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APPELS AU MEURTRE (1981)

 

Titre français : Appels au meurtre
Titre original : Eyes of a Stranger
Réalisateur : Ken Wiederhorn
Scénariste : Eric L. Bloom, Ron Kurz
Musique : Richard Einhorn
Année : 1981
Pays : Usa
Genre : Tueurs fous
Interdiction : -12 ans
Avec : Lauren Tewes, Jennifer Jason Leigh, John Disanti, Peter Dupre, Gwen Lewis...


L'HISTOIRE : Miami, USA. Jane et sa sœur aveugle et sourde suite à une expérience traumatisante, vivent dans un immeuble du centre-ville. Pendant ce temps, un psychopathe menace des jeunes femmes au téléphone. Obscène, il les menace avant d’aller les violer et les tuer. Jane, journaliste dans une télévision locale, couvre l’affaire. Fouineuse, elle remarque le drôle de manège d’un de ses voisins dans le parking souterrain de son propre immeuble. Elle va alors l’espionner et ainsi jouer un jeu dangereux, convaincu que c’est bien lui le coupable. Elle a alors l'idée de le menacer à son tour au téléphone...


MON AVIS Contrairement à ce que l’on peut lire ici ou là sur ce film, nous n’avons pas ici affaire à un slasher, hormis une introduction - une tête tranchée qui termine sa course dans un aquarium - qui n’a apparemment pour autre but que de se soumettre à la mode d’un genre alors en plein boum avec le succès de Vendredi 13 l’année précédente. Mais à part cette ouverture donc, Appels au meurtre est un pur thriller mettant en scène un tueur fou, très proche dans son ambiance et son mode de fonctionnement de Meurtre au 43 ème étage de John Carpenter (1977). On pense aussi bien évidemment à «Seule dans la nuit de Terence Young (1967) et également au Black Christmas de Bob Clark (1974) pour ses appels téléphoniques à répétitions.

Ken Wiederhorn, le réalisateur, est avant tout connu pour deux long-métrages, le sympathique Le Commando des Morts Vivants (1977) et le plus suspect Le retour des Morts Vivants 2 (1988), Curieusement si les deux films suscités sont plus ou moins resté dans les mémoires des amateurs, il n’en est rien pour ce Appels au Meurtre alors qu’il a d’indéniables qualités (et des défauts aussi).

Sur un scénario co-signé de Ron Kurz (qui a commis ceux des quatre premiers Vendredi 13, c’est dire la pointure), la mise en place des personnages et des enjeux s’avèrent rapides et efficaces et ne perd pas de temps en salamalecs inutiles. Si on sait rapidement qui est le tueur, on ne saura jamais pourquoi il est à ce point misogyne, on évite donc l’analyse Freudienne, Jungienne ou Lacanienne de bas étage qui abonde lorsqu’il s’agit de donner un sens aux actes de l’assassin dans ce type d’œuvres. Pas de séquences où l’on découvre que notre ami le tueur se met à violer des femmes, car il aurait vu son père insérer un sex-toy dans l’antre de sa môman et que du coup toute les femmes sont des salopes et patati et patata. Si c’est votre came, changez de crèmerie.

Non, l’intrigue se ressert rapidement sur le fait de savoir si Jane va mettre des bâtons dans les roues du fondu du ciboulot et si de son côté ce dernier va découvrir qui l’a découvert. Bon an, mal an, clopin-clopant, le scénario se déroule sans réel accroc, mais aussi sans réel séquences qui rentreront dans les annales. Faiblesse du budget oblige, l’histoire se déroule quasi-exclusivement dans quelques appartements, un studio télé reconstitué et un parking souterrain. Si cela permet d’accroître la tension des nombreux huis clos, cela dessert aussi pas mal le renouvellement de l’action. 

Sans être une merveille, il est quand même curieux que ce long-métrage soit tombé dans l’oubli alors qu’il en vaut bien un autre et qu’il est largement plus réussi que la flopée de mauvais films sortis au tout début des 80’s. Surtout que l’on peut y croiser la déjà délicieuse Jennifer Jason Leigh (avant qu’elle se refasse faire la poitrine, mais ça c’est juste pour dire une petite méchanceté qui n’honore pas son auteur cependant) qui promènera son doux minois dans La chair et le Sang, ExistenZ, Dolores Clairborne ou encore The Machinist. Et ma foi pour son premier vrai rôle au cinéma, elle est tout à fait crédible.

On n’en dira pas autant de son alter ego Lauren Tewes. Tout brushing dehors, elle s’en sort certes avec les honneurs, mais pour tous les gens de ma génération, Lauren restera à jamais et ce jusqu’à la nuit des temps la Julie de La croisière s’amuseEt pour le coup, on a bien du mal à croire à son rôle de journaliste traquant un sérial-killer. C’est bien simple, on a à chaque fois l’impression que le capitaine Stubing va se pointer pour lui chanter la chanson du générique ou qu’Isaac le barman va lui faire un cocktail...




Lionel JACQUET

ANTIBODIES (2005)

 

Titre français : Antibodies
Titre original : Antikörper
Réalisateur : Christian Alvart
Scénariste : Christian Alvart
Musique : Michl Britsch
Année : 2005
Pays : Allemagne
Genre : Thriller, Tueurs fous
Interdiction : -12 ans
Avec : Wotan Wilke Morhing, André Hennicke, Norman Reedus, Christian Von Aster...


L'HISTOIRE : Gabriel Engel, tueur en série, est enfin arrêté et accusé de 14 meurtres d'enfants. En apprenant la nouvelle, Michael Martens, policier de campagne ayant quelques difficultés de couple et d'éducation, notamment avec son fils Christian, voit une occasion de faire enfin la lumière sur l'affaire qu'il traite depuis plus d'un an et demi, l'assassinat de la jeune Lucia Flieder. Son enquête lui vaut une certaine antipathie de la part des habitants de son village, puisque pour Michael, ils sont tous suspects. Il part donc pour la ville afin d'interroger Gabriel Engel…  


MON AVISChristian Alvart réalise avec Antibodies son second long-métrage, le premier datant de 1999 et se titrant Curiosity & the Cat, qui lorgnait déjà du côté du thriller. Jouer avec le suspense, Christian Alvart adore ça. Il le dit d'ailleurs lui-même : Nous avons tous une approche différente du cinéma. Certains aiment le cinéma parce qu'il nous transporte dans des univers différents, d'autres veulent vivre des histoires d'amour... De toutes les émotions offertes par le cinéma, le "suspense" m'est toujours apparu comme la plus fascinante. Il n'y a rien de comparable à l'attente fébrile du spectateur sur son siège, croisant les doigts pour que tout se passe bien pour les héros - tout en craignant le pire. De bien bonnes paroles mais qu'en est-il du résultat ?

Antibodies, une fois sa vision terminée, souffre de la comparaison avec le classique du genre qu'est Le Silence des Agneaux. En effet, les références au film de Jonathan Demme sont légion, et le principe même de la relation qui va se nouer entre Michael Martens et le sérial killer Gabriel Engel renvoie directement à la relation qui s'était établie entre Clarice Sterling et Hannibal Lecter. D'ailleurs, cette relation est quasi identique dans la façon de la traiter, puisqu'on assiste à des rencontres entre le policier et le tueur se déroulant en prison, ce dernier étant également maintenu derrière une fenêtre de verre. Mais attention, qu'on ne s'y trompe pas : Christian Alvart n'a pas pompé le film de Demme, il lui rend juste hommage, hommage résumé dans une seule phrase de Gabriel Engel, qui lance à Martens lors de leur première rencontre un tu croyais voir Hannibal Lecter ? qui fait mouche chez le spectateur. On retrouve également chez Gabriel Engel la perversité de Lecter, car il désire aussi en savoir plus sur Martens, en lui posant des questions insidieuses, le mettant face à lui-même et à son côté obscur.

Le côté obscur, voici l'essence même d'Antibodies. Le réalisateur a l'intelligence de ne pas nous proposer un univers manichéen, ou Engel est le mal et Martens le bien. Non, ce serait bien trop simple et guère passionnant. En ce qui concerne le mal, point de doute, Gabriel Engel en est l'incarnation, n'hésitant pas à violer, tuer des enfants, ni à se masturber devant un policier lorsqu'il lui raconte ses méfaits envers un petit garçon. L'acteur André Hennicke porte littéralement sur ses épaules le personnage du serial killer. Son visage dur, sur lequel quasiment aucun sentiment ne vient se dessiner, est vraiment le point fort du film. Bien sûr, comparé à l'interprétation d'Anthony Hopkins pour le rôle de Lecter, Hennicke en est encore très loin, mais quand même, c'est vraiment le personnage qui marque nos mémoires une fois le film fini. Comment oublier la scène d'introduction, nous présentant un serial killer artiste peintre, peignant ses toiles totalement nu, avec du sang humain prélevé directement sur ses victimes ? Une première scène très efficace, dérangeante et qui laisse présager d'une ambiance sombre et dure.

Côté bien, on a donc Michael Martens, ce brave flic de campagne, qui tente d'être un père exemplaire, mais qui a des problèmes de couple et surtout pas mal de soucis avec son fils de quinze ans. Ce dernier, très renfermé sur lui-même, fait parfois encore pipi au lit, s'amuse à mettre le feu à la chambre de sa sœur pour lui faire peur. Un comportement étrange, parfois dangereux, qui a commencé à se manifester le jour de la mort de la jeune Lucia, qui était son amie. Martens tente de faire son possible pour résoudre cette affaire de meurtre, mettant sa famille à l'écart pour mener à bien son enquête. On pense vraiment que c'est un personnage modèle, notamment quand son collègue de travail l'emmène dans un bar à strip-tease et qu'il refuse les avances d'une hôtesse. Pourtant, la ligne qui sépare le bien du côté obscur est très fine et Martens va finir par y succomber. La fragilité du personnage nous apparaît rapidement, on sait qu'il ne pourra pas rester toujours blanc et qu'à un moment ou à un autre, son apparente pureté va noircir. Une fragilité bien comprise par Gabriel Engel, qui va en jouer, tel un chat avec une souris, pour l'entraîner dans une spirale infernale, où la découverte de l'identité supposée du meurtrier de Lucia sera le point culminant.

Cette révélation, qu'on peut aisément deviner si on écoute bien les propos d'Engel à Martens lors de leurs différentes rencontres, donne au film un petit côté glauque et malsain plutôt bienvenu. Dommage alors que toute cette ambiance installée depuis le début ne vienne sombrer dans un happy-end qu'on aurait souhaité éviter. Pourquoi le réalisateur n'a pas été au bout de son idée et a préféré nous faire un retournement de situation ? J'aurai tellement aimé que tout le cheminement amenant au meurtre de Lucia se passe vraiment comme on nous le raconte…

A la manière des films allemands récents comme Anatomie par exemple, Antibodies est filmé de manière froide, ce qui fait qu'on reconnaît immédiatement l'origine géographique du métrage. Christian Alvart s'est bien investi dans son film, mais à l'arrivée, il manque quand même un petit quelque chose pour en faire un thriller de référence. Un peu plus d'action, un peu plus de suspense, un peu plus d'originalité aussi. Antibodies se laisse regarder tranquillement et ne parvient pas à nous faire frissonner, bien que la tension augmente vers la fin. N'hésitez pas à le regarder et à vous faire votre propre avis, il serait quand même dommage de rater cette rencontre avec l'Ange Gabriel…




Stéphane ERBISTI

ANGOISSE (1987)

 

Titre français : Angoisse
Titre original : Anguish
Réalisateur : Bigas Luna
Scénariste : Bigas Luna, Michael Berlin
Musique : José Manuel Pagan
Année : 1987
Pays : Espagne
Genre : Tueurs fous
Interdiction : /
Avec : Zelda Rubinstein, Michael Lerner, Talia Paul, Angel Jovè, Clara Pastor...


L'HISTOIRE : John devient progressivement aveugle. Sa vieille mère tente de l'aider en utilisant ses pouvoirs hypnotiques sur son fils. Pleine de haine, elle pousse John à tuer et à s'emparer des yeux de ses victimes. Travaillant dans un hôpital, John se rend chez une de ses patientes pour changer ses lentilles. Pendant ce temps, dans la salle de cinéma, des spectateurs assistent à cet effrayant film. Parmi l'assistance, deux lycéennes, dont l'une est particulièrement sous le choc. D'autant plus que John se rend au même moment dans une salle de cinéma...


MON AVISPour son unique incursion dans l'horreur, Bigas Luna frappe fort. Culotté de placer l'action de son film dans une salle de cinéma en jouant sur l'aspect du film dans le film. Ce qui rend Angoisse très interactif et ludique dans sa manière de manipuler nos sentiments. On devient de plus en plus mal à l'aise avec le déroulement de l'intrigue.

Premier acte : Une impression de film hitchcockien plane sur la partie ou Alice Pressman (la mère de John) mène son fils dans la direction qu'elle souhaite. Un pouvoir maternel des plus envahissants. Des réminiscences de Psychose à la différence qu'ici, la mère au pouvoir étouffant et castratrice est bien réelle. La détresse de John se lit dans le regard de ce dernier, comme si une malédiction voulait qu'il s'empare des yeux des autres. 

Les autres justement. Des personnages odieux, qui sont sans cesse en train de s'en prendre à son infirmité. Vraiment angoissante, la première demi-heure nous révèle le rôle de sa vie pour Zelda Rubinstein, plus connue des amateurs de fantastique pour sa participation à Poltergeist. Un seul mot qualifie son interprétation : prodigieuse !

Second acte : La caméra de Bigas Luna nous dévoile maintenant une salle. Tout ce que nous avions vu jusqu'à présent n'était rien d'autre qu'un film. Plus centré sur deux jeunes spectatrices, c'est là que l'interaction entre deux films différents atteint son paroxysme. Devant l'atrocité des énucléations, l'une des jeunes lycéennes, se sent de plus en plus mal, détournant son regard de l'écran. Les scènes d'hypnotisme d'Alice Pressman sont assez impressionnantes, bien qu'à mon goût un poil trop appuyées. Bigas Luna aurait gagné à en réduire la durée, plutôt que de donner l'impression de faire du remplissage. Assurément des séquences impressionnantes qui doivent donner des sueurs froides, lorsque visionnées dans une salle de cinéma.

Troisième acte : l'arrivée de John dans une salle de ciné pour perpétrer ses crimes accentue le malaise. Le passage de son histoire à ce qui se déroule dans la véritable salle donne le tournis. Au point qu'à partir d'un moment, il est plutôt difficile de discerner la fiction de la réalité. La plus sensible des lycéennes pressent alors un danger. Elle n'a pas tort. Un individu fasciné par le film, dont il connaît les répliques par cœur, a bien l'intention de commettre des meurtres. Se prenant pour John, sauf qu'à la différence de ce dernier, il est armé d'un revolver. Ses meurtres moins horrifiques n'en sont pas moins d'une redoutable efficacité. Mais, en tant qu'amateur d'horreur pure et dure, on aurait préféré qu'il plagie le tueur virtuel jusqu'à s'équiper d'un bistouris.

Le scénario pose ici le problème de l'influence des films sur les esprits faibles. Autant pour la jeune fille qui en a des malaises, que pour l'individu devenu meurtrier à force de voir et de revoir le même film. Flippant. Une interrogation dérangeante qui n'a pas fini de faire couler beaucoup d'encre. En tant qu'artiste, Luna pense que l'Art peux influer sur le quotidien de gens ordinaires. Donc, le cinéma serait plus qu'un spectacle, et certains films atteindraient le statut d'Art. Un thème qu'on trouve dans Le Syndrome de Stendhal de Dario Argento.

Dérangeant et angoissant, Angoisse, est un film chaudement recommandé pour les amateurs de sensations fortes. Et, pour constater aussi à quel point Scream 2 lui doit beaucoup, notamment pour sa sublime scène d'introduction. Angoisse, un titre vraiment bien choisi.




Gérald GIACOMINI

AMOKLAUF (1994)

 

Titre français : Amoklauf
Titre original : Amoklauf
Réalisateur : Uwe Boll
Scénariste Uwe Boll
Musique : Uwe Spies
Année : 1994
Pays : Allemagne
Genre : Tueurs fous, trash
Interdiction : -16 ans
Avec Martin Armknecht, Christian Kahrmann, Susanne Leutenegger, 
Michael Rasmussen...


L'HISTOIRE : Un homme isolé du monde épuise son quotidien en travaillant le jour comme serveur et en passant son temps libre le soir devant l'émission Les Visages de la mort et quelques films pornographiques. C'est son seul moyen d'évasion et de pouvoir. Intérieurement, la crise de nerfs guette. Un jour, il pète les plombs, tue sa voisine avec un couteau et commence un massacre d'une sauvagerie inouïe...


MON AVISMesdames, mesdemoiselles, messieurs, sous vos yeux ébahis je vais à présent effectuer une cascade extrêmement dangereuse. Rien que pour vous, je vais réaliser la critique de l’un des premiers films d’Uwe Boll.

Avant sa frénésie d'adaptations de jeux vidéo, Uwe Boll a aussi fait des vrais films. Des films, certes bourrés d'imperfections et de scories en tous genres, mais des films touchants. Pour un peu le terme film d'auteur m'aurait presque échappé. Allons, soyons fous : Amoklauf est un film d'auteur.

Uwe Boll est connu, non pas pour ses talents de cinéaste, mais plutôt pour les polémiques qu'il déclenche. En effet, lorsque le nom de Uwe Boll est prononcé, la communauté de cinéphiles se scinde en deux. D'un côté, ceux qui pensent qu'il n'est qu'un infâme grouillot juste bon à torpiller des franchises vidéo ludiques. De l'autre côté, ceux qui pensent qu'il est un honnête artisan du septième Art. Afin que vous puissiez envisager mes propos avec le recul nécessaire, sachez qu'à mon sens la seule création intéressante du teuton est Postal. Ceci étant dit, je vous propose de me suivre dans l'univers de Amoklauf.

Le titre à lui seul annonce la couleur. En effet amoklauf en allemand, se traduit par folie meurtrière. Le scénario de Amoklauf se réduit à bien peu de choses : les actions du personnage principal sont désespérément limitées, il passe le plus clair de son temps à regarder des cassettes vidéo. Alors qu'une personne normalement constituée aurait enregistré des films, lui a conservé des émissions (dont l'une est une sorte de Juste prix) et des retransmissions de mises à mort. Ces scènes macabres sont tout droits sorties de Face a la Mort.

Pour le reste, le tueur en série sort deux fois de chez lui et tue trois fois, dont l'une sans sortir de chez lui. Si Amoklauf n'est pas exactement un huis clos, il s'en approche tout de même puisque la majeure partie du film se déroule dans un appartement. Mieux (ou pire), la majeure partie du film est un plan fixe d'une télévision (allumée, heureusement). Ajoutez à cela la répétition de plans jusqu'à épuisement de la rétine (la même action - ou non-action en l’occurrence - est passée et repassée plusieurs fois d'affilé).

Les enjeux scénaristiques sont donc proches du néant. On ne se demande jamais, ni comment, ni pourquoi, ni rien. Tout ce qui arrive à l'écran est servi avec froideur. La réalisation s'avère à ce titre diablement spartiate. Malgré toute sa bonne volonté à tenter de se loger une ogive nucléaire dans le pied à bout portant, Uwe Boll échoue lamentablement. Son film est parfaitement regardable.

Chose suffisamment rare dans la filmographie d'Uwe Boll pour être remarquée, Amoklauf dispose d'une véritable personnalité. A aucun moment l'impression de regarder un produit lisse et formaté ne dérange le spectateur. Bien au contraire. C’est un peu le deuxième effet kiss cool que nous assène monsieur Boll. Il ne se passe rien, et puis lentement, de manière lancinante, un malaise s’installe chez le spectateur.

Le fait de pénétrer l’intimité d’un serial-killer, fût-elle incroyablement ennuyante, s’avère d’une extrême lourdeur. Pas moyen d’échapper au poisseux, au sordide de ce quotidien malsain. Difficile donc de ne pas penser au Schramm de Buttgereit. Les deux allemands n’ont pas en commun que leur nationalité. Avec Amoklauf, Boll s’est engouffré sur les traces de Buttgereit en revendiquant un cinéma d’une noirceur totale. Aucune concession n’est faite, et le personnage est filmé dans toute son abjecte crudité. Sa solitude et son penchant pour le tube cathodique ne faisant qu’amplifier le mal être.

Mais le nihilisme d’Amoklauf n’a pas fait long feu. Probablement Uwe Boll s’est-il aperçu qu’il y avait bien plus d’argent à se faire en massacrant des franchises vidéo ludiques. Pour cela il lui a suffit de s’insérer dans le créneau suffisamment tôt. Et depuis qu'il a mis une pièce dans la machine, il a les continues illimités. Mais je digresse. Et digresse, c’est beaucoup pour un seul homme.

Quoi qu’il en soit, Amoklauf se révèle d’une profondeur rare. Bien qu’il ne raconte pas grand-chose, il réussit à étaler une large palette de sentiments. Remercions donc monsieur Boll de ne pas nous embarquer dans une leçon de psychologie de comptoir. Ainsi, le film revêt une atmosphère poignante, sans ronds de jambes cinématographiques. Pour sûr, l'expérience ne plaira pas à tout le monde, mais elle vaut véritablement le détour. Amoklauf, un film imparfait, mais qui révèle l'artisan passionné qu'est le cinéaste teuton.




Colin VETTIER

AMERICAN MARY (2012)

 

Titre français : American Mary
Titre original : American Mary
Réalisateur : Jen Soska, Sylvia Soska
Scénariste Jen Soska, Sylvia Soska
Musique : Peter Allen
Année : 2012
Pays : Canada
Genre : Tueurs fous
Interdiction : -16 ans
Avec Katharine Isabelle, Antonio Cupo, Tristan Risk, David Lovgren, Paula Lindberg...


L'HISTOIRE : Mary est une brillante étudiante en médecine, mais elle est aussi fauchée. Afin de pouvoir payer ses factures, elle tente de se faire engager dans un club de danseuses. Sur place, on lui offre un gros montant d’argent, en échange de ses services de chirurgienne. C’est alors qu’elle est entraînée dans le domaine de la transformation corporelle et de la médecine clandestine... 


MON AVISLes jumelles Soska sont deux jeunes réalisatrices canadiennes passionnées par le cinéma d’horreur. Elles ont l’habitude de travailler ensemble, et American Mary est leur deuxième long-métrage (le premier est Dead Hooker in a Trunk de 2009). Elles ne sont pas que derrière la caméra, puisqu’elles se sont offertes le rôle des jumelles désirant une transformation extrême.

La réalisation des sœurs Soska est aussi précise qu’un travail de chirurgie ! Rien en trop, rien en moins. Ce thriller horrifique nous amène dans un univers particulièrement underground, peu connu, soit le monde du body transformation où toutes les folies sont permises. Esthétique, stylisé, glauque et sadique, le film ne s‘appuie pas sur les scènes gores, bien qu‘il y en ait, mais plutôt sur la tension, maintenue brillamment tout le long du métrage.

Le choix du casting s’avère aussi très efficace. Katharine Isabelle, bien connue pour son rôle de Ginger dans la saga Ginger Snaps, transcende l‘écran. Elle porte le film du début à la fin. De simple étudiante fauchée à boucher, froide, sans concession, Mary s’enfonce, et Katharine Isabelle lui donne vie. On est loin de l’adolescente de Freddy contre Jason, elle a pris beaucoup de maturité.

American Mary a fait sensation dans divers festivals. Il a remporté plus d‘une vingtaine de prix, dont souvent la meilleure réalisation, meilleur film, meilleure actrice, les meilleurs maquillages et directeur de la photographie. Même en France, à La Samain du Cinéma Fantastique, elles ont remporté le prix de la meilleure réalisation. Les sœurs Soska ont misé juste : American Mary est tout simplement une réussite.




Sarah GILBERT

AMERICAN GOTHIC (1987)

 

Titre français : American Gothic
Titre original : American Gothic
Réalisateur : John Hough
Scénariste Burt Wetanson, Michael Vines
Musique Alan Parker
Année : 1987
Pays : Canada, Angleterre
Genre : Tueurs fous
Interdiction : -12 ans
Avec Rod Steiger, Yvonne de Carlo, Michel J. Pollard, Fiona Hutchinson...


L'HISTOIRE : Suite à la mort accidentelle de leur enfant, Cynthia est emmenée en vacances par son petit ami, Jeff. Accompagnés par des amis, ils voyagent à bord d'un petit avion mais à cause d'un incident technique, ils sont contraints de se poser sur une île d'apparence déserte. Mais l'endroit s'avère habité par une famille particulière pour qui le temps est resté bloqué en 1920. Le vernis amical de leur accueil craque peu à peu et finit par livrer le plus terrible des secrets de famille…


MON AVISA première vue, American Gothic ressemble à n'importe quel slasher convenu, mais il n'en est rien. Tout comme l'amabilité de la famille habitant cette île, le début un peu long et fait de clichés n'est qu'une façade. Mais dès que la bande de jeunes rencontre Ma et Pa et leurs trois rejetons, un climat étrange s'installe et on se dit qu'on laissera le bouton avance rapide tranquille. Et on fait bien parce que nous plongeons ensuite dans l'ambiance oppressante qui imprègne ces lieux depuis des années en se demandant si elle n'émane pas de la famille elle-même, ayant été absorbée par les murs pour ensuite contaminer tous ceux qui s'en approchent, voire même les attirer.

Ma et Pa ont trois enfants adultes, Fanny, Teddy et Woody. Ceux-ci se comportent comme les enfants que leurs parents voient encore en eux, alors qu'ils ont la cinquantaine facile. Fanny s'habille avec des petites robes roses et porte des couettes, Woody joue à la balançoire et Teddy entraîne tout le monde dans un jeu d'indiens et de cow-boys qui, comme les autres amusements, n'est qu'un prétexte pour laisser libre cours à l'adulte refoulé qui sommeille en eux, et qui se manifeste par des pulsions meurtrières.

Petit à petit, l'histoire de cette étrange famille se dévoile et on réalise que Fanny est loin d'être aussi simple qu'elle en donne l'air, ayant déjà séduit ses deux frères, et on se demande alors raisonnablement ce qui a pu se passer avec son père. Ce dernier est interprété avec brio par un Rod Steiger des plus inquiétants, dont toute la perversité est démontrée lors d'une scène surréaliste. Woody viole une des filles de la bande et sera puni sévèrement par son père pour cette agression s'étant déroulée hors de la famille. Durant cette scène qui met extrêmement mal à l'aise, on remarque que Cynthia se transforme peu à peu. Elle n'était déjà pas en état de faire face à la mort de son enfant, alors toute cette violence n'arrange en rien les choses. Elle se rapproche doucement de Fanny qui lui a déjà présenté son bébé à elle (que je préfère vous laisser découvrir par vous-mêmes…) et semblera aux anges d'avoir trouvé une nouvelle copine. Le climax sera atteint le jour où ils fêteront les 12 ans de Fanny et que Cynthia sera présentée avec une surprise des plus inattendues…

La dualité des personnages des enfants-adultes est le plus présent chez Fanny dont le côté mère castratrice domine complètement ses frères. On se demande même par moments si elle n'aurait pas remplacé sa propre mère sinon physiquement, du moins par sa présence. Quelques allusions à peine voilées de Pa sont particulièrement convaincantes en ce sens et l'origine du bébé de Fanny prend une toute autre signification. Et lorsque Pa avoue à ses hôtes qu'il garde sa famille isolée ici afin de les protéger du monde extérieur, la menace sous-jacente qui se tenait dans l'ombre jusque là devient tout à coup effroyablement réelle.

Cette histoire d'une famille de tueurs dégénérés est particulièrement bien racontée, même si l'hémoglobine ne coule pas à flots. Je recommande ce film de John Hough, décidément un réalisateur très intéressant !



Marija NIELSEN

ALONE IN THE DARK (1982)

 

Titre français : Alone in the Dark
Titre original : Alone in the Dark
Réalisateur : Jack Sholder
Scénariste Robert Shaye, Jack Sholder, Michel Harrpster
Musique Renato Serio
Année : 1982
Pays : Usa
Genre : Tueurs fous
Interdiction : -16 ans
Avec Jack Palance, Donald Pleasance, Martin Landau, Dwight Schultz...


L'HISTOIRE : Le docteur Potter s'installe avec sa femme et sa petite fille dans une agréable petite ville. Il décroche un poste à l'asile de la région, où il se heurte à quatre détenus, persuadés que Potter a tué leur docteur habituel. Lors d'une coupure de courant, ils vont pouvoir s'enfuir et semer la terreur dans la ville…


MON AVISAlone in the Dark fait partie des séries B horrifiques comme Les Griffes de la Nuit ou Critters qui ont permis à la firme New Line de construire sa renommée. Tout comme Massacres dans le Train Fantôme, Alone in the Dark fait partie des excellents films de tueurs fous du début des années 80. Car on ne peut pas vraiment parler de slasher dans le cas du film de Jack Sholder. On est étonné d'abord par l'étonnant trio du film, à savoir Jack Palance, Martin Landau et Donald Pleasance, ici dans des rôles bien allumés. Tant mieux en tout cas, comme dirait certains.

Laissant les malades déambuler dans leur environnement (Dan tombera sur une fausse secrétaire), Bain, le directeur de l'établissement, surveille de très près un groupe d'assassins que Dan décide de prendre en charge. Quatre meurtriers qui ne rêvent que de s'échapper et de l'éliminer. Parmi ces quatre détenus, une colonel fou, un ancien prêtre pyromane, un violeur de gamines et un mystérieux tueur surnommé le saigneur, refusant de montrer son visage et saignant du nez lorsqu'il tue une victime. Une nuit, une coupure de courant s'abat sur la ville, réduisant à néant le système de sécurité entièrement électrique de l'asile. Enfin libres, les quatre psychopathes vont déambuler dans la ville à la recherche de victimes mais surtout, pour tuer Dan Potter et sa famille. C'est lors d'une nuit de cauchemar, que la famille Potter va devoir affronter les horribles tueurs. Un pitch drôlement réussi pour un film versant volontiers dans un huis clos style La Nuit des Morts Vivants.

On le sait, Jack Sholder est capable du meilleur (Hidden) comme du pire (Wishmaster 2 et La revanche de Freddy, non merci !). Avec Alone in the Dark il signe une excellente série B horrifique malheureusement très vite oubliée. Le scénario en lui-même est vraiment bien ficelé, Sholder n'hésitant pas à faire monter la tension d'un cran comme dans la scène où la petite fille de Dan se retrouve sans le savoir avec l'assassin pédophile, ou l'apparition inattendue (et onirique) d'un zombie. L'un des principaux intérêts du film est l'utilisation de l'obscurité, ici synonyme de peur et de terreur totale. Ainsi l'une des protagonistes verra son ancienne peur du noir revenir brutalement, la rendant de plus en plus vulnérable. On retrouve aussi l'idée du monstre caché sous le lit ou dans le placard avec les tueurs se cachant justement aux endroits pré-cités. Dans une scène hallucinante, l'une des victime se retrouve piégée sur son lit, le tueur se cachant en dessous du matelas et faisant ressortir la lame de son couteau à n'importe quel endroit, obligeant la victime à être constamment sur ses gardes. Un très grand moment.

Les meurtres, eux, ne jouent pas vraiment la carte de l'originalité mais restent efficaces. Le film n'est donc pas vraiment un slasher mais il y ressemble par moments comme avec ces deux ados fornicateurs qui finiront bien sûr entre les mains expertes des tueurs. Le temps d'une scène, Sholder offre un clin d'œil amusant (ou une idée plagiée ?) à Vendredi 13 lorsque le saigneur se met à porter un masque de hockey. La fin, tout comme beaucoup de films d'horreur de cette époque, nous annonce que la terreur est loin d'être terminée mais dans un style fin ouverte bien plus intéressant que l'habituel sursaut du tueur pas tout à fait mort qui revient. Les acteurs sont vraiment bons et Sholder signe là une véritable curiosité. Sans pour autant être une révolution ou un chef-d'œuvre, Alone in the Dark est une excellente surprise dans le sillage des films de tueurs fous 80's.




Jérémie MARCHETTI

ALLELUIA (2014)

 

Titre français : Alleluia
Titre original : Alleluia
Réalisateur : Fabrice du Welz
Scénariste Fabrice du Welz, Vincent Tavier
Musique Vincent Cahay
Année : 2014
Pays : France, Belgique
Genre : Tueurs fous
Interdiction : -12 ans
Avec Stéphane Bissot, Lola Dueñas, Édith Le Merdy, Anne-Marie Loop, Héléna Noguerra...


L'HISTOIRE : Michel, un quadra un peu paumé, mais diablement séduisant assure sa subsistance en mettant la main sur les économies de femmes qui tombent sous son charme. C’est un prédateur. Au mieux, il les dépouille. Au pire, il les trucide et s’en va avec l’argent. Lorsque sa route croise celle de Gloria, c’est le choc. La flamboyante Ibère, qui a perdu ses marques au fil d’une existence triste, tombe raide dingue amoureuse de ce beau passant qu’elle ne va plus lâcher. Commence alors une incroyable odyssée sanglante où les deux amants qui se présentent comme une fratrie vont s’enfoncer dans la folie furieuse...


MON AVISMauvais cauchemar sans fin, croisement improbable et tordu entre Massacre à la Tronçonneuse, l'émission Strip Tease et le magazine Fluide Glacial, Calvaire avait été une sacré surprise en son temps, révélant un auteur mordant, esthète dérangé et incommodant. Si Vinyan semblait être un détour (tout aussi marquant par ailleurs), c'était sans doute pour mieux retrouver les terres déjà foulées dans Calvaire. L'histoire a beau déjà avoir été raconté plus d'une fois au cinéma, la verve de Fabrice du Welz se charge de remettre les pendules à l'heure.

Et cette histoire (vraie), c'est celle des honeymoon killers Raymond Fernandez et Martha Beck, qui avaient ensorcelé le cinéma de la fin des sixties avec une oeuvre rugueuse et cruelle qu'on devait à Leonard Kastle. À l'origine, il y avait ce fait divers sordide liant un escroc et une mère mal dans sa peau, qui arnaquaient les femmes seules pour ensuite les assassiner. Et pas toujours dans le bon ordre. En 96, Arthur Ripstein en offrait le versant mexicain et (très) romantique avec un Carmin Profond parfois hanté par le spectre de Bunuel. À sa manière, Alleluia semble réconcilier les deux approches en un chant malade et amoureux.

Chez du Welz, on change d'époque et de noms : Gloria est une mère seule, plutôt timide, qui se voit pousser à prendre un rendez-vous galant par le biais d'un site de rencontre. Elle fait la connaissance de Michel, un vendeur de chaussures mûre et séduisant, qui lui redonne goût à la vie. Mais après avoir emprunté de l'argent, Michel disparaît et ne revient plus. Quand l'amante esseulée le retrouve, elle découvre qu'il séduit des femmes pour ensuite les dépouiller sous des prétextes fallacieux : elle ne démord pas et lui demande de l'assister dans sa tâche immorale. Mais le syndrome de l'amour va révéler une autre facette de Gloria...

Une poignée de chapitres regroupe toutes les victimes féminines du métrage, Gloria incluse : Alléluia est un conte poisseux et dégénéré comme l'était Calvaire, prolongeant ce que du Welz a nommé sa trilogie des Ardennes. Dans cette banalité déconcertante tirant vers le grotesque, dans la bizarrerie assumée et l’apprêté, Alleluia retrouve la liberté et l'âme d'un certain cinéma européen (pour ne pas dire français) des 70's, celui dont on savourait les virages brutales, les maladresses et les vices.

Dévorées du début à la fin par une pellicule granuleuse et expressionniste, les deux têtes d'affiche y sont pour beaucoup dans l'entreprise, deux choix risqués alors, mais éloquents : Laurent Lucas d'abord (de plus en plus rare d'ailleurs), dont on avait oublié la nature inquiétante, ici pleinement explorée par du Welz. À total contre emploi de son rôle de Tintin martyr dans Calvaire, il brille dans les ténèbres, séducteur pervers au sourire de démon, sorcier du dimanche aux intentions impénétrables. De l'autre côté, la almodovardienne Lola Duenas, ogresse frustrée qui se consume d'amour et de jalousie, s'offre dans la folie la plus complète, tour à tour rayonnante et bouillonnante. Et on ne l'avait jamais vu comme ça.

D'une escapade d'amants criminels se voulant linéaire, Fabrice du Welz en tire une nouvelle vision déglinguée de l'amour (comme c'était le cas dans Calvaire et Vinyan) mêlant frontalité et humour noir, toujours dans cette frontière entre le rire jaune et le malaise le plus total (les scènes de sexe pas piquées des vers), le tout traversé de choix inattendus allant d'une séquence de transe hallucinante et onirique, à l'irruption d'une scène musicale débouchant sur du gore craspec. Il y a un gout de la provocation (jamais gratuite) qui stimule et bouscule, toujours à deux doigts du rejet. Quelque chose de l'ordre de l’obscénité et de la fureur. Quelque chose qu'on croyait avoir perdu dans le cinéma de genre francophone : Alleluia ? Oui, Alleluia !




Jérémie MARCHETTI

ALICE SWEET ALICE (1977)

 

Titre français : Alice Sweet Alice
Titre original : Alice Sweet Alice
Réalisateur : Alfred Sole
Scénariste Alfred Sole, Rosemary Ritvo
Musique : Stephen Lawrence
Année : 1977
Pays : Usa
Genre : Tueurs fous
Interdiction : -16 ans
Avec Linda Miller, Mildred Clinton, Paula Sheppard, Niles Mc Master, Jane Lowry...


L'HISTOIRE : Alice Spages, 12 ans, vit avec sa mère et sa sœur Karen, à laquelle elle adore faire peur. Karen s’apprête à fêter sa première communion lorsque son corps est retrouvé atrocement mutilé dans l’église. Certains pensent qu’Alice pourrait être à l’origine du meurtre, mais comment une enfant si jeune pourrait-elle commettre une telle abomination ? Pourtant, les meurtres se poursuivent dans l’entourage d’Alice...


MON AVISRéalisateur peu prolifique, avec seulement 4 films et un téléfilm à son actif, dont le curieux La Bête d'Amour en 1980, Alfred Sole, qui s'est suicidé à l'âge de 78 ans, est néanmoins resté célèbre parmi les fans de cinéma de genre avec son second film, le thriller horrifique Alice Sweet Alice, qui date de 1976. Intitulé à l'origine Communion, terme qui sera utilisé pour le film lors de sa sortie française en VHS, sous le titre de Communion Sanglante donc, Alice Sweet Alice a marqué les esprits de par la présence de ce mystérieux tueur portant un masque étrange et vêtu d'un ciré jaune, un vêtement qui n'est pas sans nous rappeler le ciré rouge porté par la petite fille dans le film de Nicolas Roeg, Ne Vous Retournez Pas, et pour cause, Alfred Sole étant un grand fan de ce classique du genre et a voulu lui rendre un hommage en utilisant cet habit de pluie pour son film. 

Clairement, Alice Sweet Alice est un thriller horrifique et par de nombreux aspects, on pourrait la catégoriser parmi le giallo, genre typiquement italien, dont le film de Sole en est l'une des plus belles variations étrangères : meurtres sanglants ; tueur dont on ne connaît pas l'identité ; utilisation d'un masque inquiétant pour dissimuler son visage ; mystère quant à ses motivations ; enquête policière, menée à la fois par des inspecteurs mais aussi par le père divorcée d'Alice et Karen ; plusieurs coupables potentiels dont la sœur de la première victime, qui semble souffrir de quelques troubles psychologiques, troubles parfaitement rendus à l'écran par la jeune actrice Paula E. Sheppard, absolument bluffante dans ce rôle. 

On a également la thématique de la religion qui est bien présente ici, avec une critique du monde ecclésiastique et des adeptes extrémistes de la Foi, qui fait suite à des soucis que le réalisateur a eu avec son premier film Deep Sleep, un porno que l'Eglise a mal accueilli car on y voit la maison d'un évêque. Et pour finir, on a toute une galerie de personnages atypiques, dérangeants même, comme ce propriétaire d'appartements qui pèse dans les 200kg (Alphonso DeNoble), la bonne du curé (Mildred Clinton), cette tante (Jane Lowry) qui semble détester Alice et reste persuadée que celle-ci est la meurtrière de sa sœur, cette mère (Linda Miller) qui délaisse Alice au profit de sa sœur Karen (Brooke Shields dans son premier rôle au cinéma) qui est pourtant une véritable petite peste et qui vit désormais avec un prêtre et Alice elle-même, qui a des comportements des plus malsains et dont le côté démoniaque semble prendre le dessus sur son côté angélique. 

Des protagonistes dont les attitudes créent une véritable ambiance déstabilisante, malsaine même, qui permettent au film de Sole de s'élever au-dessus du simple film d'horreur lambda et de proposer une atmosphère soignée, travaillée, que vient subjuguer une mise en scène précise et inspirée. Tout ce qu'on retrouve dans le giallo, je vous le dit ! Le réalisateur utilise à merveille ses différents décors (l'immeuble, le sous-sol, une usine désaffectée, l'Eglise...) et offre au public quelques excès de violence stylisés, dans lesquels le sang bien rouge coule en abondance. 

Même si le nombre de meurtre est très limité, ces derniers sont réellement efficaces et remplissent tout à fait leur fonction choc. Bref, Alice Sweet Alice joue autant dans la cour du giallo que du film de psycho-killer et du slasher, deux sous-genres qui seront grandement popularisés deux ans plus tard, avec la sortie du Halloween de John Carpenter. Ce qui est très plaisant, c'est que la personnalité même d'Alice fait que le spectateur se demande constamment si cette dernière est coupable ou non et qu'on doute durant une bonne partie du film. 

Autre fait marquant, celui qui nous fait découvrir l'identité du tueur au ciré jaune au bout de 60 minutes, sans que cela ne vienne amoindrir l'intérêt de l'histoire, qui continue à nous intriguer durant les 45 dernières minutes et qui se clôture sur un final assez chargé en violence et émotion. Sur un rythme somme toute assez posé, Alice Sweet Alice n'ennuie jamais tant il y a de petits détails à l'écran qui nous plonge au cœur de l'intrigue (la poupée, le pendentif en forme de croix...) et fait qu'on ne décroche pas nos yeux de l'écran, tentant de faire la lumière sur ces événements macabres et de leur donner une motivation. 

A noter une très bonne partition musicale due à Stephen Lawrence, parfaite pour accompagner les images et participer à renforcer l'ambiance. Petite pépite du cinéma d'horreur 70's, au casting impeccable, intelligent et vraiment très bien réalisé, Alice Sweet Alice mérite d'être redécouvert à nouveau, ne serait-ce que pour admirer la prestation de Paula E. Sheppard, dont le petit sourire et le regard dans la dernière image feront encore planer le doute chez le spectateur...





Stéphane ERBISTI