans un décor sobre et on ne peut plus épuré, pose les bases de ce que va être Alien Covenant. Une sorte de relecture du mythe de Frankenstein, dans laquelle on découvre qui est à l'origine de l'existence des xénomorphes, ces terribles prédateurs qui sont donc nés des suites de multiples expériences que n'auraient pas renié le célèbre docteur cité plus haut.

Des réponses, Ridley Scott en livre donc pas mal dans Alien Covenant, à grands coups de sentences métaphysiques parfois pompeuses mais jamais inintéressantes. Il reprend également quelques thèmes qui ont fait le succès de son chef-d'oeuvre, Alien le Huitième Passager : voyage spatial, équipage en hyper-sommeil, réception d'un message en provenance d'une planète inconnue, exploration de ladite planète par exemple. La vision de la bande-annonce m'avait même fait penser à un remake, c'est dire si les hommages sont frappants et reconnaissables. Pourtant, Alien Covenant s'extirpe assez habilement de ce côté remake et parvient à gagner sa propre identité. Très nihiliste, sombre et violent, le film ne lésine pas sur la violence et l'accouchement des petits mais mortels chestbursters se fait dans la douleur, c'est le moins que l'on puisse dire. Il en va de même pour les attaques de xénomorphes, parfaitement mises en scène, d'une fluidité parfaite et d'une brutalité exquise. Peu nombreuses toutefois, les spectateurs s'attendant à voir un nouvel Aliens le Retour en seront pour leur frais.

Alien Covenant ne joue clairement pas dans cette catégorie de films fun et bourrin mais préfère prendre son temps, se montre contemplatif et volubile avant de déclencher les hostilités. Le film possède de nombreuses qualités mais aussi des défauts, à commencer par un choix de casting discutable. L'héroïne, interprétée par Katherine Waterston, ne m'a guère convaincu, je l'ai trouvé assez fade. Il y a également pas mal de longueurs, qui m'ont un peu sorti de l'ambiance. Une ambiance pourtant bien travaillée la majeure partie du temps et qui réserve son lot d'émotions fortes. On appréciera l'hommage rendu par Ridley Scott au génial H.R.Giger (décédé en 2014) à travers des croquis et des design de toute beauté. Si la scène de la douche semble sortir tout droit d'un slasher movie et reste discutable dans ce film, le final est par contre remarquable et d'une maîtrise totale.

Alien Covenant semble diviser les spectateurs, de par sa tonalité et son approche. Une approche audacieuse mais qui pourra déstabiliser effectivement. En tout cas, pour ma part, c'est loin d'être le navet annoncé par certains et même si je n'ai pas adhéré à 100% au film, il reste un long métrage de qualité, certes pas parfait, mais largement au dessus de la moyenne. Plus qu'à attendre la suite...




Stéphane ERBISTI

ALIEN : LA RÉSURRECTION (1997)

 

Titre français : Alien : La Résurrection
Titre original : Alien : Resurrection
Réalisateur : Jean-Pierre Jeunet
Scénariste Josh Whedon
Musique : John Frizzell, Jerry Goldsmith
Année : 1997
Pays : Usa
Genre : Extraterrestre, science-fiction
Interdiction : -12 ans
Avec Sigourney Weaver, Winona Ryder, Dominique Pinon, Ron Perlman, 
Brad Dourif, Leland Orser, Michael Wincott...


L'HISTOIRE 200 ans après sa mort, à partir d'un échantillon de sang récupéré sur la planète Fiorina 16, l'équipe militaro-scientifique de l'USM Auriga, vaisseau de recherche médicale croisant dans l'Union des Systèmes Planétaires, met à terme un clone du lieutenant Ellen Ripley. Sous la direction du Dr Vren, le Dr Gediman extrait le fœtus alien de sa cage thoracique, et ils décident de garder la jeune femme en vie. Suite à la culture ADN dont elle a fait l'objet, Ripley se révèle douée d'une force peu commune, ainsi que d'une sorte de liaison télépathique avec l'espèce alien, qui lui fait rapidement prendre conscience qu'un spécimen de reine s'apprêtant à pondre est élevé à bord du vaisseau. C'est à ce moment-là que le Betty, navette de commerce de Elgyn et de sa bande d'olibrius, accoste sur l'USM afin d'y livrer des sujets cryogénisés, dont ils ignorent qu'ils sont destinés à incuber les monstres…


MON AVISAprès l'apothéose de Alien 3, la saga semblait définitivement close. Pourtant, tandis que le projet d'un Alien vs Predator bouillonnait dans les marmites hollywoodiennes, les spéculations sur une possible résurrection d'Ellen Ripley ne tardèrent pas à mener bon train. Il allait falloir davantage qu'un bain de flammes pour abandonner un personnage féminin de cette envergure. Le crossover céda donc la place à la séquelle écrite par Joss Whedon (l'un des principaux scénaristes de la série TV Buffy contre les Vampires), et la chaise du réalisateur, après avoir accueilli un Danny Boyle de passage, reçut un hôte bien imprévu : Jean-Pierre Jeunet, réalisateur français dont la réussite esthétique et poétique de La Cité des Enfants Perdus (1995) avait obtenu une reconnaissance internationale.

Parmi les bagages que Jean-Pierre Jeunet eut l'autorisation de faire passer aux douanes se trouvait Pitof, dont on retrouve ici toute la palette esthétique, à la fois sombre, verdâtre et glacée. La répartition des tons et des lumières est d'ailleurs significative du propos du film, dont l'une des caractéristiques est de ramasser et de mettre en relief les thèmes abordés depuis le début de la saga. Ainsi l'opposition hommes/femmes, symbolisée par le nom de l'ordinateur central (Je suis le Père) et Ellen Ripley elle-même (Je suis la mère du monstre) est marquée par des variations de couleurs et d'éléments tranchées : d'un côté un univers mâle aseptisé, brillant, métallique et surexposé où les grimaces viriles ressortent avec agressivité, de l'autre sa corruption maternelle, abordée avec des précautions qui s’avéreront bien vaines : acide, lumières orangées, rouille, ténèbres et viscosités organiques propres à créer une atmosphère étouffante, angoissante et empesée, où les corps s'embourbent comme dans un cauchemar. La transition - et le salut – sera assurée par l'équipage du Betty : gouailleurs, bordéliques et débrouillards, les tons sombres et sales qui entourent les membres de l'équipe signalent à la fois une contestation et une familiarité avec les deux mondes précédents, qui leur permettra d'y échapper.

On peut se demander pourquoi le scénario de Joss Whedon rebrasse tant d'éléments précédents : les œufs pondus dans le vaisseau et l'équipage militaire (Aliens le Retour), les marginaux (Alien 3), l'équipier se révélant être un robot (Alien le Huitième Passager)… Chacun d'entre eux subit bien entendu une modification significative, voire une inversion totale, mais reste clairement identifiable. Par exemple, le personnage incarné par Winona Ryder, Call, succède au Ash interprété par Ian Holm et au Bishop interprété par Lance Henriksen, mais est cette fois un robot lui-même crée par des robots, cherchant à détruire la race alien et manifestant une humanité excessive. S'agissait-il donc de multiplier les signes de fidélités envers un public de fans inquiets (mais dans ce cas l'esprit de conservatisme signe de toute façon l'arrêt de mort de la série), de borner étroitement la marge d'invention du réalisateur (on sait qu'elle était faible, ce qui décida Marc Caro à ne pas accompagner Jeunet dans son périple hollywoodien), ou de compenser par des références solides les inventions majeures de cette Résurrection ?

Débutant sur un rythme ample et fielleux magnifié par la musique de John Frizzel, où la renaissance de Ellen Ripley s'accompagne d'une mise en place qui fait la part belle au caractère pittoresque des autres personnages, le film s'accélère à partir de la libération des aliens, enchaînant les unes après les autres les séquences d'épouvante et d'action. La bataille du gymnase, l'évacuation des militaires, la découverte d'un survivant (Leland Orser) parmi les cobayes ou la scène sous-marine, autant de morceaux menés tambour battant et recelant quelques beaux effets gore (les meilleurs se situant au niveau des têtes !), où l'on regrettera seulement quelques traits d'humour au feutre et des dialogues typiquement frenchies, c'est-à-dire bien trop écrits et manquant de naturel dans leur côté rebelle, humain et marrant…

Mais c'est lors des quelques pauses rythmiques que nous accorde Jeunet qu'ont lieu les séquences les plus marquantes et les plus originales du film, placé sous le signe de la manipulation génétique. La découverte par Ripley du laboratoire où sont conservés ses précédents clones atteint des sommets de terreur, d’écœurement et d'émotion, les images dégageant un faste macabre et lyrique peu commun. Enfin, la séquence la plus belle et la plus impressionnante demeure sans doute l'accouchement de la Reine, Ripley communiant avec une noire sensualités aux douleurs de la mère immense… qui accouche alors d'un nouveau-né au mixage blanchâtre et gluant, auprès duquel les spécimens d'aliens classiques ont l'air d'enfants de chœur ! Son alliage de monstruosité et d'humanité, de détresse et de violence, tétanise littéralement, et la scène finale hautement sadique traduira à merveille l'ambiguïté des positions de Ripley à l'égard des créatures qu'elle n'avait de cesse autrefois de combattre.

En somme, Jean-Pierre Jeunet a réussi à mettre en boîte un fabuleux volet qui ne dépare pas les précédents (et qui surpasse même celui de James Cameron), assumant au contraire avec brio le tournant décisif donné au personnage de Ripley en nous livrant un film d'horreur et d'action noir, poétique et malsain, exactement ce que l'on pouvait espérer en le voyant engagé par les studios hollywoodiens. Y aura-t-il une suite, ou bien l'inspiration s'est-elle tarie, n'accouchant plus que de crossover malingre ? L'avenir le dira.




Stéphane JOLIVET

ALIEN 3 VERSION LONGUE (1992)

 

Titre français : Alien 3 Version Longue
Titre original : Alien 3 Extended Cut
Réalisateur : David Fincher
Scénariste David Giler, Walter Hill, Larry Ferguson
Musique : Elliot Goldenthal
Année : 1992
Pays : Usa
Genre : Extraterrestre, science-fiction
Interdiction : -12 ans
Avec Sigourney Weaver, Charles Dance, Charles S.Dutton, Lance Henriksen...


L'HISTOIRE : Le module de survie du Sulaco s'écrase sur la planète Fiorina Fury 161 et Ripley en est la seule rescapée. La planète est une colonie minière ainsi qu'une prison pour criminels dangereux. Un alien a fait le voyage également, et s'attaque rapidement aux détenus, désarçonnés devant cet intrus d'une efficacité redoutable et mortelle. Malgré la réticence des prisonniers face à Ripley, ils tenteront de combattre la créature à ses côtés, allant jusqu'au sacrifice auquel elle devra faire face aussi...


MON AVIS En 1992, j'étais allée voir ce film en avant-première, et je suis retournée dès le lendemain, ainsi qu'une troisième fois avant qu'il ne disparaisse de l'affiche, tant j'avais été impressionnée par ce que j'avais vu. Je ne cessais de clamer partout que ce film était grandiose, que Fincher était un génie, mais personne ne voulait m'écouter. Et puis, il y a quelques semaines, j'ai découvert cette édition spéciale dans le coffret Quadrilogy sorti à Noël 2003, et j'en ai presque pleuré de gratitude ! C'est simple, on a l'impression de regarder un autre film. Ici, le peu d'histoire prend finalement un sens, les prisonniers ont tous un nom qu'on arrive à mettre sur leurs visages, quelques meurtres sanglants de plus sont également inclus, ainsi qu'une longue séquence qui relance carrément l'histoire et éclaircit les propos et les actes d'un personnage s'avérant clé.

La même pensée revient sans cesse durant le film : Mais QUI a donc cru qu'en charcutant cette copie rendue par Fincher, quelque chose de meilleur en résulterait ? Quelque chose de plus commercial, oui, c'est certain. Mais cette vision initiale du projet par son réalisateur pourtant novice en cinéma, nous confirme en le soulignant d'un trait épais, que le jeune homme savait exactement ce qu'il faisait.

[Attention aux spoilers]

Déjà, le film ne débute pas de la même façon que la version cinéma. Là, on avait droit à une copie presque conforme du début d'Aliens Le Retour, où l'équipe de sauvetage descelle le sas d'ouverture du module de survie. Ici, on nous présente quelques vues panoramiques d'une planète grise et hostile, sale et moche. Des images à effet négatif, mais rendues fraîches parce qu'on n'est pas immédiatement plongé dans le déjà-vu et le préjugé direct (Ah non, pas encore la même histoire…) On voit le docteur Clemens se promener (superbe Charles Dance), et c'est donc lui qui découvre le corps inerte de Ripley échoué sur le rivage, avec au fond, le module de survie crashé dans la mer. Ensuite, on assiste au remorquage par des bœufs du vaisseau éclaté. Ces animaux ont été entièrement coupés au montage, alors qu'ils font partie intégrante de ce monde primitif, ajoutant une dimension de plus à cet endroit désuet où tout est construit en bois. C'est d'ailleurs dans un bœuf que naît le premier alien, une créature déjà formée et qui court cette fois à quatre pattes. Fincher avait voulu en faire quelque chose de différent, chose pour laquelle il avait été lapidé par les critiques (si ce n'est pas cassé, pourquoi le réparer, etc). Et différente, elle l'est, la nouvelle créature. Cette fois, elle déchiquette ses victimes au lieu de juste les tuer. Fine et légère, elle court sur les murs et les plafonds tête en bas, comme un véritable insecte.

Le statu quo des détenus est interrompu par l'arrivée de Ripley, seule femme dans ce monde d'hommes, de plus violeurs et tueurs de la pire espèce. Elle en sera presque pour ses frais lors d'une scène d'agression censée se terminer par un viol, mais sera sauvée in extremis par Dillon (incarné par un génial Charles Dutton), le chef spirituel de ces prisonniers devenus croyants, comme si c'était le dernier espoir qui s'était offert à eux.

Les prisonniers se préparent à explorer les tunnels lorsqu'un groupe de trois se fait attaquer par la créature désormais adulte. Un seul survit, le prisonnier Golic, soupçonné d'avoir tué ses camarades et désormais obsédé par ce qu'il appelle le dragon. Ripley a eu la confirmation par ce qui restait de Bishop qu'un alien était bien à bord du module de survie, et ensuite, c'est au tour du docteur Clemens d'être tué. A ce propos, c'est la première fois dans la série que Ripley a une aventure avec un homme, mais elle semble condamnée à perdre tous ceux qu'elle aime (son propre enfant, Newt, le Caporal Hicks et maintenant, son nouvel amant). Dans la séquence coupée qui relance l'histoire au lieu de la rendre difficilement compréhensible dans la version cinéma, les prisonniers se mettent à la recherche des deux corps disparus. Suite à une explosion non prévue et quelques attaques de plus, ils arrivent à enfermer l'alien dans un entrepôt de déchets toxiques vide. Mais la créature est libérée par Golic, au prix de sa propre vie. L'explication pour son obsession est assez subtile, et claire seulement si on lit entre les lignes. Elle trouve son origine dans quelques dialogues échangés à la cantine, séquence absente de la version cinéma. Mais c'est justement ce genre de choses qui donne encore une dimension de plus à ce film, et contredit les détracteurs de Fincher qui ne voyaient en lui qu'un producteur d'images de pub et de vidéos musicales, incapable de diriger des acteurs en chair et en os.

Lorsque Ripley découvre qu'elle porte un embryon de reine, elle perd en quelque sorte son statut de femme, voire son statut d'être humain, puisqu'elle est désormais réduite à une simple enveloppe corporelle où se développe le pire des monstres. On peut faire un parallèle évident avec un viol qui la laisserait enceinte de quelque chose d'inhumain qui la condamne d'emblée à mourir. Elle dégringole jusqu'au fond, elle n'existe désormais plus. Paradoxalement, cela la rend encore plus forte et déterminée à en finir une bonne fois pour toutes avec cette créature que la Compagnie est toujours aussi avide d'acquérir à n'importe quel prix.

La poursuite hallucinante dans les tunnels qui compose la fin du film n'est pas toujours évidente à suivre. On est surtout content que les prisonniers connaissent l'endroit assez bien pour s'y retrouver. Sont présents dans cette version quelques meurtres supplémentaires par l'alien, dont un particulièrement beau dans toute son horreur. La fin en soi n'est pas sans rappeler celle de Terminator 2 où le protagoniste se laisse mourir dans une cuve de plomb fondu, un film sorti à peu près au même moment. Mais la comparaison s'arrête là, et on pourra spéculer longtemps sur qui se serait inspiré de qui… 
A noter aussi qu'est absente de cette version les images du chestburster sortant de la poitrine de Ripley, tournées et rajoutées sur ordre expresse du studio, sans doute parce que celui-ci devait se dire que le spectateur lambda avait déjà oublié la raison de ce choix radical de Ripley… 
Et vous l'aurez compris, ce n'est pas l'unique erreur de la production qui devait être complètement dépassée par cette vision pessimiste et cynique, où l'espoir n'est plus permis face à la corruption inévitable des corporations qui contrôleront un jour jusqu'à l'univers entier.

Malgré toutes ces bonnes choses, il faut bien admettre qu'il y en a aussi quelques moins bonnes. Etant donné que le scénario s'écrivait au jour le jour sur le plateau, les faiblesses sont surtout apparentes dans les dialogues, répétitifs à intervalles brefs et parfois même d'un ridicule achevé. Il y a aussi beaucoup trop de flous artistiques, qui avaient fait dire à un critique américain que le film semblait avoir été tourné à travers de la soupe de queue de bœuf ! Effectivement, un bon nombre d'images manquent de clarté, chose que l'on regrette bien sûr. Enfin, et malgré les effets spéciaux assistés par ordinateur en pleine évolution à l'époque, les différences de taille entre la créature en CGI et l'homme en costume sont si flagrants qu'on dirait que ce n'est pas le même animal. Ceci dit, il faut quand même saluer le perfectionnisme légendaire de Fincher, qui s'est investi personnellement pour que l'alien en CGI soit aussi regardable que possible. Il y a même fort à parier que si on lui en laissait l'occasion, il referait tout de A-Z pour enfin pouvoir en être fier.

This is Ripley, last surviving member of the Nostromo. Signing off…



Marija NIELSEN

ALIEN 3 (1992)


Titre français : Alien 3
Titre original : Alien 3
Réalisateur : David Fincher
Scénariste David Giler, Walter Hill, Larry Ferguson
Musique : Elliot Goldenthal
Année : 1992
Pays : Usa
Genre : Extraterrestre, science-fiction
Interdiction : -12 ans
Avec Sigourney Weaver, Charles Dance, Charles S.Dutton, Lance Henriksen...


L'HISTOIRE Le lieutenant Ripley a échappé au carnage sur la planète Archeron. Elle est la seule survivante du crash de la navette sur la planète Fury 161. Toute la planète a été transformée en un immense pénitencier dirigé par Andrews. Les détenus acceptent mal l'arrivée de Ripley qui pressent un danger redoutable auquel seul le médecin Clemens semble croire. Le danger existe bel et bien : un alien est tombé sur la planète avec la capsule de sauvetage de Ripley. Les prisonniers, ainsi que le médecin Clemens sont rapidement attaqués par la créature...


MON AVISDavid Fincher réalise ici une oeuvre absolument magnifique. Ce troisième volet est sans doute le plus glauque, le plus noir, et le plus personnel de la saga. Sa réalisation confine au sublime : musclée, haletante, et spectaculaire. Il n'y a qu'à voir la scène de la poursuite dans les tunnels, la caméra subjective à la place de l'alien, pour s'en assurer. L'alien est plus rapide que dans les deux précédents épisodes et les scènes gores sont bien au rendez-vous. On sent que Fincher se régale, sa caméra, énervée et précise, est tout simplement fascinante.

Ce troisième opus se différencie par l'originalité de son scénario : ceux qui combattent aux côtés de Ripley sont des criminels et non plus des soldats; et le propos nous rappelle qu'à cette époque, le monde n'a pas évolué : la délinquance et la criminalité sont toujours présentes. Une vision qui nous montre donc un monde en régression et non futuriste.

Le côté sombre du film réside principalement dans le caractère même des personnages : ces hommes enfermés sur cette planète, sans arme ni technologie, l'arrivée des scientifiques espoir de salut et qui s'avèrent être l'ennemi. On comprend rapidement qu'il n'y a aucune échappatoire et que le destin de Ripley et de ces quelques hommes est définitivement tracé.

Le jeu des acteurs (tous !) est remarquable. Sigourney Weaver est époustouflante. Crâne rasé, parfaitement musclée, elle incarne le cruel dilemme : vivre (malgré la menace qu'elle porte en elle) ou mourir. C'est une femme libre et décisionnaire, forte et sensible à la fois, femme avant d'être soldat. Et c'est précisément pour cela qu'on l'aime.




Christophe JAKUBOWICZ

ALIEN LE HUITIÈME PASSAGER

 

Titre français : Alien le Huitième Passager
Titre original : Alien
Réalisateur : Ridley Scott
Scénariste Dan O'Bannon, Ronald Shusett
Musique : Jerry Goldsmith
Année : 1979
Pays : Angleterre
Genre : Extraterrestre, science-fiction
Interdiction : -12 ans
Avec Sigourney Weaver, Ian Holm, Harry Dean Stanton, Tom Skerritt, Veronica Cartwright...


L'HISTOIRE Durant son trajet de retour vers la planète Terre, le Nostromo, énorme vaisseau cargo transportant plusieurs millions de tonnes de minerai, reçoit un signal en provenance de la planète LV-426. Aussitôt extrait de sa torpeur cryogénique, l'équipage, composé de sept personnes dont deux femmes, met un certain temps à analyser la situation, avant de comprendre avec stupéfaction qu'il n'est pas arrivé à la destination prévue. Or, le règlement est strict : quand bien même sa nature ne serait pas clairement identifiée, obligation leur est faîte de se rendre à l'origine du signal, ce afin de déceler une éventuelle trace de vie intelligente. Bien que la navette d'exploration atterrisse avec un luxe de précautions, elle doit faire face à quelques dégâts mécaniques ; pendant que les deux techniciens procèdent aux réparations, le capitaine Dallas, Lambert et Kane sortent alors à la surface tourmentée de la planète. Ils découvrent bientôt l'épave d'un vaisseau vraisemblablement crashé, et leur liaison radio et vidéo avec le lieutenant Ellen Ripley et l'officier scientifique Ash est brusquement interrompue. Continuant leur exploration, ils ignorent qu'ils en ramèneront un hôte terrifiant, qui mettra en danger la vie de tous. Mais dans l'espace, personne ne les entendra crier…


MON AVISFin des années 70, un film changeait la face de la science-fiction sur grand écran. Ridley Scott, qui avait fait ses premières armes à la télévision, n'en était alors qu'à son deuxième long-métrage cinéma, après le remarquable mais peu remarqué Duellistes, histoire d'une rivalité tenace opposant deux officiers de l'armée napoléonienne. Inutile de dire qu'en terme d'univers esthétique et de moyens financiers, passer à un projet comme celui de Alien équivalait à sauter plusieurs vitesses d'affilée. Cependant une heureuse alchimie de talents allait donner au réalisateur toute latitude nécessaire pour déployer son génie d'esthète sombre et visionnaire, donnant naissance à un classique S-F de l'angoisse et de l'horreur où la consistance du fond ne cédait rien à la réussite visuelle.

Au scénario, Dan O'Bannon, qui ré-explorait pour l'occasion des idées qu'il avait déjà esquissées pour le film de fin d'étude d'un certain John Carpenter (Dark Star) et ressortait du projet avorté de Jorodowski pour une adaptation de Dune. Dans l'équipe des effets spéciaux, H.R. Giger, qui en plus de certains décors allait tout particulièrement s'occuper de la conception d'un monstre extra-terrestre inoubliable, auquel son nom serait pour toujours associé. Et enfin une poignée d'acteurs, parmi lesquels on trouvait des pointures telles que John Hurt, Harry Dean Stanton, Ian Holm et bien entendu Sigourney Weaver, sans doute loin d'imaginer, alors, qu'elle venait de signer un contrat à vie pour se colleter à l'une des pires créatures de l'histoire du cinéma !

Peu de cinéastes peuvent se targuer d'avoir crée coup sur coup deux films aussi colossaux, aussi denses et complets qu'Alien et Blade Runner. Du détail à l'ensemble, de la technique au sens, du sens aux sensations, deux films qui ont bénéficié d'une attention d'orfèvre, dérivant dans l'imaginaire des cinéphiles comme deux astéroïdes incomparables. Toutefois, là où Blade Runner reste un monument unique et inégalé, Alien a quant à lui inauguré une saga précieuse, véritable aventure spatiale et cinématographique au long cours, sans compter les nombreux ersatz qui ont tenté de le cloner, comme si le film de Ridley Scott contenait lui-même un ADN aux vertus inépuisables. A l'image de sa créature, de ses métamorphoses et de ses métaphores, annoncées par un titre s'affichant lentement par petits bâtonnets chromosomiques, Alien se pose ainsi comme l'œuf originel d'une horreur aux fondements de ténèbres si profonds, si parlants, qu'ils lui assuraient de coloniser à travers le temps, et avec une ductilité redoutable, aussi bien les imaginations des spectateurs que les styles de réalisateurs différents.

La conception originale du monstre lui a procuré sans conteste un impact et une postérité hors du commun. Du facehugger au chestbuster, de l'arachnide bondissant lové dans son œuf à la créature infernale dotée, entre autres, d'épouvantables mâchoires sécrétrices d'où surgit un perforateur turgide et mortel, l'extraterrestre d'Alien est décliné à l'instar d'une espèce animale pourvue d'une technique de prédation et d'un cycle de croissance bien définis, où la biologie la plus évocatrice se marie à la structure et à la dynamique d'une véritable machine de guerre. Ses apparences successives – d'abord l'incubateur tentaculaire, strangulateur, et révélant d'obscènes dessous ; puis l'animalcule défonçant la cage thoracique et poussant des cris d'acier ; et enfin la créature finale, chasseur aux effrayantes facultés de dissimulation et de déplacements silencieux, dont le crâne en ogive, ainsi que la carapace noire, confinent au blindage – tout cela suscite diversement le dégoût, l'angoisse et la terreur, mais aussi la fascination. En mêlant inextricablement pulsion de vie et de mort, attributs primaires du féminin et du masculin, mécanique et animalité, Alien atteint en effet la stature d'une entité mythologique, sorte de Méduse moderne dont la dimension sacrée ne manque pas d'apparaître dans le regard de ses proies terrorisées.

Toutefois l'élaboration de l'inhumain et du monstrueux ne s'en tient pas à cette impressionnante figure prédatrice. Elle se répercute et se lie étroitement avec une technologie qui a déjà commencé à restreindre la part humaine à sa portion congrue. On le voit dès le départ, avec la réception du signal étranger reflété dans un casque inhabité, inquiétant. Le Nostromo, sorte de Léviathan surdimensionné, offre à son maigre équipage un ventre protecteur mais froid et exigeant, dans lequel prolifère, tel un cancer bien ordonné, une mécanique et une électronique complexes, sophistiquées, compartimentées entre des aires de détente pour tous et des lieux de travail spécifiques pour chaque catégorie d'employés (géode d'accès illuminée au logiciel nommé Maman, laboratoire de recherche immaculé, cabine de pilotage sombre, cale des ouvriers poisseuse). Une société technocratique modèle réduit, où il n'est question que de primes, de procédures et de protocoles, le seul trait humain consistant éventuellement… à se plaindre, à se moquer ou à récriminer. Aucune aventure sentimentale ni sexuelle n'est même suggérée, ce qui aurait pourtant été très facile. Mais devant une menace qui fait figure de brusque retour du refoulé, d'autres caractéristiques humaines se manifesteront pourtant (peur, courage, tristesse, lâcheté), au grand dam d'un androïde qui les stigmatisera de façon éloquente, avouant son admiration pour l'alien : Un spécimen qui n'est pas souillé… par la conscience, le remords, les illusions de la moralité. Notons à ce propos que Nostromo est le titre éponyme d'un roman de Joseph Conrad, dans lequel le personnage finissait par se soumettre aux intérêts d'une compagnie minière. Après les Duellistes, adapté d'une nouvelle du même écrivain, Ridley Scott poursuivait donc une enquête humaniste et morale, de plus en plus sombrement teintée, qui allait se poursuivre avec Blade Runner.

Voilà qui demandait encore une invention : celle d'un personnage appelé à devenir récurent, et qui aurait la difficile charge de représenter une humanité qui résiste, non seulement au monstre, mais au consortium stipulant que l'équipage peut être sacrifié au profit de la science, du commerce et des armées. Ce personnage, tout le monde le sait, est une femme. Non pas tant qu'elle représente l'avenir de l'homme, puisque ces derniers… meurent… Et puis, ce ne serait guère original, la science-fiction ayant déjà depuis longtemps repris à son compte l'injonction surréaliste, multipliant comme des petits pains les femmes et leurs enfants sauveurs… Alien ne donne pas dans cet optimisme niais, et c'est au contraire en s'affranchissant de ses dernières illusions sur Maman que le lieutenant Ellen Ripley se sauve elle-même – elle, et un chat. On peut lire également, dans cette émergence d'un caractère pas si en phase que ça avec l'évolution de la société, sinon de façon critique, une remise en cause et une redistribution des valeurs masculines et féminines. Hommes et femmes classiques, si l'on peut dire, restent les dupes de leur propre système et ne peuvent rien contre le terrible hybride symbolique que représente l'alien. A l'inverse, avec son physique à la fois élancé et solidement charpenté, son visage carré aux traits fins, Sigourney Weaver incarne avec force et intelligence une androgynie efficace des qualités humaines (esprit d'analyse et de critique, sensibilité et contrôle de soi, capacité d'autorité et d'indépendance, prise de décision et passage à l'action, peur et courage), là où une Lambert, par exemple, se cantonne dans un pathos qui signera son arrêt de mort. Un sujet qui trouverait des illustrations différentes avec James Cameron, David Fincher ou Jean-Pierre Jeunet, mais qui allait être une constante de la saga.

Mais l'invention macabre et la richesse thématique seraient impuissantes en elles-mêmes à faire un bon film, si elles ne s'inscrivaient pas dans une esthétique et une mise en scène à la hauteur du sujet. Et là encore, on peut dire qu'Alien et Blade Runner forme un doublet prestigieux. Alliant une richesse plastique sans précédent et une orchestration dramatique prenante, ils dépassent aussi bien la pure contemplation métaphysique d'un "2001 l'odyssée de l'espace" que le divertissement trépident des Star Wars. La conception d'ensemble des décors, des éclairages et des ombres (véritable matière chez Scott), jusqu'aux moindres petits détails, contribue à donner une épaisseur concrète à ces lieux futuristes, qui ne sont pas simplement là pour nous en mettre plein la vue, mais pour emprisonner le spectateur dans une réalité nouvelle, aux atmosphères différentes et palpables. Les bruitages et la musique sont également de la partie, Jerry Goldsmith intégrant dans ses partitions des sons étranges tandis que les borborygmes des consoles, les chuintements des portes ou des respirateurs, le souffle des vents violents ou des lance-flammes, etc., créent d'eux-mêmes une texture musicale omniprésente et stressante, qui achèvera d'exploser dans les cris inarticulés et les sonneries d'alarmes. Car tout s'organise dans Alien avec un art aigu de la progression, le cinéaste ayant opté pour un climax absolument parfait, véritable Boléro de l'angoisse.

A cet effet, Ridley Scott prend le parti pris osé de commencer avec une lenteur extrême, dans un silence quasi-total, la petite mélodie de Jerry Goldsmith et les bruitages suffisant à distiller insidieusement au spectateur une sorte d'inquiet recueillement. C'est sur cette base désertique, Grand Espace et Vaisseau Fantôme, que le moindre événement prend aussitôt une dimension alarmante, sécrétant de brèves et brusques montées de stress. La suite ne démentira pas ce procédé, alternant plages de développement et fausses accalmies avec des irruptions surprenantes qui font dresser les cheveux sur la tête ou qui prennent à la gorge. A chaque stade de la croissance de l'alien, à chacune de ses attaques, Scott joue avec maestria de l'observation partielle ou plus approfondie, du silence ou du vacarme (en passant par le bruitage d'un battement de cœur aussi simple qu'efficace), dans un jeu de cache-cache qui nous empêche à chaque fois de nous rassurer en croyant avoir pris pleine mesure du monstre et des horreurs qu'il inflige. Ainsi l'éprouvante scène du repas, sans la moindre musique, peut tout montrer crûment, elle ne sera d'aucune aide pour la suite, où les morts sont filmées à chaque fois d'une façon qui frustre le regard et augmente d'autant la panique (montage ultrarapide d'inserts gores, surgissement, prises de vues périphériques ou carrément élimination de l'image au profit des cris suppliciés). Un art extraordinaire du suspens, de la suggestion et du dévoilement, qui culminera dans la dernière scène, à travers le regard d'une Ripley dont les ressources auront été singulièrement mises à nues !

Pour toutes ces raisons, Alien, le Huitième Passager constitue dans le paysage cinématographique ce qu'on peut appeler un coup de maître, et ses qualités lui ont valu, à juste titre, une réputation qui dépasse largement le cercle des fans de genre pur et dur. Espérons qu'il demeurera toujours une référence, un signal inextinguible à l'égard d'une industrie qui oublie trop souvent qu'elle peut produire de véritables œuvres d'art.




Stéphane JOLIVET